Dernière mise à jour à 14h06 le 03/11
Un agriculteur utilise une pelle pour séparer les grains de blé de la balle dans le village de Zhangyao de la ville d'Erlang, dans le comté de Xiping de la province du Henan (centre de la Chine), le 26 mai 2020. (Photo / Xinhua) |
Compte tenu de ses terres cultivables limitées et de son immense population, la Chine a toujours souligné l'importance de prévenir le gaspillage alimentaire des étapes de la récolte, du transport, du stockage et de la transformation des aliments à la table à manger. Il n'est donc pas étonnant que le document officiel publié après la conclusion de la 5e session plénière du 19e Comité central du Parti communiste chinois ait souligné le 28 octobre dernier la nécessité d'économiser la nourriture et d'éviter le gaspillage alimentaire.
Au cours des cinq dernières années, la production céréalière annuelle de la Chine a dépassé 650 millions de tonnes. Malgré cela, le document indique que le pays doit assurer la sécurité alimentaire en améliorant la compétitivité de son secteur agricole et en revitalisant ses villages. En fait, la campagne « Videz votre assiette » a été lancée récemment pour trouver un équilibre entre l'urbanisation rapide et la sécurité alimentaire, ce qui est important pour nourrir les 1,4 milliard d'habitants de la Chine à un moment où elle promeut un « développement vert et durable ».
Malgré les impacts de la pandémie de COVID-19 et des inondations estivales massives, les pluies abondantes de cette année ont profité aux principales zones de production céréalière du nord et du nord-est de la Chine, ce qui devrait plus ou moins compenser les pertes causées par les inondations dans le bassin du fleuve Yangtsé. Grâce à une récolte estivale exceptionnelle et une bonne récolte d'automne, le rendement annuel des cultures devrait atteindre un nouveau sommet cette année.
La production totale de céréales de la Chine a augmenté pendant 16 années consécutives depuis 2003 -elle était de 663,84 millions de tonnes en 2019. De ce fait, le pays bénéficie d'une sécurité alimentaire absolue, en particulier dans les produits de base (riz, blé et maïs) ; il a suffisamment de céréales vivrières en stock pour nourrir toute la nation pendant une année complète.
La Chine bénéficie d'une production alimentaire intérieure excédentaire, l'offre de céréales dépassant largement la demande. Et depuis 2014, le gouvernement mène des réformes structurelles de l'offre pour améliorer la qualité des aliments au lieu de chercher uniquement à augmenter la production.
Dans la mesure où la prévention du gaspillage alimentaire et la conservation des aliments ne suffisent pas à assurer sa sécurité alimentaire, la Chine attache une grande importance à devenir auto-suffisante en matière de production alimentaire. Selon le Bureau national des statistiques, la Chine utilise 71% de ses terres agricoles totales pour cultiver du riz, du blé et du maïs, et produit 10 à 20 millions de tonnes de riz et de blé excédentaires chaque année.
Cependant, en raison de terres cultivables limitées, la Chine doit importer d'autres produits agricoles pour répondre aux besoins de sa population et a dépassé les États-Unis en tant que premier importateur mondial de produits agricoles, dépensant plus de 180 milliards de dollars chaque année pour cela. Le soja constitue l'essentiel des importations agricoles chinoises, atteignant un sommet de plus de 95 millions de tonnes en 2017 -qui est tombé à environ 90 millions de tonnes après que les États-Unis ont lancé la guerre commerciale contre la Chine en 2018.
Alors que le PIB par habitant de la Chine a franchi 10 000 dollars, la demande de céréales de la Chine devrait diminuer à l'avenir, avec une augmentation correspondante de la demande de produits de l'élevage, notamment la viande, les œufs et le lait, comme on le voit dans les pays développés d'Asie comme le Japon et le République de Corée. De plus, étant donné que la population chinoise devrait culminer vers 2030, la pression exercée sur le pays pour assurer sa sécurité alimentaire s'atténuera quelque peu, même si la demande de soja en tant que produit alimentaire pourrait voir la Chine importer jusqu'à 100 millions de tonnes de soja chaque année.
La Chine se procure ordinairement la plupart de ses importations de soja d'Amérique du Nord et du Sud. Mais la baisse de ses importations en provenance des États-Unis en raison de la guerre commerciale sino-américaine lui a fait prendre conscience de l'importance de diversifier ses marchés d'importation pour assurer un approvisionnement stable. En outre, l'importation par la Chine de plus de 90 millions de tonnes de soja chaque année libérera le potentiel agricole de nombreux pays, en particulier ceux situés le long de l'initiative « la Ceinture et la Route » en Asie du Sud-est et dans la région de la mer Noire, comme la Russie et l'Ukraine.
Bien que la production totale de céréales dans le monde dépasse la demande, des gens souffrent encore de la faim dans de nombreux endroits parce que leurs pays ne produisent pas suffisamment de céréales alimentaires ou n'ont pas les moyens de les importer d'autres pays. Et les fluctuations des marchés internationaux aggravent la situation, comme on l'a vu pendant la crise financière mondiale.
Il est donc nécessaire que la Chine soit auto-suffisante en produits de base et bâtisse une chaîne d'approvisionnement agricole mondiale sûre en diversifiant ses marchés d'importation. Et avec une série de politiques préférentielles pour les agriculteurs et la campagne « Videz votre assiette », la Chine continuera d'augmenter sa productivité alimentaire et de sauvegarder sa sécurité alimentaire.
L'auteur, Cheng Guoqiang, est professeur d'études agricoles à l'Université Tongji de Shanghai.