La campagne lancée le 23 mars en vue de l'élection présidentielle prévue le 17 avril en Algérie est caractérisée par un mouvement de protestation menée par une opposition affaiblie et dispersée réclamant le changement.
Ce mouvement à la tête duquel se trouvent des personnalités de l'opposition et des jeunes militants appelle à des réformes tout en exhortant le président sortant Abdelaziz Bouteflika à ne pas briguer un quatrième mandat. De tels appels seront-ils écoutés par le pouvoir pour qu'il opère de véritables réformes politiques après le 17 avril ?
Dans un message à la nation adressé à la veille de la campagne électorale, M. Bouteflika s'est engagé à amender la Constitution au cas où il sera réélu. "Si le peuple algérien souverain m'accorde, de nouveau, sa confiance, je m'engage à créer les conditions politiques et institutionnelles, avec l'ensemble des acteurs représentant les différents segments de la société, permettant l'édification d'un modèle de gouvernance répondant aux attentes et espérances de notre peuple. Elle se concrétisera dans une révision de la Constitution qui sera menée dans le courant de cette année", a-t-il promis.
Des promesses qui ne semblent pas convaincantes aux yeux de l'opposition. Le mouvement "Barakat (ça suffit !)", qui est une coordination de jeunes militants, estiment que si le président Bouteflika avait l'intention d'engager des réformes et de riviser la Constitution, il aurait dû le faire avant les élections et non après.
Outre le mouvement Barakat, des dirigeants et membres des partis d'opposition, (islamistes et laïques confondus) ont organisé un meeting important à la salle Harcha, au centre-ville d'Alger. A travers cette rencontre, ils ont appelé au boycott de cette élection et protester contre la candidature du président sortant, Abdelaziz Bouteflika, pour un quatrième mandat.
Dans ce sens, six partis d'opposition se sont engagés à organiser une conférence nationale pour proposer une sortie à la situation politique "chaotique" dans laquelle se trouve le pays, selon eux.
Selon des observateurs, malgré la fréquence avec laquelle ce mouvement d'opposition active, il demeure que l'opposition n'a jusqu'à présent pas réussi à mobiliser la société civile pour qu'elle descende dans la rue en vue d'appeler au changement politique. Ainsi, le régime n'est pas inquiet au sujet de ce mouvement de protestation, mais pourrait éventuellement prendre en considération ses revendications.
Ahmed Hamdani, journaliste et analyste politique, a déclaré à Xinhua que "ce mouvement de protestation est remarquable, car il démontre que la conscience politique existe toujours en dépit des 15 années de stagnation qu'a connu le pays pendant l'ère de M. Bouteflika. Cependant, observe-t-il, ce mouvement est limité car n'étant pas en mesure de mobiliser la population derrière lui".
Pour sa part, l'ex-Premier ministre Mouloud Hamrouche (septembre 1989 -juin 1991), a déclaré lors du forum organisé dimanche dernier par le quotidien francophone Liberté que l'Algérie se dirige vers un avenir incertain. De ce fait, il a exhorté les trois hommes influents au pouvoir, à savoir le président de la République Abdelaziz Bouteflika en personne, le chef d'état-major de l'Armée, le général Ahmed Gaïd Salah, et le chef des Services de Renseignements, Mohamed Mediene (communément appelé le général Toufik), pour sortir le pays de l'impasse.
M. Hamrouche, qui est surnommé en Algérie "l'homme des réformes", en référence au premier processus démocratique qu'il a lancé dans le pays à la fin des années 1980 et au début des années 1990, a précisé que ces trois hommes sont les seuls à pouvoir mettre l'Algérie sur le processus d'une toute nouvelle ère de modernisation, notant que le pays ne peut pas continuer à être gouverné avec le même vieux système.
"La situation appelle à des décisions courageuses pour sortir de la crise et ces trois hommes sont devant une opportunité d'entrer dans l'Histoire en engageant un processus démocratique associant toutes les composantes de la société algérienne afin de construire un nouveau consensus", a-t-il préconisé. Autrement, "ces hommes, je les charge, je les rends responsables de ce qui risque de se passer", a-t-il averti.
Sur cette question précise, M. Hamdani a indiqué que le président-candidat a une réelle opportunité pour entrer dans l'Histoire par la tenue d'élections libres et équitables, et en acceptant les résultats dans le cas où il perdra.
"Dans ce cas, M. Bouteflika sera considéré comme le premier dirigeant arabe au pouvoir qui perdrait l'élection et qui accepterait les résultats dans le fair-play. Ce sera un événement sans précédent dans la région arabe, et l'Algérie enverrait un message positif au monde".
Pour la présidentielle d'avril prochain, six candidats sont entrés en lice, dont le président sortant Abdelaziz Bouteflika.
La campagne électorale a commencé le 23 mars et se poursuivra jusqu'au 13 avril, soit quatre jours avant le jour J. Les observateurs disent que la joute pour le poste de président sera jouée entre l'ancien Premier ministre Ali Benflis (août 2000- mai 2003) et le président-candidat M. Bouteflika.