La Chine est largement représentée dans le monde entier par sa cuisine qui est adaptée aux goûts de ses pays hôtes. Tour d'horizon des dernières tendances.
ANDREW ANCHETA, membre de la rédaction
« On mange ça dans votre pays ? »
Tout étranger dînant en compagnie de Chinois doit s'attendre à une batterie de questions de ce genre de la part de ses compagnons. Vous mangez des nouilles dans votre pays ? Du riz ? Où avez-vous appris à vous servir de baguettes ?
La plupart des Chinois sont surpris d'apprendre que leur culture s'est depuis longtemps infiltrée dans les cuisines occidentales. La cuisine chinoise, apportée dans les valises de l'immigration, s'est largement répandue dans les villes du Royaume-Uni et des États-Unis, et par conséquent tout le monde y apprend dès l'enfance l'art du maniement des baguettes. Depuis les nouilles jusqu'au riz, en passant par les épices et les sauces, la cuisine chinoise s'est diffusée et adaptée aux différents pays où arrivaient des Chinois. On peut probablement dire sans exagérer que le plus important produit d'exportation du pays, bien plus influent que les vêtements ou les produits manufacturés, c'est sa cuisine.
Lorsque Christophe Colomb naviguait vers l'Ouest, il espérait trouver de nouvelles routes pour le commerce des épices avec l'Orient. En d'autres termes, c'est grâce à son goût pour les saveurs asiatiques que l'Europe a découvert l'Amérique.
Autre exemple. La guerre d'indépendance des États-Unis a commencé lorsque trois cents caisses de thé, donc d'origine chinoise, ont été jetées à la mer dans le port de Boston. Le thé, autrefois une boisson exotique, est depuis longtemps un citoyen naturalisé des deux côtés de l'Atlantique, il demeure l'un des rituels les plus appréciés de la haute culture britannique.
La Route des nouilles
Le premier héritage culinaire chinois est bien sûr la nouille, le grand classique des cuisines asiatique, italienne et étudiante. Les Chinois ont presque autant de mots pour les nouilles que les Esquimos pour la neige. On nomme différemment les nouilles faites de farine de blé (mian), d'amidon de fèves (fen) ou de farine de riz (xian) ; et puis les nouilles peuvent être étirées (la), taillées (qie), pressées mécaniquement (jiya), pelées (xiao) ou pétries (rou). Un bol de nouilles froides épicées ne coûte que quelques yuans si vous l'achetez auprès d'un cuisinier à roulettes dans les rues de Beijing, mais vous le payerez quelques centaines de yuans dans l'un des meilleurs restaurants de la ville.
Nombreux sont ceux qui mettent en doute l'affirmation selon laquelle toutes les nouilles conduisent en Chine. Évidemment, une tradition culinaire aussi complexe ne peut pas avoir été mitonnée (pardon pour le jeu de mots) en un lieu unique. Un mythe répandu voudrait que ce fût Marco Polo qui aurait introduit les nouilles et autres pâtes en Italie. Dans ses fameux récits de voyage il racontait que les Chinois « ne vivent principalement que de riz, de sorgho et de millet..., [le blé] n'étant consommé que sous la forme de vermicelles ou de pâtes ». Cependant la thèse selon laquelle Marco Polo aurait rapporté les pâtes avec lui est disputée par les historiens. Les gourmets italiens insistent avec indignation que les pâtes ont été inventées séparément dans leur pays. Si vous voulez voir un Italien bouillir (encore un jeu de mots), suggérez simplement en sa présence que le plat national italien est une copie des nouilles chinoises.
Que les nouilles européennes soient ou non venues de Chine, on n'a en revanche aucun doute sur le lieu de leur première invention. En 2002, des archéologues ont exhumé près de Lajia les nouilles les plus anciennes du monde : un faisceau de millet et de sorgho conservés près d'un bol en terre cuite. D'après la datation, ces nouilles étirées à la main, sont vieilles d'environ 4 000 ans. D'autre part, la première mention écrite parlant de nouilles date de la période des Hans de l'Est (25-220), et elles sont devenues une nourriture courante dès le IIe siècle de notre ère.
Jen Lin-Liu est une journaliste étrangère et critique gastronomique qui a habité pendant plus de 10 ans à Beijing. Son amour pour la nourriture chinoise remonte plus loin que pour la plupart des expats : après avoir appris la cuisine chinoise et travaillé pour divers vendeurs de nouilles, aussi bien dans la rue que dans des restaurants élégants, elle a fini par ouvrir son propre restaurant haut de gamme à Beijing.
Voyageant en Italie, Ms. Lin-Liu n'a pu que remarquer que certains savoirs-faire italiens ressemblaient à ceux qui ont cours en Chine. C'est ce qui l'a décidée à faire un voyage sur la Route de la Soie pour suivre le cheminement des pâtes de Beijing à Rome. Dans son récit de voyage, Sur la Route des nouilles, elle nous confie ses réflexions alors qu'elle suit l'histoire des spaghetti à travers l'Asie centrale et dans le Moyen-Orient. Elle partage également avec nous quelques-unes des recettes à haute teneur en glucide qu'elle a collectées en Asie centrale, au Moyen-Orient et en Europe.