Des experts ont averti que le smog fréquent qui touche la Chine pourrait dissuader les Chinois de l'étranger de revenir, alors le début de la saison de chauffage dans le nord du pays risque d'aggraver le problème.
De nombreuses villes du nord de la Chine ont officiellement mis en marche le chauffage public vendredi dernier, mettant la pression sur le Gouvernement qui tente de lutter contre le smog en réduisant la consommation de charbon.
Avec la bataille de la pollution entrant dans une période décisive, Xinhua s'est adressé à un éventail de Chinois ayant à la fois une expertise en matière atmosphérique et une expérience de vie à l'étranger. Pour eux, la gravité du problème est claire comme une journée bleu-ciel.
Lin Yanluan, professeur agrégé au Centre pour la science du système terrestre de l'Université de Tsinghua, est revenu en Chine en 2012 après 11 ans aux États-Unis.
M. Lin avait entendu parler de la pollution de l'air en Chine avant son retour mais ne s'attendait pas à ce qu'elle soit si grave. Cet homme âge de 40 ans a dit: « Beaucoup de gens autour de moi ont des maladies respiratoires qui peuvent être liées à la pollution de l'air. Je ne joue presque jamais au basket en plein air maintenant ».
Un des amis de Lin aux États-Unis a envoyé un message sur son blog pour exprimer son inquiétude. « Il voulait revenir et développer sa carrière, mais il craignait que la santé de son enfant ne soit affectée par le temps brumeux », a expliqué M. Lin.
En tant que scientifique atmosphérique, M. Lin a mené une expérience prouvant qu'un smog à grande échelle diminue la circulation atmosphérique, faisant que la pollution reste plus longtemps.
« La météo exerce une forte influence sur le smog. Il semble que vous ne pouvez voir du ciel bleu à Beijing que quand il y a du vent pour balayer le smog », a-t-il ajouté.
A qui la faute ?
Soixante-dix des 74 villes chinoises surveillées par le Ministère de la protection de l'environnement ont souffert d'une pollution de l'air au troisième trimestre de cette année, a récemment annoncé le Ministère. Dans le cas de 15 d'entre elles, plus de la moitié des 92 jours ne répondaient pas aux normes atmosphériques du Ministère.
Wu Qiong, 26 ans, est étudiante étrangère à Pittsburgh. Pour elle, la pollution de l'air en Chine est entrée chez elle quand elle a comparé des images du canard en caoutchouc géant qui a fait le tour du monde. À Pittsburgh, il flottait sous des nuages blancs, se rappelle Melle Wu. Mais à Beijing, tout était enveloppé dans la grisaille.
« Mes amis et moi sommes préoccupés par la mauvaise qualité de l'air en Chine. Outre les possibilités d'emploi, on pourrait dire que le smog persistant est déjà devenu un nouveau facteur à considérer lorsque les Chinois de l'étranger décident ou non de revenir », dit-elle.
La lutte contre le smog a été mise à l'ordre du jour des gouvernements chinois à tous les niveaux, et elle est devenue un sujet brûlant lors des séminaires universitaires ainsi que des discussions dans les ménages.
« Les causes sont diverses et complexes. Nous devons analyser les sources et la dispersion du smog », a déclaré Zhao Chuanfeng, professeur à la Faculté des sciences du changement planétaire et du système terrestre de l'Université normale de Beijing.
Zhao est parti aux États en 2002 et a travaillé en Californie après l'obtention de son diplôme. Il est revenu en Chine il n'y a pas longtemps.
Il a souligné que l'utilisation du charbon, les émissions produites par la circulation automobile et la poussière atmosphérique contribuent à la pollution de l'air.
« Les polluants contribuant au smog proviennent de nombreuses sources, donc nous avons besoin de comprendre leur contribution relative en construisant des sites d'observation et des modèles de dispersion », selon M. Zhao.
Une personne qui a tenté cette répartition est Yan Hao, Directeur adjoint de la police de l'environnement à Xi'an, qui a seulement connu cinq jours avec une bonne qualité de l'air au cours du premier trimestre de cette année.
« L'utilisation du charbon, les émissions produites par la circulation automobile et la poussière atmosphérique représentent 75% du total des polluants générateurs de smog à Xi'an », a déclaré M. Yan.
Une autre fraction de 10% des polluants a été apportée par les gaz de déchets organiques provenant de sources comme les stations d'essence, les ateliers de réparation automobile et les décorations pour la maison, a-t-il ajouté. « Et nous avons plus de 10 000 restaurants dégageant des vapeurs de cuisson et consommant des carburants ».
Un long chemin à parcourir
Xiao Hang est revenu du Canada l'an dernier et est devenu chercheur à l'Institut de l'environnement urbain relevant de l'Académie chinoise des sciences.
« Je pense que ce smog lourd aura une incidence sur l'image internationale de la Chine », a-t-il dit. Ses amis au Canada ont discuté régulièrement de cette question. Quand ils évoquent les opportunités de développement en Chine, l'environnement et la santé en sont venus à tenir une plus grande importance ces dernières années.
Comme Xiao Hang, Fu Yu, 40 ans, a quitté l'Université d'Harvard et est retourné en Chine cette année.
« Mon fils a appris à économiser l'énergie et protéger l'environnement dans un jardin d'enfants américain », a-t-il dit. « Mais j'ai trouvé que dans notre pays, beaucoup de gens ne savent toujours pas grand-chose à ce sujet ».
Mais le Gouvernement chinois a pour objectif de remédier à cette ignorance. En septembre, la Chine a annoncé un plan d'action destiné à lutter contre la pollution de l'air, visant à réduire la densité de particules inhalables d'au moins 10% dans les grandes villes du pays d'ici 2017.
« Xi'an est en train de fermer les sites très polluants et de faire la promotion des énergies respectueuses de l'environnement », selon Yan Hao.
Le nombre total de véhicules à Xi'an se monte à environ 1,7 million, qui consomment 1,35 million de tonnes de pétrole et émettent 300 000 tonnes de polluants majeurs chaque année, un montant qui est égal au niveau des rejets industriels de la ville.
En réponse, les services de la sécurité publique ont durci les contrôles sur les véhicules, comme par l'élimination progressive des modèles anciens.
Lin Yanluan a également rappelé que quand il était dans les rues de New York, l'odeur des gaz d'échappement des véhicules n'était pas aussi piquante qu'à Beijing.
« Donc, l'amélioration de la qualité de l'essence est également très importante », a observé M. Yan.
A Xi'an, plus de 70 600 stations-service de la ville se sont tournées vers des carburants plus propres pour répondre à la norme nationale de niveau IV, qui autorise une teneur en soufre du carburant ne dépassant pas plus de 50 parties par million (ppm).
« Selon des experts, cette norme pourrait réduire les gaz d'échappement des véhicules de 10% par rapport à la norme de niveau III à teneur en soufre aussi élevée que 150 ppm », a dit M. Yan.
Xiao Hang vit aujourd'hui dans la ville côtière de Xiamen. « La qualité de l'air est bonne ici, mais peut-être que ces villes devront faire face au même problème un jour », a-t-il dit.
C'est un problème auquel les grandes villes des pays industrialisés se heurtent depuis des décennies. La Chine a encore un long chemin à parcourir, a ajouté M. Xiao.