Pressée par la communauté internationale de livrer le plus tôt possible les résultats provisoires des élections législatives, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) de la Guinée s'active dans un climat empreint de suspicion.
Et c'est d'ailleurs pour ménager les susceptibilités des uns et des autres, que l'institution chargée d'organiser les élections en Guinée a entrepris la publication des résultats des circonscriptions au fur et à mesure de leur traitement par la Commission nationale de coordination, de supervision et de totalisation des résultats des élections législatives.
C'était là une des recommandations du Facilitateur international Saïd Djinnit, vu que le retard accusé dans la diffusion des résultats nourrissait les suspicions et les rumeurs de toutes sortes dans la cité.
Certains détracteurs de la CENI, allant jusqu'à la soupçonner de velléités de manipulation des résultats issus des urnes.
Pour battre en brèche cette flopée de critiques acerbes qui vise son institution, le président de la CENI Bakary Fofana a rompu le silence le 1er octobre dernier, pour annoncer les premiers résultats provisoires du vote.
A la faveur de cette publication, qui n'avait concerné que le vote des Guinéens de l'étranger au niveau de trois ambassades, Bakary Fofana a promis que les résultats seront publiés tous les jours à partir de 20 heures, en fonction de leur disponibilité. Justifiant le retard accusé dans cette publication par le fait que le décompte des résultats se faisait de façon manuelle, à la demande des partis politiques.
A ce jour, tous les résultats provisoires des 38 circonscriptions électorales sont connus, excepté ceux de la commune de Matoto, la plus peuplée et la plus importante de Conakry.
La CENI a tenu à justifier ce retard à travers un communiqué publié jeudi sur son site internet, dans lequel l'institution relève des "difficultés auxquelles serait confrontée la commission administrative de centralisation des résultats (CACV)".
La publication de ce communiqué a été suivie de l'envoi d'une mission au sein de cette commune, où la mouvance présidentielle accuse le président de la commission administrative de centralisation des résultats d'être en accointance avec le camp adverse.
Des mesures urgentes ont été prises par la CENI, dont celles du remplacement au sein de cette commission de Babara Fofana, délégué de l'Union des forces républicaines (UFR), parti d'opposition de l'ancien Premier ministre Sidya Touré. Une présence que la mouvance a dénoncée, en arguant que Babara Fofana figure comme candidat sur la liste nationale à la représentation proportionnelle.
La CENI entend disposer des résultats de Matoto, afin de pouvoir publier la totalité des résultats provisoires.
A propos des "contentieux électoraux", qui ont conduit l'opposition à exiger l'annulation du scrutin, la semaine dernière, la communauté internationale à travers le Comité de suivi de l'accord du 3 juillet, ayant permis la tenue de ce vote, recommande à la CENI de "dresser un rapport circonstancié sur des cas d'anomalies signalées dans 8 circonscriptions et de les transmette à la Cour Suprême dans le délai le plus court possible après la proclamation des résultats provisoires".
Pendant que la communauté internationale s'échine à sauver le scrutin, la mouvance présidentielle et l'opposition s'accuse mutuellement de "fraudes".
Damantang Camara, porte-parole du gouvernement, a été le premier à réagir à la déclaration de la Communauté internationale en indiquant mercredi lors d'une conférence de presse que "de manière générale des anomalies et des manquements ont été identifiés par les partenaires dans 8 circonscriptions électorales. Ce qui laisse supposer que dans les 38 circonscriptions, on peut estimer légitimement que les choses se sont relativement et correctement passées".
L'autre clarification qu'a voulu apporter le porte-parole est que "ces anomalies concernaient la mouvance au même titre que tous les autres candidats à ce scrutin", avant de lancer "nous en sommes les premières victimes et nous attendons également exercer toutes les voies de recours pour que la normale soit dite".
Dans le camp de l'opposition, Sidya Touré, faisant office de porte-parole, a affirmé pour sa part que la "réaction de la Communauté internationale est bonne, dans la mesure où c'est suite à leur propre plainte, que ces anomalies ont été relevées".
L'opposant a ajouté que "dans toutes ces zones-là, à savoir les 8 circonscriptions citées par Saïd Djinnit et son équipe, les Procès-verbaux à la proportionnelle ont été mis de côté dans le cadre du décompte".
Ayant salué cette démarche du Comité de suivi, l'opposition campe sur sa position, qui consiste à exiger une reprise du scrutin.
Une attitude qui met en doute "l'impartialité" de la CENI, qui, dans cette posture délicate, est tenue de mener jusqu'au bout le processus de publication des résultats provisoires, qui seront soumis ensuite à l'approbation de la Cour Suprême.