Des travailleuses rurales dans les champs du comté de Mengcheng, dans la Province de l'Anhui, qui utilise le système de transfert des droits fonciers. [Photo Hu Weiguo / pour le China Daily] |
Les gens de la ville regardent à peine les travailleurs migrants comme Li Jinlong, un soudeur électrique, qui vit avec sa femme dans un abri de fortune près des usines ou des chantiers de construction.
Li a passé ses 20 dernières années à mener une vie humble dans les villes chinoises. Il a rarement le temps de retourner à sa maison de campagne, une résidence privée de deux étages que lui envieraient les citadins qui veulent échapper à la vie de la ville.
Li n'a jamais rêvé d'acheter un appartement en ville, car les prix de l'immobilier, même dans les villes chinoises de deuxième rang, montent en flèche.
Ce qui rend l'ancien agriculteur de la province de l'Anhui vraiment inquiet que sa maison de campagne et les terrains ont été laissés sans surveillance, ce qui n'a donné aucune culture ni aucune recette toutes ces années.
Il y a plus de 200 millions de paysans comme Li peinant dans les villes sans un logement décent. Leurs terres et maisons dans les zones rurales n'ont jamais été leur propriété, car ils ne peuvent ni les échanger contre de l'argent ni les hypothéquer pour des prêts bancaires aux termes des lois chinoises sur les terres.
Bien que le marché de l'immobilier urbain de la Chine ait prospéré depuis les années 1990, et qu'il ait été un moteur important de la croissance économique, les règles de propriété collective des terres en milieu rural n'ont pas changé, ce qui a entravé le développement rural.
La raison en réside dans le fait que les agriculteurs qui ont droit à des droits d'utilisation de la propriété n'ont pas de certificats de propriété pour le commerce de ces droits.
Afin de profiter de la vitalité du secteur rural, les dirigeants chinois ont décidé de s'attaquer à la question du foncier rural en mettant en avant un certain nombre de réformes lors de la troisième session plénière du 18e Comité Central du Parti Communiste Chinois (PCC), qui s'est tenu en novembre dernier. Un plan directeur de réforme approuvé lors de la session s'est engagé à donner aux 650 millions d'habitants des régions rurales du pays plus de droits de propriété.
Li estime avoir de la chance de voir que sa ville natale a été classée comme l'un des 20 comtés de la province de l'Anhui destinés à piloter un nouveau cycle de réforme du transfert de la propriété rurale.
Le programme pilote a été annoncé par le gouvernement provincial le dernier jour de la session plénière. Le plan de réforme est conçu pour piloter les hypothèques et le transfert des fermes d'agriculteurs, ainsi que la vente, la location et la démutualisation de la construction des terres rurales.
L'Anhui est la première province chinoise à annoncer qu'elle lancera la nouvelle réforme de l'espace rural, même si les détails de la réforme n'ont cependant n'ont pas encore été annoncés.
Un responsable du bureau provincial des ressources en terres, qui souhaité rester anonyme, a déclaré que la réforme devrait faciliter le goulot d'étranglement du financement pour encourager l'agriculture à grande échelle et dynamiser l'économie rurale.
Il a dit que la clé de la réforme réside dans la transformation des droits d'utilisation des terres de la propriété rurale de leur état actuel de ressources en terres collectives en propriété privée.
Li, le travailleur migrant, espère qu'une fois que la transaction sera autorisée, ses biens pourront être vendus à un bon prix, car il songe déjà à sa retraite.
Il veut vendre la maison et aller vivre avec son fils, qui travaille actuellement dans la capitale provinciale de la province de l'Anhui, Hefei.
Lu Pengfei, président de la Pengfei coopérative Modern Farrming dans la province de l'Anhui, a dit qu'il a déjà acheté 5000 mu (333 hectares) de terres, qui ont été transférés par des agriculteurs individuels par le biais des réformes antérieures des terres rurales. Cependant, il ne peut pas hypothéquer la terre pour demander des prêts bancaires pour des activités agricoles à grande échelle.
