Le président de l'Assemblée populaire nationale algérienne (APN, chambre basse du Parlement), Mohamed Larbi Ould Khelifa a révélé mercredi que son pays va prochainement doter la Constitution d'amendements en mesure de consacrer une véritable démocratie dans le pays. Des propos que l'opposition considère comme peu convaincants et émet des doutes quant aux intentions réelles du pouvoir.
"Le projet de révision de la Constitution dont l'APN a reçu une copie comprend de profonds amendements et constitue un grand pas vers une véritable démocratie", a indiqué M. Ould Khelifa qui était invité de la télévision d' Etat.
Avançant davantage de détails, le président du Parlement a noté que le projet comprend "des principes en faveur de la séparation des pouvoirs, l'octroi de larges prérogatives au Parlement dans le domaine législatif et de contrôle et l'accès à la responsabilité à travers le vote", précisant l'importance de la participation de l'opposition à travers "des propositions et des enrichissements" sur ce projet.
A propos de l' opposition, le président de l' APN annonce qu'une marge de manœuvre plus grande concernant le droit à l'exercice de l'action législative au sein du Parlement lui sera accordée.
Au sujet des nouvelles prérogatives du Parlement, M. Ould Khelifa a promis qu' elles seront plus larges et concerneront entre autres "le retrait de confiance au chef du gouvernement qui sera responsable devant le Parlement et qui peut (le chef du gouvernement) être issu du parti qui remporte la majorité lors des législatives".
LE POUVOIR FAIT DIVERSION SUR LES VRAIS PROBLÈMES DES CITOYENS, SELON L' OPPOSITION
Si le pouvoir, et à travers le président de l' APN, lui-même issu du Front de Libération nationale (FLN, parti au pouvoir) promet une Constitution révisée qui répond aux aspirations de la classe politique et de la société, d' une façon générale, l' opposition estime que le pouvoir central est en train de faire diversion sur les vrais problèmes des citoyens.
L'opposition algérienne et notamment les membres de la Coordination Nationale pour les Libertés et la Transition démocratique (CNLTD) avait estimé dans un communiqué que cette révision n' est que le signe de "l' échec total du pouvoir à réaliser le consensus national annoncé".
Le projet de révision de la Constitution est également vu par la CNLTD comme "une manœuvre pour camoufler la réalité de l' échec de la gouvernance du pouvoir".
Le président du Mouvement de la Société pour la Paix (MSP, formation islamiste), Abderrazak Makri confirme sur le site de son parti que "la révision de la Constitution n' intéresse pas le peuple algérien qui ne voit, dans sa vie, aucune différence entre une loi et une autre !". Pour lui, une révision de la Constitution ne sert pas à résoudre les problèmes intérieurs ; mais sert à améliorer l' image du régime à l' extérieur.
Pour sa part, le professeur algérien de droit international et constitutionnel le Dr Fawzi Oussedik a, dans une déclaration à Xinhua, indiqué que l' adoption de la nouvelle Constitution a trop tardé. Selon lui, "l'absence d'un système constitutionnel est un précédent unique en Algérie. Toutes les Constitutions précédentes n' ont pas mis autant de temps pour voir le jour. Cette donne a conduit l' opposition à émettre des doutes quant aux intentions du pouvoir".
Aussi, le Dr Oussedik prévoit que l' amendement prochain de la Constitution "ne sera pas profond et consensuel, mais sera seulement d' ordre technique".
LA REVISISON DE LA CONSTITUTION REPOUSSEE A CAUSE DE L' ETAT DE SANTE DU CHEF DE L' ETAT
Novembre dernier, le président algérien Abdelaziz Bouteflika a affirmé que son pays s'apprêtait "sérieusement" à réviser sa Constitution et ce sur la base des "résultats des larges consultations organisées à cet effet".
Le chef de l'Etat avait promis de réviser la Constitution avant l'élection présidentielle d'avril 2014. Mais son état de santé a fait que cette échéance a été reportée pour une date ultérieure.
Pour rappel, après sa réélection à la tête de la République algérienne, M. Bouteflika a confié à son ancien Premier ministre, Ahmed Ouyahia, devenu directeur de cabinet à la présidence de la République, la mission de diriger les consultations politiques sur la révision de la Constitution.
Pour la future Constitution, il est proposé entre autres la limitation du nombre de mandats présidentiels à deux (actuellement illimités), l'adoption d'un régime politique semi-présidentiel, la protection de l'économie nationale contre la corruption, la liberté d'exercice du culte ainsi que l'obligation que la garde à vue ne peut excéder 48 heures.