Le placement en garde à vue dimanche de l'ancien président tchadien Hissène Habré dans les locaux de la Division des investigations criminelles de Dakar, sonne comme l'épilogue d'une longue procédure judicaire qui devrait conduire au jugement prochain de l'ex-homme fort du Tchad, selon des sources judiciaires.
Cette garde à vue intervient après la visite au Tchad du 8 au 16 juin derniers du procureur général des chambres africaines extraordinaires, qui devait ensuite saisir le juge d'instruction pour les poursuites contre Habré.
Arrivée après la chute de son régime en 1990, après huit ans au pouvoir, Hissène Habré vit à Dakar dans un quasi anonymat. Il avait été renversé par l'actuel président tchadien, Idriss Deby Itno.
L'ancien président tchadien et sa famille habitent un quartier résidentiel de Dakar (Mamelles) où il a épousé une Sénégalaise.
Sa quiétude a commencé à se fissurer en 2000, lorsque ses victimes tchadiennes ont engagé contre lui une procédure pour qu'il soit jugé, l'accusant de crime contre l'humanité avec des milliers d'assassinats politiques et de l'usage systématique de la torture lorsqu'il dirigeait le Tchad de 1982 à 1990.
Avec l'appui d'organisations de défense des droits humains, les victimes obtiennent qu'il soit une première fois inculpé au Sénégal en 2000. Mais les tribunaux sénégalais ont statué qu'il ne pouvait pas y être jugé, et ses victimes ont alors déposé plainte en Belgique.
En septembre 2005, après quatre années d'enquête, un juge belge a inculpé l'ancien président tchadien et la Belgique a demandé son extradition. Mais, le Sénégal a refusé de l'extrader et a traîné des pieds pour le juger à Dakar, comme le lui demande l'Union africaine. L'arrivée au pouvoir du président Macky Sall a accéléré la procédure judiciaire.
En juillet 2012, la Cour internationale de Justice ordonne au Sénégal de poursuivre en justice "sans autre délai" ou d'extrader l'ancien dictateur du Tchad. Le Sénégal s'engage à le juger et s'entend avec l'Union africaine pour créer les "chambres africaines extraordinaires" au sein des juridictions sénégalaises.