Dernière mise à jour à 09h06 le 14/04
Fragonard, Rubens, de Vinci, Van Gogh, Titien... des noms de génies de la peinture qui font rêver. Louis Vuitton... un nom qui fait tout autant rêver les fashionistas du monde entier. Aujourd'hui, grâce à l'artiste et créateur américain Jeff Koons, tous ces noms prestigieux sont réunis dans une toute nouvelle gamme de sacs qui ont été présentés mardi au Louvre lors d'une soirée privée organisée par Bernard Arnault, le patron du groupe LVMH, géant du luxe mondial. Jeff Koons est le quatrième artiste que la marque a invité à travailler avec sa toile au monogramme distinctif, conçue pour la première fois en 1896 par George Vuitton pour honorer son défunt père. En plus de décorer les sacs avec cinq œuvres majeures, les sacs incluent également de nouveaux éléments décoratifs, notamment les initiales entrelacées de l'artiste.
« J'ai déjà travaillé avec LVMH lorsque j'ai travaillé sur un projet pour Dom Pérignon [en 2003], et c'était une expérience fantastique », a dit Jeff Koons de son appartement à New York. « Ce fut un plaisir de travailler avec leurs installations. J'ai aimé travailler avec eux sur le sens du matérialisme, sur la qualité des matériaux et sur les limites de leurs limites ». La collection est colorée, audacieuse et plutôt accessible -même si les prix mettent ces produits bien au-delà des capacités de la plupart des gens ordinaires (plus de 2 000 Euros en moyenne) . Mais cette ligne ne sera sans doute pas sans détracteurs. Jeff Koons, qui a souvent divisé les critiques avec son mélange particulier d'appropriation artistique et d'idéalisme populaire, sans parler de son habitude de transformer des marchandises ordinaires et des articles kitsch en œuvres d'art monumentales, a abordé cette collaboration avec son audace habituelle. Peu d'artistes oseraient invoquer le nom d'un ancien maître dans leur propre travail, et beaucoup moins encore oser marquer leurs initiales à côté d'eux.
Pour Jeff Koons, cependant, ces œuvres font tous partie d'une « célébration » plus générale dans laquelle il voit son rôle éclairer l'histoire de l'art. « Je les vois en tant que partie du monde et je suis impatient de les voir descendre dans la rue ou de les voir dans un restaurant, parce que je pense que ce sont des moments d'humanisme », a-t-il poursuivi. « Les artistes peuvent transcender et atteindre un niveau supérieur, mais nous le faisons tous les jours dans nos propres vies », a-t-il souligné. « Et j'espère que les sacs sont un symbole de l'humanisme, et de la joie de la société et de la vie communautaire, et de la participation à cette communauté. Je voulais donner un coup de frais au monogramme, c'est pourquoi j'ai pensé que mettre un JK avec le LV était une idée rafraîchissante ».
Et pour les clients qui aiment que leur luxe ait des outils supplémentaires d'amélioration personnelle, ils ont aussi un côté éducatif : l'intérieur de chaque sac est imprimé avec une brève biographie et un croquis de l'artiste. Est-ce à dire pour autant que ces sacs à main doivent être accrochés sur un mur ou plutôt utilisés pour recevoir de vieux billets d'autobus, des flacons de mascara et des bouquins cornés, comme n'importe quel sac ? « Pour moi, ce qui est merveilleux pour l'art est l'expérience émotionnelle », répond-il au sujet du statut de ses sacs. « Je suis curieux d'une réponse intellectuelle et physique à quelque chose, et si quelqu'un veut se l'approprier, alors c'est fantastique ». Mais, si opaque que puisse sembler être la conversation de Jeff Koons, ses sacs ont une qualité véritablement agréable et indéniable : le Fragonard, avec son bébé à joues roses caressant un chien, prend une nouvelle nuance provocatrice lorsqu'il est placé sur un sac à dos ; les coups de pinceau éclatants du Rubens sont électriques. Même l'énigmatique Joconde semble un peu plus libérée de sa vitrine pare-balles au Louvre.
Bref, ces sacs sont joyeux et, comme tant de travaux de Jeff Koons, possèdent un charme irrésistible, même s'ils peuvent parfois rappeler les sacs à bandoulière imprimés que l'on peut acheter dans un magasin de musée. « Je crois que nous avons créé quelque chose qui célèbre les matériaux et la limite des choses, élevant vraiment la barre vers un niveau jamais atteint en termes de ce que vous pouvez faire avec l'impression sur toile et cuir ». Pour Jeff Koons, quand on parle de luxe, il ne s'agit pas de valeur. Il s'agit d'idées et de valeur pour les gens. « Il s'agit d'un véritable sac à main où vous pouvez tout aussi bien mettre vos affaires de gymnastique », a-t-il conclu.