Le Premier ministre français Jean-Marc Ayrault a réaffirmé vendredi la volonté de l'exécutif de procéder à la publicité du patrimoine des élus parlementaires, alors que des voix s'élèvent, à droite comme à gauche, contre ce projet.
"Nous irons jusqu'au bout à travers le projet de loi" qui sera présenté le 24 avril en Conseil des ministres, a fait savoir vendredi matin sur RTL le Premier ministre.
Indiquant avoir entendu les "craintes de certains élus", M. Ayrault a martelé qu' "il y a un besoin de transparence".
"Quand on exerce une responsabilité publique (...), je crois que la transparence est nécessaire (...) D'autres pays l'ont fait avant nous et ne s'en portent pas plus mal", a-t-il fait valoir.
Le Premier ministre ne fera pas figure d' exception et se pliera lui aussi à l' exercice. "Ca ne me pose pas de problème, j'ai déjà rendu public plusieurs fois mon patrimoine et celui de mon épouse, puisque nous sommes mariés sous le régime de la communauté", a-t-il indiqué.
La "transparence absolue", prônée par l' exécutif suite au scandale d' évasion fiscale de l' ancien ministre Jérôme Cahuzac suscite quelques réticences de la part de la classe politique française, y compris au Parti socialiste (PS), dont M. Ayrault est issu.
Au lendemain de la présentation par le président François Hollande des grandes lignes de son plan de moralisation politique, le président de l' Assemblée nationale et membre du PS, Claude Bartolone, a exprimé son opposition à l'une des mesures phares défendues mercredi par le chef de l' Etat, à savoir la publication du patrimoine des élus.
"La dérive individuelle de M. Cahuzac ne doit pas déboucher sur une culpabilité collective", a-t-il déclaré au journal Le Figaro, mettant en garde son président contre la tentation du populisme. "L'émotion d'un moment ne doit pas aboutir à ce que les députés soient jetés en pâture", a insisté M. Bartolone.
Ces réserves sont d'ailleurs partagées par plusieurs personnalités françaises, y compris de gauche. Le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer, pourtant proche du président Hollande, avait affirmé mercredi matin sur la radio française Europe 1 "ne pas beaucoup aimer l'étalage des informations personnelles sur la place publique".
A droite, Jean-François Copé, président du principal parti d' opposition, l' UMP (Union pour un mouvement populaire, droite), a mis en garde mardi sur France 2 contre un "numéro de voyeurisme et d'hypocrisie", assurant toutefois que "naturellement, il rendrait public son patrimoine".
Le même jour sur Canal +, le député UMP Henri Guaino, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy, a qualifié de "totalitaire" toute ambition de "transparence totale", estimant que "tout cela est absolument indécent et démagogique".
"En plus des ministres et des parlementaires, qui y étaient déjà soumis, l'obligation de transparence annoncée par François Hollande va désormais s'appliquer" à d' autres hauts responsables publics, rappelle le quotidien Les Echos.
Il s' appliquera "aux membres du Conseil constitutionnel, aux principaux responsables exécutifs locaux (présidents de région, maires de grandes villes, etc.), aux membres des autorités administratives indépendantes, aux collaborateurs des cabinets ministériels et du président de la République, aux titulaires d'emploi à la décision du gouvernement nommés en Conseil des ministres (préfets par exemple) et aux dirigeants de grande entreprise publique", détaille le journal.
Et le quotidien économique de préciser que "les déclarations des ministres et secrétaires d'Etat, ainsi que celles des parlementaires seront rendues publiques".
Si certains ministres ont déjà rendu public leur patrimoine, l' ensemble du gouvernement a jusqu' à lundi pour faire de même.