Alors que l'enquête française pointe du doigt la société française Spanghero, spécialisée dans le négoce de viande, qui sera poursuivi pour "tromperie économique", la dimension européenne de cette affaire prend chaque jour un peu plus d' ampleur.
Le volet français de l' enquête sur le scandale dit de la viande de cheval, qui a mis au jour un étiquetage frauduleux de lots de viande de cheval estampillée "bœuf", a débouché jeudi sur la mise en cause de la société française Spanghero, qui aurait acheté de la viande de cheval avant de la revendre en tant que viande de bœuf, a indiqué jeudi le ministre français délégué à l' Economie sociale et solidaire et à la Consommation, Benoît Hamon.
"L'enquête démontre que Spanghero savait qu'il étiquetait 'bœuf' potentiellement de la viande chevaline. En tout cas, il y a une suspicion forte", a déclaré jeudi M. Hamon, ajoutant que l' entreprise s' est vu retirer son agrément sanitaire qui lui permet de traiter de la viande sur décision du ministère de l'Agriculture.
Le président de Spanghero, Barthélémy Aguerre, a réagi vendredi matin à ces accusations, estimant que M. Hamon est "allé un peu vite" en accusant son entreprise et qu' il "met en danger 300 personnes qui travaillent chez Spanghero sans aucune preuve", selon la presse française.
Par ailleurs, le ministre délégué a souligné les négligences de l' usine luxembourgeoise de l' entreprise française Comigel, qui a utilisé la viande livrée par Spanghero dans la préparation de plats cuisinés, en ce qui concerne les contrôles qu' elle aurait dû opérer à la livraison de la viande.
"Dans le cadre des contrôles qu' elle doit opérer, l' usine luxembourgeoise de Comigel aurait dû s' interroger sur le fait que l' étiquette n' était déjà pas conforme. En effet, pour la viande de bœuf, la loi prévoit que la mention du pays d' origine est obligatoire en vertu des règlements européens", a souligné M. Hamon lors de la présentation des résultats de l' enquête jeudi.
En effet, la viande a été livrée à Comigel comme étant originaire de l' Union européenne. De plus, le ministre délégué a estimé que Comigel aurait dû remarquer que la couleur et l' odeur de la viande n' était pas celles de la viande de bœuf.
Vendredi matin, le président de Comigel, Erick Lehagre, a fait valoir que la viande livrée par Spanghero était "cuisinée sans décongélation", empêchant de "détecter la tromperie" par la couleur ou l' odeur, et qu' elle portait "l'estampille sanitaire française apposée par Spanghero", toujours selon les médias français.
Si la fraude semble imputable à des tromperies ou négligences d' entreprises françaises, plusieurs pays européens sont touchés par la commercialisation des plats préparés de Comigel. L'affaire avait d' ailleurs débuté en Grande-Bretagne et en Irlande du Nord, où les premières traces de viande chevaline avaient été détectées dans des lots de viande estampillée bœuf.
Outre ces pays, de la viande de cheval a été retrouvée dans des plats cuisinés censés contenir du bœuf et commercialisés en Allemagne, en Norvège et en Suisse, et des retraits de produits ont également été effectués par précaution en Suède et aux Pays-Bas. Des enquêtes ont été ouvertes dans tous ces pays.
Lors d'une réunion de crise organisée mercredi soir à Bruxelles, les ministres européens de l'Agriculture ont décidé de lancer une campagne de tests ADN dans tous les Etats membres et de confier à Europol la coordination des diverses enquêtes judiciaires nationales.
Quelque 2 500 tests ADN devront être effectués à travers toute l'Europe sur les plats au bœuf, et les Etats devront procéder à 4 000 contrôles pour détecter la présence éventuelle de phenylbutazone, un anti-inflammatoire donné aux chevaux et rendant la viande impropre à la consommation humaine.
Le plan européen comporte également un projet d' amélioration de l'étiquetage afin de préciser l'origine de la viande et une série de tests qui seront menés par les services vétérinaires et sanitaires de la Commission européenne.
Toutes ces mesures sont examinées vendredi par un comité d'experts européens et figureront également au programme du prochain Conseil européen de l'Agriculture organisé le 25 février à Bruxelles, rappelle vendredi la presse française.