Le président américain Barack Obama et la chancelière allemande Angela Merkel ont averti vendredi que les deux pays pourraient imposer des sanctions supplémentaires à l'encontre de la Russie, si cette dernière déstabilise davantage l'Ukraine, faisant ainsi preuve d'unité alors que la crise s'aggrave dans l'ancien Etat soviétique.
Cependant, les deux pays sont tout de même restés divisés sur la question des pratiques de surveillance américaines lors de la visite de Mme Merkel à Washington, sa première depuis les révélations, l'année dernière, du dénonciateur américain Edward Snowden, selon lesquelles Washington a espionné nombreux de ses alliés, dont Angela Merkel.
UNIS POUR IMPOSER DES SANCTIONS A LA RUSSIE
"Nous n'aurons pas d'autre choix que d'imposer des sanctions supplémentaires plus sévères" si la Russie perturbe les élections présidentielles en Ukraine, prévues le 25 mai, a annoncé le président Obama lors d'une conférence de presse conjointe avec Angela Merkel, tenue à la Maison Blanche.
"Nous sommes confiants dans le fait que les prochaines sanctions auront un impact supplémentaire sur la croissance et l'économie de la Russie", a déclaré M. Obama, ajoutant que les sanctions pourraient viser les secteurs russes de l'énergie, des armes et de la finance.
Mme Merkel a précisé que l'Union européenne (UE) est prête à imposer une nouvelle série de sanctions à la Russie couvrant "un large éventail de possibilités", soulignant que les sanctions montrent que "nous prenons nos principes au sérieux".
Les deux dirigeants se sont rencontrés alors que Kiev a lancé une offensive militaire contre les militants pro-russes, pour reprendre possession des bâtiments gouvernementaux occupés par ces derniers dans l'est de l'Ukraine. La Russie a accusé cette opération, déclarant qu'elle efface tout espoir de chances de réussite des accords de Genève, conclus le 17 avril.
Les Etats-Unis et l'UE ont annoncé lundi de nouvelles sanctions à l'encontre d'officiels et d'entreprises russes. Cependant, certains officiels européens ont fait part de leur inquiétude que ces sanctions pourraient se retourner contre l'Europe, étant donné la dépendance de l'Europe à la Russie en matière d'énergie.
Il existe également une forte opposition à des mesures plus sévères à l'encontre de la Russie, principalement de la part d'entreprises européennes qui font affaires avec la Russie.
Le gouvernement de Merkel fait aussi face à la pression de grands noms du monde des affaires allemand, qui exhortent Berlin à ne prendre aucune mesure comme cela aurait un impact sur leurs intérêts.
Tout en faisant part de leur détermination d'imposer des sanctions supplémentaires dans le cas d'une déstabilisation plus importante de l'Ukraine par la Russie, les deux dirigeants ont exprimé l'espoir que la crise en Ukraine sera résolue par la voie diplomatique.
"Nous préférons une solution diplomatique à ce problème", a déclaré M. Obama, ajoutant "nous espérons ne pas avoir à imposer" les sanctions.
DIVISES SUR LA QUESTION DE L'ESPIONNAGE AMERICAIN
Questionnée sur la possible restauration de la confiance entre les deux nations à la suite des révélations d'espionnage, Mme Merkel a annoncé : "Au vu de la situation (...), nous avons encore quelques difficultés à surmonter."
La divulgation de l'ancien agent de l'agence américaine de sécurité nationale (NSA), Edward Snowden, portant sur les écoutes du téléphone portable de la chancelière allemande a suscité une large indignation en Allemagne et provoqué des tensions entre les deux pays.
Au moment de la révélation, Mme Merkel avait annoncé que "l'espionnage entre amis est tout simplement inacceptable". Elle avait averti qu'il faudrait "plus d'une visite" pour remédier à la situation.
Vendredi, admettant que les Etats-Unis et l'Allemagne ne sont pas "parfaitement alignés" sur cette question "compliquée", M. Obama a dit : "Nous avons parcouru un long chemin pour résoudre certains différends, mais comme l'a dit la chancelière Merkel, nous avons encore d'autres problèmes à régler."
M. Obama a annoncé que les Etats-Unis organiseraient un "cyber-dialogue" avec l'Allemagne pour aborder les différends liés aux pratiques des renseignements.
La chancelière a souligné l'importance de ce cyber-dialogue entre les deux pays, ajoutant "nous devrons aborder et aborderons ce sujet (espionnage) en plus des affaires dont nous traitons habituellement".
M. Obama s'est également dit personnellement ennuyé par la réaction de Berlin.
"Angela Merkel est l'une de mes plus proches amis sur la scène mondiale, et j'accorde une grande importance à son partenariat", a révélé M. Obama. "J'ai été attristé de voir à quel point les révélations de Snowden ont créé des tensions dans nos relations."
Le président a cependant nié que les Etats-Unis ont proposé à l'Allemagne un accord de non-espionnage, ajoutant "nous n'avons pas d'accord de non-espionnage avec des pays, même avec nos partenaires les plus proches".