L'enquête sur les biens mal acquis par les anciens dignitaires du régime sénégalais défait en 2012, a été relancée avec la convocation mardi de l'ancien ministre Ousmane Ngom à la Division des Investigations criminelles, où a été entendu pendant six heures par les policiers.
Cette audition de Ngom, député libéral dont l'immunité parlementaire a été levée le mois dernier, ainsi que celle de deux de ses collègues députés et anciens ministres soupçonnés de malversation, est la suite logique d'un long processus enclenché depuis l'avènement du nouveau régime en avril dernier.
Elle est le signe manifeste, selon beaucoup d'observateurs, de la volonté des nouvelles autorités à poursuivre, jusqu'au bout, les procédures enclenchées dans le cadre de l'enquête sur les biens mal acquis.
Saisie d'une lettre en date du 19 décembre 2012 par le procureur spécial près la Cour de répression et d'enrichissement illicite, qui souhaite la levée de l'immunité parlementaire de ces trois députés, la majorité à l'Assemblée nationale (coalition au pouvoir) a vite constitué une commission ad hoc pour statuer sur la demande du procureur.
Ce dernier soupçonne Ngom, Sarr et Baldé d'avoir "profité de leurs fonctions gouvernementales passées pour s'enrichir de façon illicite".
Quelques jours auparavant, c'est Alioune Aïdara Sylla, un ancien député proche de l'ex-président Abdoulaye Wade, qui a été interpellé dans la nuit du 31 décembre, à l'aéroport en provenance de Dubaï.
L'ancien parlementaire, qui selon plusieurs sources a été filé, détenait sur lui, trois chèques d'un montant d'un peu plus de trois milliards appartenant à l'ancien président Wade.
Résultat, Aïdara Sylla sera inculpé et placé sous mandat de dépôt pour "association de malfaiteurs, détournement de biens publics et blanchiment d'argent".
Beaucoup de responsables de l'ancien régime sont interdit de sortie du territoire et continuent des va-et-vient soit à la Gendarmerie soit à la Direction de la police pour être entendus par les enquêteurs.
Parmi ces responsables, figurent le fils du président Wade, Karim ancien ministre d'Etat, ainsi que les anciens ministres Madické Niang (Affaires étrangères) et Samuel Sarr (Energie).
"Il ne fait aucun doute que nous resterons déterminés et nous irons jusqu'au bout dans cet exercice", avait déclaré la ministre Sénégalaise Mariama Touré devant les députés.
Le président de la République lui-même ne manque pas d'occasion pour rappeler sa détermination à faire payer ceux qui seront coupables de s'enrichir illicitement.
"Toutes les procédures engagées en matière d'audits et d'enquêtes sur des ressources et biens mal acquis seront rigoureusement menées jusqu'à leur terme. Et la justice suivra son cours", avait-il affirmé dans son message du nouvel an.
Et c'est pour instaurer une bonne gouvernance au Sénégal où le laxisme et la gabégie sous l'ancien régime avaient laissé la porte ouverte à de nombreux abus, selon les observateurs, le chef de l'Etat sénégalais, a réactivé la Cour de Répression contre l'enrichissement illicite (juridiction d'exception) tombée en désuétude peu après sa création en 1980 par le président Abdou Diouf.
Particularité de cette cour: c'est l'accusé qui doit justifier que son patrimoine a été acquis d'une manière licite.