Actuellement, les États-Unis semblent prêts à déclencher une autre guerre en Irak, Il n'est pas question, comme à l'époque de Bush fils, d'envoyer des troupes au sol dans ce pays, mais plutôt d'adopter une approche semblable à celle qui fut utilisée contre les forces de Kadhafi, à savoir des frappes chirurgicales. Peu importe leur efficacité, tout au moins pourront-elles permettre de soulager temporairement la pression qui pèse sur le régime de Bagdad du fait des attaques de l'« Etat islamique en Irak et au Levant » (EIIL).
Cependant, on peut se demander si les Américains ont ou non sérieusement pensé à ceci : pourquoi cette organisation terroriste qu'on appelle l'« Etat islamique en Irak et au Levant » a-t-elle pu devenir aussi importante ? A l'origine, peu de monde savait ce que c'était. Mais profitant de l'aggravation de la guerre en Syrie, elle a commencé à gagner du terrain, non seulement en Irak, où elle a créé ses propres bases, mais également en Syrie, où elle a réussi à conquérir un grand nombre d'endroits. Certains étrangers, égarés par son idéologie extrémiste, se trouvent même aujourd'hui dans ses rangs, dont un nombre considérable de personnes originaires de pays occidentaux. Les États-Unis et certains pays occidentaux ont activement encouragé le renversement du régime légal syrien, aboutissant à une situation inextricable dans ce pays, mais offrant par la même occasion un terrain fertile au développement des extrémistes islamiques en Syrie.
Aujourd'hui, les États-Unis et certains pays occidentaux se réveillent tout à coup et se rendent compte que ces organisations terroristes appuyées par Al-Qaida au Moyen-Orient constituent la plus grande menace pour leurs intérêts. Mais il est hélas trop tard, parce que ces organisations ont désormais déployé leurs ailes et sont en mesure de rivaliser avec eux.
300 conseillers militaires américains sont arrivés à Bagdad, et les activités de reconnaissance de l'armée américaine ont commencé. Les États-Unis espèrent même pouvoir discuter avec Téhéran pour lutter contre les extrémistes islamistes armés. Bien sûr qu'il le faut, bien sûr que c'est nécessaire, mais alors que la guerre ravage encore la Syrie, est-ce que cela permettra de résoudre le problème ?
Car, certes, on peut frapper ces terroristes, mais ils peuvent aussi s'enfuir. Leur marge de manœuvre est très grande : s'ils ne peuvent pas rester dans le nord de l'Irak, rien ne les empêche de s'échapper vers la Syrie. Par ailleurs, en Syrie, leurs frères du Front al-Nosra peuvent les aider. Quand on dit que cette organisation est comme les Talibans de l'Irak, ce n'est en rien une exagération. Les détruire ne sera pas facile, et il est aisé de prévoir que ce sera forcément une longue guerre d'usure.
Alors, peut-on se contenter de déplacer le problème, tel un pion aux échecs ? Bien sûr que non. Pour trouver une véritable solution, il faut d'abord éteindre les flammes de la guerre en Syrie. Pour ce faire, l'Occident doit cesser d'utiliser à tout bout de champ « Assad doit démissionner » comme prétexte, et chercher une coopération pragmatique avec le régime syrien, pour essayer de trouver une voie nationale de réconciliation politique et religieuse en Syrie. A cette fin, il faut d'abord promouvoir activement la réconciliation entre le gouvernement syrien et le groupe d'opposition syrienne de la Coalition Nationale Syrienne. En outre, il faudrait, comme le Secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a appelé à le faire, mettre en œuvre un embargo sur les armes vers la Syrie. C'est seulement ainsi que nous pourrons vraiment parvenir à un cessez-le feu en Syrie et permettre aux réfugiés de revenir, pour reconstruire le pays. Mais si par malheur on n'y arrivait pas, non seulement le problème syrien ne serait pas résolu, mais l'Irak serait également entraîné à son tour dans une guerre sans fin.
Sur la question du règlement du conflit en Irak, l'Iran peut sans doute jouer un rôle positif et efficace. Actuellement, les relations entre l'Occident et l'Iran sont marquées par une tendance à l'apaisement. Si les négociations sur le nucléaire iranien se déroulent sans problème et que des résultats notables sont obtenus, alors l'Occident sera en mesure de coopérer pleinement avec ce pays. Cela aura, à n'en pas douter, un impact favorable sur une possible résolution de la crise en Syrie et en Irak, et sur la stabilisation de la situation au Moyen-Orient. C'est une opportunité rare que les États-Unis et les pays occidentaux ne doivent pas laisser passer.
De nombreux chercheurs occidentaux considèrent que l'Iran peut jouer un « rôle incontournable » pour résoudre la situation de crise en Irak et en Syrie. Mais en fait, pourquoi Bachar al-Assad ne tient-il pas le même rôle ? Dans la lutte contre le terrorisme en Syrie, l'armée syrienne a toujours été aux premières lignes du combat. Si Bachar al-Assad n'avait pas montré autant de persistance, peut-être que le pouvoir de l'Etat syrien serait déjà depuis longtemps tombé entre les mains des terroristes.
Aujourd'hui, les États-Unis doivent comprendre ceci : ce qu'ils doivent faire, c'est se battre contre le terrorisme. Et ne pas s'immiscer dans les affaires intérieures d'autres pays partout dans le monde, au risque de devenir des « empêcheurs de tourner en rond », impopulaires partout.
En ce qui concerne la lutte contre le terrorisme au Moyen-Orient, l'Irak et la Syrie, en fait, devraient être considérés comme deux pièces du même jeu d'échecs contre le terrorisme, faute de quoi il sera bien difficile de parvenir aux résultats désirés.
Auteur : Ren Yaqiu
Date de : 23 juin 2014