Un calme précaire règne ce dimanche matin dans la capitale guinéenne, après trois jours d'affilée de violences enregistrées entre manifestants et forces de l'ordre, avec à la clé des morts et des blessés, dont le nombre varie selon les versions des deux camps antagonistes, à savoir le pouvoir et l'opposition.
Car, si le gouvernement guinéen à travers son porte-parole Albert Damantang Camara faisait cas vendredi, de 3 morts et d'une vingtaine de blessés, pour ce qui est du bilan des heurts qui ont éclaté depuis jeudi, ce chiffre a depuis évolué, à en croire l'opposition, qui a communiqué une liste de 6 tués à la presse, pour la seule journée du samedi.
Et ce dimanche, nos confrères de Radio France Internationale (RFI), dans leur édition du matin, ont relayé ce chiffre de morts, la veille, tout en fournissant un bilan global de 15 morts depuis jeudi dernier.
Le gouvernement n'a pour le moment ni infirmé ni confirmé le nombre de personnes ayant perdu la vie durant ces folles journées, qui agitent les quartiers de Conakry ces dernières heures, et d'inviter l'opposition à "appeler ses militants à rester chez eux, afin qu'il n'y ait pas d'amalgames entre eux et les vandales."
Cette situation de violence à caractère politique ne laisse pas certaines personnalités indifférentes. C'est le cas du grand imam de la Mosquée principale de la capitale, Elhadj Mamadou Saliou Camara qui a été le premier à monter au créneau, pour solliciter une implication de la classe politique dans la résolution de la crise qui secoue le pays.
Cette autorité religieuse qui fait partie avec l'Archevêque de Conakry du duo chargé de piloter de la commission provisoire de réconciliation nationale a invité le pouvoir et l'opposition à surmonter leur égo, pour éviter à la Guinée de se retrouver dans l'abîme.
La même préoccupation a été observée dans le discours radiodiffusé du président du Conseil économique et social (CES) Michel Kamano, qui a invité les Guinéens à la retenue.
Philippe Van Dame, représentant de l'Union Européenne (UE) en Guinée, ne cache pas non plus ses inquiétudes face à cette poussée de violence, qui paralyse une partie de la capitale.
Philippe Van Dame a ainsi dans une déclaration télévisée faite ce samedi émis le souhait que " la classe politique quel que soit son bord, condamne sans réserve et sans condition, toute violation des biens publics et privés".
Appelant à ce que soient "condamnés, tous ceux qui attisent les tensions ethniques. Car ce sont eux qui sèment la haine, alimentent et augmentent la méfiance dans ce pays", a réagi le diplomate.
Pour finir Philippe Van Dame à inviter "les responsables de tout bord pour qu'ils appellent leurs militants au calme et à la retenue. Parce que n'oublions pas, l'histoire va les prendre à témoin et ce sont eux-mêmes qui vont rendre compte devant l'histoire pour tout dérapage dans ce pays ici", a-t-il souligné.
A noter que toute cette tension découle du quiproquo qui entoure l'organisation du scrutin législatif, dont la date a été fixée pour le 30 juin prochain en Guinée.
L'opposition n'ayant pas accepté que la gestion du fichier électoral soit confiée à Waymark, un opérateur sud-africain. Ce, malgré les efforts du gouvernement, qui tente de démontrer qu'aucune fraude ne sera possible lors du prochain vote. Des experts cooptés par l'Union Européenne (UE) ayant été mis à contribution pour la sécurisation du système Waymark.
L'autre pomme de discorde entre les deux parties, est le vote des Guinéens de l'étranger. Les autorités guinéennes trouvant que les conditions actuelles ne permettraient pas à ceux qui vivent ne dehors du pays d'exercer "leur droit de vote". Ce que l'opposition trouverait "anormal".
Un collège de facilitateurs comprenant deux personnalités locales et le représentant de Ban Ki Moon en Afrique de l'ouest, Saïd Djinnit, peinent toujours à mettre un cadre de dialogue inclusif en place, pour amener les deux camps adverses à aplanir leurs divergences.