« Si mes droits de gestion des contrats pour la terre pouvaient être reconnus et admissibles pour échange ou hypothèque, je n'aurais pas de soucis pour intensifier mes opérations », dit-il.
Les leçons des réformes foncières rurales précédentes
L'Anhui a longtemps été un banc d'essai pour la réforme agraire rurale en Chine. Le village de Xiaogang dans l'Anhui est devenu célèbre en 1978 après que 18 de ses agriculteurs aient passé un pacte secret pour résister au système agricole égalitaire du pays. Les termes du pacte disaient que, après que les agriculteurs auraient remis un certain pourcentage de leurs produits au gouvernement, ils pourraient garder le reste de la récolte de leurs terres sous contrat pour eux-mêmes.
Leurs pratiques ont ensuite été reconnues et suivies dans d'autres endroits pour encourager l'enthousiasme des agriculteurs dans l'agriculture productive.
En 1999, une réforme a été approuvée par les autorités des ressources foncières du pays et mise en oeuvre dans la ville de Wuhu, dans l'Anhui, permettant des transferts de terres rurales à Longshan, afin que les terres puissent être utilisées pour le développement industriel. Des usines ont été construites, créant des emplois pour les agriculteurs locaux, et un canton a pris forme.
La réforme agraire a transformé ce village pauvre en une ville moderne. Les agriculteurs vivent aujourd'hui dans des immeubles avec l'eau courante et un approvisionnement en combustible de cuisson. Leur accès à des banques, des écoles, des hôpitaux et des supermarchés est comparable à celui des habitants de la ville.
La réforme pilotée à Wuhu a été étendue à l'échelle nationale et a accéléré la construction de cantons ruraux en Chine.
Cependant, Liu Qi, Secrétaire général adjoint du Gouvernement provincial de l'Anhui, qui est également expert émérite en agriculture, a déclaré le mode de réforme agraire à Wuhu comporte une campagne de transfert foncier rural initiée par les autorités de base, dans laquelle les agriculteurs ne peuvent toujours pas gérer leurs biens selon leur libre volonté.
En vertu de la réforme de Wuhu, les autorités du village ou du canton ont encouragé les agriculteurs à abandonner leurs foyers en échange d'une vie moderne avec le logement, l'assurance sociale et autres subventions égales à celles des citadins.
Au lieu de les mettre en vente sur le marché libre, les fermes individuelles des agriculteurs ont été collectivement achetés par les autorités pour le développement de l'immobilier commercial.
M. Liu a dit que dans ce mode, les autorités locales, plutôt que les agriculteurs, ont été les principaux bénéficiaires des bénéfices de la vente des droits d'utilisation des terres. Les intérêts individuels des agriculteurs n'ont pas été pleinement pris en compte.
Wang Weiguo, recteur de l'École de droit civil et commercial de l'Université chinoise des sciences politiques, a déclaré que dans le cadre de la prochaine réforme de l'espace rural, les agriculteurs devraient être autorisés à décider de vendre ou de conserver leurs propres propriétés.
M. Wang a suggéré que les agriculteurs puissent avoir le droit de vendre des droits de gestion équivalent à un certain nombre d'années pour leurs fermes par le biais d'une plate-forme de transaction ouverte. Après la fin de la période, ils pourraient reprendre leurs biens.
M. Wang a dit que les réformes agraires antérieures de la Chine ont été menées au niveau local et dans des régions pilotes. La future réforme exigera du Gouvernement Central de mener à bien la conception de haut niveau pour réglementer l'utilisation des terres rurales et garantir les droits de propriété des agriculteurs.
« Le gouvernement doit modifier les lois et règlements afin de faciliter l'évaluation des biens, les transactions, les hypothèques et l'enregistrement des droits de propriété dans le secteur rural pour assurer la mise en œuvre des politiques de l'Etat sur la réforme foncière rurale », a-t-il dit.