Dernière mise à jour à 09h33 le 19/09
Aucun des candidats ayant occupé des fonctions de premier rang depuis les élections de 2014 n'a pu passer au second tour de l'élection présidentielle tunisienne, les urnes s'étant prononcées en faveur d'un indépendant, universitaire en droit constitutionnel, Kaïs Saïed (18,4%) et un homme d'affaires en état de détention préventive, Nabil Karoui (15,58%).
Les deux hommes seront face à face lors du second tour qui aurait lieu d'ici le 13 octobre 2019.
Pour certains analystes et observateurs locaux, les figures de proue de l'échiquier politique actuel ont été punies par les urnes et ceci conduirait à une nouvelle ère qui rompt avec des promesses partisanes.
"Kaïs Saïed a constitué, en quelques sortes une arme populaire à travers laquelle les Tunisiens ont puni la classe politique qui gouvernait depuis 2011, ce qui manifeste la perte de confiance dans cette classe politique", a confié mercredi à Xinhua l'analyste tunisien Sabri Zghidi.
Specialiste en precessus électoral et en politiques intérieures de la Tunisie, M. Zghidi indique que le fait marquant du premier tour de l'élection présidentielle anticipée n'est autre que la flagrante réticence des électeurs et leur boycott de cette échéance, puisque seulement 3 millions des 7 millions d'électeurs inscrits ont voté.
Les gens recherchent de plus en plus le changement en faveur de leur bien-être et des solutions concrètes à leur faible pouvoir d'achat, a poursuivi M. Zghidi.
En ce qui concerne le candidat détenu Nabil Karoui, peu d'analystes ont misé sur sa victoire et son exploit est le fruit de toute une stratégie à double facette : humanitaire via une association caritative mais aussi une "machine" médiatique et répertoire marketing spectaculaire, a-t-il dit.
Cependant, le fait que M. Karoui est emprisonné alors qu'il est en lice pour le poste de président de la République pourrait pousser le sommet du pouvoir en Tunisie dans une situation embarrassante que ce soit vis-à-vis de la population ou de la communauté internationale qui observe attentivement tout le processus.
"Il est possible qu'un verdict soit rendu contre Nabil, par conséquent, l'ascension du troisième lauréat du scrutin comme second candidat du deuxième tour, en l'occurrence le candidat islamiste, Abdelfattah Mourou", selon Sabri Zghidi.
L'analyste tunisien évoque une autre hypothèse en la matière selon laquelle Nabil Karoui pourrait gagner au second tour mais reste emprisonné en vertu de son dossier judiciaire.
Dans ce cas, et si jamais le poste de président est vacant pour une durée qui dépasse les 45 jours, il sera donc possible d'envisager une nouvelle élection présidentielle, toujours d'après M. Zghidi.
En effet, "en cas de victoire de Karoui au deuxième tour, nous annoncerons, certes, sa victoire et nous soumettrons la décision de sa victoire à l'Assemblée des représentants du peuple (Parlement): la question se posera donc entre le Parlement et le pouvoir judiciaire du fait que c'est de la prérogative de l'autorité législative de convoquer le président à prêter serment", a expliqué Mohamed Tlili Mansri, membre de l'ISIE, instance supérieure indépendante pour les élections.
La date du deuxième tour de la présidentielle constitue également un casse-tête pour l'ISIE puisque le scrutin pourrait coïncider avec les législatives du 6 octobre prochain, sachant que trois dates sont possibles, le 29 septembre, le 6 octobre ou encore le 13 octobre comme date limite.
Une coïncidence pourrait faire plonger la masse électorale dans la confusion et dans un certain "conflit d'intérêts" entre candidats ou listes législatives d'un côté et des candidats présidentiels, de l'autre.