Des archives de guerre nouvellement déchiffrées apportent de nouvelles preuves quant aux atrocités commises par les troupes japonaises pendant l'invasion de la Chine.
Les Archives provinciales du Jilin ont publié 89 dossiers liés à l'Unité Kempeitai de l'Armée du Kwantung (milice japonaise) et la "Banque centrale", puis de l'Etat fantoche du Mandchoukouo.
Pour les experts, ces archives sont d'une grande valeur historique : «L'administration d'Abe et les Japonais de droite ont tenté de renier l'histoire en glorifiant ou en donnant des définitions ambivalentes de l'invasion du Japon», a déclaré Jiang Lifeng, un chercheur à l'Institut des études japonaises de l'Académie chinoise des sciences sociales. «Maintenant, ils peuvent trouver des réponses à "ce qu'est une invasion" à travers ces documents.
«J'étais stupéfait quand j'ai visité les archives de Jilin il y a deux mois, et de voir un tel volume de fichiers gardés en si bon état. Ces documents exposent pleinement les atrocités du militarisme du Japon», a déclaré Jiang.
Par exemple, un rapport sur une enquête concernant "la restauration de l'ordre public par le l'Unité Kempeitai à Nanijing" par le commandant Ooki Sigeru le 28 février 1938, indique que la population de la ville était d'environ d'un million d'habitants avant décembre 1937, lorsque le massacre de Nanjing a eu lieu.
Au moins 300 000 civils chinois et des soldats non armés ont été tués par les troupes japonaises dans cette tragédie.
Mais certains Japonais de droite ont essayé de refuter le massacre en prétendant que le nombre de la population à Nanjing avant l'occupation japonaise ne dépassait pas les 300 000, a noté Jiang.
«Les derniers chiffres de la population fournis par le commandant de la Kwantung sont accablants et pourront faire taire ceux qui affirmaient le contraire».
Un autre document contient une édition quotidienne des nouvelles d'Osaka du 23 décembre 1937, expliquant comment les troupes japonaises ont tué 85 000 personnes en seulement trois jours à Nanjing.
«Les corps s'étendaient sur 1000 à 1500 mètres jusqu'au cours inférieur du fleuve Yangtsé», selon le rapport.
Vingt-cinq fichiers venant d'être dévoilés se rapportent aux "femmes de réconfort" des esclaves sexuelles pour les soldats japonais pendant la guerre.
Un des dossiers allant de novembre 1944 à mars 1945, annonce qu'une somme de 532 000 de yens (5195 $ au taux de change actuel) a été transférée par la "Banque centrale" du Mandchoukouo pour le suivi du projet des femmes de réconfort, sur un compte intitulé "dépenses publiques à des fins militaires".
Su Zhiliang, directeur du programme "les femmes de réconfort" au Centre de recherche de l'Université normale de Shanghai, a déclaré : «C'est un fait étonnant. C'était une grande somme d' argent à l'époque».
«Cela prouve encore une fois que le système de l'esclavage sexuel a été appliquée officiellement, plutôt que d'une opération commerciale privée, comme l'ont prétendu certains politiciens japonais».
Les archives montrent en détail comment ces lieux ont été exploités par l'armée japonaise dans le centre et le nord du pays et également en Indonésie.
Peu importe où se trouvaient les troupes japonaises,vous aviez un "centre de délassement", a fait remarquer le responsable.
Suggérant également que de nombreuses femmes asiatiques, notamment Chinoises et Coréennes, ont été victimes d'abus sexuels par l'armée japonaise.
Par exemple, une note militaire japonaise stipule que le ratio de "femmes de réconfort" pour les soldats japonais était de 1:178 à Nanjing. A Zhenjiang, une ville se trouvant proche de la capitale du Jiangsu, il est précisé que 8929 soldats japonais ont visité "des centres de délassement" dans une période de 10 jours.
Pour Zhao Yujie, chef d'équipe d'un projet de recherche sur le massacre de Nanjing au niveau des archives de Jilin, ces statistiques montrent que le système "femmes de réconfort" a bien été autorisé et mis en place systématiquement par l'armée japonaise.
Yin Huai, le conservateur des Archives provinciales du Jilin, a indiqué qu'actuellement le site comptait près de 100 000 documents en temps de guerre, et que 90% d'entre eux sont écrits en japonais.
Les archives contiennent également des enregistrements audio des discours des dirigeants, y compris du Premier ministre Hideki Tojo, du général Yoshijiro Umezu et des hauts fonctionnaires du Mandchoukouo.
Zhao Sujuan, 81 ans, un archiviste de Jilin à la retraite, a déclaré que lors de la capitulation du Japon en 1945, les troupes japonaises avaient dû enterrer à la hâte des manuscrits avant de battre en retraite. Dans les années 1950, les documents ont été découverts sur un chantier de construction à Changchun.
Depuis 2012,les Archives provinciales du Jilin ont organisé des équipes de recherche pour déchiffrer et traduire l'ensemble de ces écrits.
«Plus les recherches dans les archives japonaises continuent et plus les preuves des atrocités de guerre japonais infligées à l'Asie vont émerger», a souligné Su Zhiliang.