Un haut responsable du Ministère de la Justice a annoncé que la Chine va renforcer les échanges de renseignements financiers avec les États-Unis et l'Australie pour rechercher les avoirs illicites des officiels chinois corrompus et lutter contre le blanchiment d'argent.
Zhang Xiaoming, Directeur général adjoint du Département de l'assistance juridique et des affaires étrangères du ministère, a ainsi précisé que la Banque populaire de Chine est en pourparlers avec le Réseau de lutte contre les crimes financier américain, un bureau relevant du Département du Trésor des États-Unis qui surveille les transactions financières, pour lutter contre la criminalité. Les préparatifs sont en cours pour un accord bilatéral visant à cibler les actifs que les suspects chinois détiennent à l'étranger, a déclaré M. Zhang dans une interview exclusive.
La banque centrale va également signer un accord similaire avec l'Unité de renseignement financier australienne afin de surveiller les flux suspects concernant ce genre d'actifs, a-t-il ajouté.
« Après la conclusion des accords, la Chine partagera des renseignements avec les États-Unis et l'Australie, et offrira également des informations à leurs organismes d'application de la loi afin de mener d'autres enquêtes », a déclaré M. Zhang.
« Une fois que les agents d'application de la loi aux États-Unis et en Australie auront identifié des fonds illégaux, ils engageront immédiatement des procédures judiciaires pour geler et confisquer les produits de la criminalité dans leur pays ».
Selon le Ministère de la sécurité publique, plus de la moitié des responsables corrompus chinois connus ont transféré leurs avoirs illicites à l'étranger et se sont enfuis aux États-Unis, au Canada et en Australie pour éviter d'être sanctionnés.
Entre 1990 et 2011, selon les chiffres de l'Académie chinoise des sciences sociales, plus de 18 000 fonctionnaires corrompus ont fui à l'étranger, y transférant des fonds acquis illégalement se montant à pas moins de 800 milliards de Yuans (128,5 milliards de Dollars US).
En juillet, le Ministère de la sécurité publique a lancé une campagne de répression spéciale baptisée « Chasse au renard 2014 » contre les fugitifs économiques qui ont fui à l'étranger.
A la date du 4 décembre, la police chinoise avait ramené 428 fugitifs pour crimes économiques présumés de 60 pays et régions, mais elle n'avait saisi qu'une partie des fonds illégaux que ceux-ci avaient transférés à l'étranger.
« En raison d'obstacles juridiques et de procédures juridiques différentes, nous sommes confrontés à des défis pratiques dans la saisie et le rapatriement de davantage d'actifs », a déclaré Liu Dong, Directeur adjoint du Département d'enquête sur les crimes économiques du ministère.
M. Zhang, du Ministère de la justice, a déclaré que dans de nombreux cas, les autorités sont incapables de fournir aux organismes judiciaires des États-Unis ou d'Australie tous les documents juridiques nécessaires, y compris les ordonnances d'interdiction d'actifs qui doivent être émises par les tribunaux chinois pour demander une assistance pour geler et saisir les fonds illégaux.
« Bien que le Bureau fédéral d'enquête ou la police australienne aient retrouvé la trace d'actifs et recueilli suffisamment de preuves pour les identifier en tant que gains acquis illégalement, ils ne peuvent pas prendre de mesures immédiates pour les geler et les confisquer en raison de l'absence d'ordonnances d'interdiction d'actifs de tribunaux chinois ».
Selon le droit pénal chinois, les tribunaux ne peuvent pas émettre de verdicts sur des suspects et leurs gains illicites si ceux-ci n'assistent pas aux audiences.
Depuis novembre 2012, quand le nouveau gouvernement est entré en fonctions, le président Xi Jinping mène une campagne de nettoyage visant à combattre la corruption et exigé des autorités qu'elles renforcent la coopération judiciaire avec d'autres pays pour traquer les fugitifs et récupérer leurs biens obtenus illégalement.
Allant dans ce sens, le ministère des Affaires étrangères a ainsi annoncé que la Chine et le Canada vont également signer un accord de partage des actifs récupérés que les fugitifs transfèrent illégalement vers des destinations canadiennes.
Après la conclusion de l'accord, celui-ci fournira une base juridique au Canada pour partager le produit des biens confisqués avec la Chine, une fois que les fonds seront identifiés comme appartenant à une organisation criminelle ou pénale, a précisé Guy Saint-Jacques, l'ambassadeur du Canada en Chine.
Selon le Ministère français de la Justice, la France s'est également engagée à aider la Chine à localiser et geler les actifs transférés de fugitifs, comme les biens immobiliers, l'épargne bancaire et autres investissements, tout en communiquant avec les organes judiciaires chinois sur le partage des biens saisis.
« Pour chaque cas, nous négocierons avec nos homologues chinois pour partager les fonds saisis dans des proportions appropriées », a déclaré Robert Gelli, Directeur du département des affaires pénales du Ministère français de la Justice.
La priorité pour la Chine est de « former des agents professionnels de l'application de la loi, qui soient familiers avec les lois des pays occidentaux et capables de rédiger des documents juridiques de haute qualité, ainsi ceux qui parlent l'anglais pour communiquer avec leurs homologues afin d'obtenir les détails des affaires », a déclaré Huang Feng, professeur de droit à l'Université normale de Beijing.
La Chine devrait également accélérer sa législation, telle que celle concernant l'assistance judiciaire nationale, et réviser les lois pour suivre le rapatriement des fugitifs partis à l'étranger et le recouvrement de leurs biens, a-t-il ajouté.