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France : Le scandale du lait infantile dévoile toute une série de défaillances et d'anomalies

Xinhua | 16.01.2018 09h05

Le scandale sanitaire des laits infantiles contaminés à la salmonelle du groupe agroalimentaire français Lactalis, révélé en décembre dernier, met en lumière une série d'anomalies et de dysfonctionnements présents dans les dispositifs de sécurité alimentaire en France.

L'enquête ouverte par le pôle de santé publique du parquet de Paris devra identifier les responsabilités respectives du fabricant Lactalis, de l'Etat et des distributeurs.

Dernière annonce en date dans le feuilleton du scandale Lactalis, le ministre français de l'Economie Bruno Le Maire a annoncé lundi qu'il allait réunir le Conseil national de la consommation pour réfléchir à "une amélioration des procédures de retrait et de rappel, sur la base d'un diagnostic approfondi".

"Que chacun mesure bien ses responsabilités dans cette affaire, Etat, industriels, distributeurs, ou plateformes de distribution", a-t-il dit, ajoutant que la sécurité sanitaire des consommateurs n'était "pas négociable".

Trente-cinq bébés, qui ont été atteints de salmonellose en France, ont consommé un lait ou un produit d'alimentation infantile Lactalis infecté par la salmonelle dans les trois jours précédant la date de début de leurs symptômes.

Un nourrisson a également contracté la salmonellose en Espagne et un autre cas reste à confirmer en Grèce, selon un article rendu public par Eurosurveillance et rédigé par des scientifiques de l'Institut Pasteur et Santé publique France.

De son côté, le PDG du groupe français Lactalis, Emmanuel Besnier, est sorti de son silence.

Dans un entretien au Journal du dimanche, il a promis d'indemniser toutes les familles touchées, précisant que le rappel de lait infantile auquel il va devoir procéder dans les prochains jours concerne "plus de 12 millions de boîtes", à récupérer dans pas moins de 83 pays.

La contamination dans l'usine de Craon (Mayenne) du groupe agroalimentaire français Lactalis a été révélée au public au début de décembre. M. Le Maire a signé le 9 décembre un arrêté demandant la suspension de la commercialisation des laits infantiles de cette marque et le rappel de plus de 600 lots.

Fin décembre, le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire pour "blessures involontaires", "mise en danger de la vie d'autrui", "tromperie aggravée par le danger pour la santé humaine" et "inexécution d'une procédure de retrait ou de rappel d'un produit" préjudiciable à la santé.

La semaine dernière, le scandale sanitaire et industriel a encore pris de l'ampleur lorsque l'enseigne de grande distribution Leclerc a annoncé avoir retrouvé dans ses circuits de distribution 984 produits non autorisés à la vente et en avoir vendu à 782 clients.

Le fabricant Lactalis, l'Etat et les distributeurs sont tous soumis au règlement européen 178/2002, qui stipule que "tout exploitant du secteur alimentaire informe immédiatement les autorités compétentes lorsqu'il considère ou a des raisons de penser qu'une denrée alimentaire qu'il a mise sur le marché peut être préjudiciable à la santé humaine."

Le producteur doit établir un "plan de maîtrise sanitaire" avec les pouvoirs publics et les distributeurs, incluant l'hygiène et la traçabilité des produits.

Des associations de consommateurs s'interrogent sur la rigueur du géant de l'agroalimentaire en la matière. Lactalis se voit aussi reprocher d'avoir tardé à réagir après la détection de salmonelle dans son usine de Craon, lors d'auto-contrôles réalisés en août et novembre 2017.

"Ratés du système de traçabilité"

Qui pis est, lorsque Lactalis était chargé de la mise en oeuvre de la procédure de retrait des lots suspects, des produits contaminés ont continué à être vendus malgré trois rappels.

La ministre française de la Santé, Agnès Buzyn, a déploré une forme de "résistance" dans le retrait.

M. Le Maire a de son côté estimé jeudi qu'en élargissant le nombre de lots concernés par les rappels, "l'Etat s'est substitué à une entreprise défaillante", qui est "la seule responsable de la qualité et de la sécurité des produits mis sur le marché".

Selon le ministre de l'Economie, les 2.500 contrôles menés depuis le 26 décembre par les services de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ont montré que 91 établissements "détenaient des boîtes qu'ils auraient dû retirer : 30 grandes surfaces, 44 pharmacies, 2 crèches, 12 hôpitaux et 3 grossistes.

Une nouvelle vague d'enquêtes doit donc être menée dans 2.500 établissements par les services de la DGCCRF.

Plusieurs responsables politiques sont montés au créneau, affirmant que la DGCCRF, en raison d'une baisse de son budget et de son personnel, n'avait pas les moyens de remplir pleinement et efficacement son rôle de surveillance.

"Quand on a des crèches, des hôpitaux qui continuent de distribuer ce type de produits, ça signifie qu'il y a une faille, qu'il y a des garde-fous qui ne sont pas respectés", a estimé Quentin Guillemain, président de l'association des victimes, lors d'un point presse lundi.

L'ONG spécialiste de l'agroalimentaire Foodwatch a de son côté dénoncé les "ratés du système de traçabilité".

Tous les grands distributeurs, de Carrefour à Auchan en passant par Leclerc et Système U, ont reconnu des défaillances : toutes les grandes chaînes ont continué à vendre des produits contaminés après leur rappel.

Certaines enseignes ont tenté de se justifier, évoquant la période des fêtes, ou encore une inflation incompréhensible dans les procédures de retrait.

Des familles concernées par l'affaire des lots de poudre de lait pour bébé contaminés envisagent de porter plainte également contre les grands distributeurs.

(Rédacteurs :Guangqi CUI, Wei SHAN)
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