Dernière mise à jour à 08h44 le 29/01
A l'été 2005, lorsque Pierre Mercan, ayant quitté son poste de professeur de français dans un lycée de Shanghai, est arrivé à Nanchang pour enseigner dans le département de français de l'Ecole des langues étrangères de l'Université de Nanchang, dans la province chinoise du Jiangxi (est), le campus ressemblait à un village en dehors de la ville." A cette époque-là, la Nouvelle Zone de Honggutan n'existait pas. De ce côté de la rivière, il n'y avait pratiquement rien. Il y avait juste le bâtiment de la mairie, au milieu des champs. Il y avait dix fois moins de voitures en ville qu'il n'y en a maintenant, il n'y avait pas de métro, beaucoup moins de supermarchés et de commerces, c'était une ville complètement différente."
Il y a 13 ans, il y avait beaucoup moins d'étrangers à Nanchang. Il pouvait passer des semaines sans en croiser un seul, à part les collègues qu'il connaissait dans le campus. Maintenant, quand il va au centre ville, c'est rare s'il ne croise pas des gens d'origines variées.
Au cours des 13 années passée à Nanchang, Pierre a été le témoin du développement de la ville. Aujourd'hui, la Nouvelle Zone de Honggutan est pratiquement deux fois plus développée que l'autre partie de la ville. De son point de vue, cette évolution rapide reflète le miracle de la vitesse de la Chine.
"J'avais envie d'aller en Chine depuis pas mal de temps parce que je suis assez fou de tout ce qui est nature, et que la Chine est un endroit très intéressant à visiter si on a cet intérêt là", explique Pierre. Il a beaucoup voyagé dans la province avec ses étudiants. Ils se sont rendus dans des montagnes célèbres telles que les monts Lushan, Sanqing et Wugong, ainsi que dans des villages peu connus. "Quand j'en ai l'occasion, je vais dans différents endroits avec mes anciens élèves, j'ai fait plein de périples en voiture. Et je suis allé l'année dernière à Ganzhou, dans un petit village où j'ai un ancien élève. On a circulé dans la montagne, moi, j'adore ça. Les gens de la campagne sont toujours un peu étonnés de me voir arriver, parce qu'ils n'ont pas tellement l'habitude de voir des étrangers, mais ils sont très sympas, leur vie m'intéresse beaucoup."
Etant l'un des premiers enseignants français au département de français de l'Université de Nanchang, Pierre entretient des relations très étroites avec ses étudiants. Et cela continue, même au bout de dix ans. "Les relations avec les étudiants sont très agréables. C'est un plaisir d'être professeur en Chine, parce qu'on a une relation très proche. Je garde les étudiants quatre ans, je les vois depuis leur entrée ici jusqu'au moment où ils partent. Je vais garder toute ma vie des relations avec mes élèves, au moins avec certains d'entre eux," estime-t-il.
Pierre a 55 ans, le même âge que l'établissement des relations diplomatiques entre la Chine et la France. Il est content de voir de plus en plus d'étudiants bénéficier d'un programme d'échange entre les universités des deux pays.
"On a de plus en plus d'étudiants qui vont en France, chaque année on en envoie à Poitiers, c'est une excellente opportunité pour eux", explique Pierre, "La culture chinoise est assez différente de la culture européenne sur certains points, donc quand vous vivez dans un autre pays, vous redécouvrez en même temps votre propre culture. Vous posez des questions sur votre culture et sur la culture du pays dans lequel vous êtes. Même si Internet rapproche les gens de façon importante, même si je vois tout sur Internet, ce n'est pas la même chose que vivre dans un pays et d'avoir contact direct avec la population. De plus, tous les élèves qui sont allés en France deviennent plus heureux aussi parce qu'ils quittent leur famille pendant un moment, donc ils sont obligés de se débrouiller, de vivre par eux-même. Ils découvrent ce qu'est la vie en France. Même si je peux leur raconter ou leur rapporter une petite vision, ils doivent découvrir par eux-même."
Une autre professeur française à l'Université de Nanchang, Yeliz Leblanc, aime aussi sa vie à Nanchang. Yeliz, 32 ans, enseigne depuis octobre 2017 à l'Institut Franco-Chinois de management. Elle a choisi de travailler en Chine non seulement pour le salaire et les conditions de travail, mais également parce que son compagnon est d'origine chinoise. "Avant de venir en Chine, je connaissais un peu le pays. Mais honnêtement, je n'ai fait aucune recherche sur la Chine parce que je voulais arriver comme une page blanche qu'on doit remplir, et apprendre la culture chinoise des Chinois eux-mêmes," raconte Yeliz.
C'est surtout à travers ses élèves qu'elle découvre la culture chinoise. Ils souhaitent tisser des liens d'amitié avec elle, passer du temps avec elle. Il y a beaucoup d'échanges entre eux. Pour Noël, Yeliz a invité ses élèves à manger chez elle, dans son appartement. Lors de la fête des lanternes, les étudiants l'ont emmenée visiter la pagode Shengjin et manger du Tangyuan, une sorte de boulette ronde et sucrée à base de farine de riz gluant, qui est devenu son plat chinois préféré.
Yeliz est d'origine turque, et alors que sa compréhension de la culture chinoise s'approfondissait, elle a découvert que la culture chinoise avait beaucoup de points communs avec les Turcs au niveau de famille, des amis, et même de la nourriture. "Ce que je trouve de plus beau dans la culture chinoise, c'est l'hospitalité chinoise. Les Chinois sont très aimables, accueillants et souriants. Ils feront toujours de leur mieux pour vous accueillir et vous satisfaire. Ils vous demanderont toujours ce que vous souhaitez manger et préparerons des plats à votre goût et en grande quantité pour que vous puissiez manger à votre faim. S'ils vous accueillent dans leur ville natale, vous aurez la chance de déguster de bons plats et de découvrir les lieux à travers les yeux de votre hôte. De plus, dans ma vie quotidienne en Chine je me sens en sécurité. C'est ce que j'ai pu constater à Nanchang et dans d'autres villes, je peux sortir à n'importe quelle heure," raconte-t-elle.
Yeliz aimerait bien vivre plus longtemps en Chine. Elle étudie également le chinois pour avoir plus d'échanges avec les habitants. Elle est habituée aux achats en ligne et quand elle fait ses courses dans les magasins, elle paye avec son téléphone portable. Elle est presque une jeune chinoise habituée aux modes de vie chinois modernes. "Même si je repars aujourd'hui, je repartirai enrichie culturellement et humainement, parce que j'ai fait de très belles rencontres ici, et j'aurai cette nouvelle image de la Chine."