Suite au placement en garde à vue de l'ancien président français Nicolas Sarkozy mardi matin dans le cadre d'une enquête pour trafic d'influence et violation du secret de l'instruction, la presse française revient sur les événements qui ont mené à cette situation inédite pour un ex-chef de l'Etat sous la cinquième République.
"Tout commence le 5 mars, lorsque l'Express dévoile que les domiciles et bureaux de Me Thierry Herzog, avocat de Nicolas Sarkozy, et du haut magistrat à la Cour de cassation Gilbert Azibert ont été perquisitionnés la veille, dans le cadre d'une information judiciaire ouverte le 26 février pour trafic d'influence et violation du secret de l'instruction, en lien avec les agendas de l'ex-président saisis dans l'affaire Bettencourt", rappelle le journal Les Echos.
"Deux jours plus tard, le 7 mars, c'est au tour du journal Le Monde de faire de nouvelles révélations. Le quotidien assure que Nicolas Sarkozy aurait été placé sur écoutes téléphoniques en 2013 par des juges enquêtant sur un éventuel soutien financier de la Libye pour sa campagne présidentielle de 2007", poursuit le quotidien économique.
Les "interceptions téléphoniques opérées en janvier et février 2014, ont révélé des faits troublants : l'ex-président et son avocat semblaient ainsi très renseignés sur l'avancée des travaux de la Cour de cassation, alors saisie de la procédure Bettencourt", indique pour sa part le journal Le Monde.
"Par ailleurs, il apparaît aussi que les deux hommes se savent placés sur écoute, au point d'acheter en toute discrétion, sous un nom d'emprunt, des téléphones portables. D'où l'incrimination de violation du secret de l'instruction", ajoute le quotidien.
Les deux magistrats placés en garde à vue lundi, Gilbert Azibert, premier avocat général près la Cour de cassation, et son collègue Patrick Sassoust, avocat général à la chambre criminelle de la haute juridiction, sont alors suspectés "d'avoir fait bénéficier M. Sarkozy, via son avocat, d'informations confidentielles", souligne Le Monde.
D'après le journal, Nicolas Sarkozy "apparaît comme le 'donneur d'ordres', bénéficiaire final des informations obtenues, son avocat jouant davantage les intermédiaires".
Ces informations révèlent notamment "que le magistrat Gilbert Azibert serait bien intervenu auprès de trois conseillers de la Cour de cassation chargés d'examiner la validité des actes d'instruction dans l'affaire Bettencourt" et que Thierry Herzog aurait qualifié de "bâtards de juges" les magistrats qui ont mis Nicolas Sarkozy en examen dans l'affaire Bettencourt, selon Les Echos.
Le placement en garde à vue de l'ancien président n'a pas manqué de susciter des réactions au sein de la classe politique.
Interrogé mardi matin sur I-Télé, le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, a déclaré que "la justice enquête, qu'elle elle doit aller jusqu'au bout" et que "Nicolas Sarkozy est un justiciable comme les autres".
La déléguée générale adjointe de l'UMP (parti de Nicolas Sarkozy), Valérie Debord, a dénoncé pour sa part sur BFM TV un "acharnement" contre l'ancien président de la République, une "forme d'instrumentalisation de la justice contre un homme, contre le retour d'un homme".
"A chaque fois qu'il évoque son éventuel retour aux affaires, étonnamment, il est inquiété par une affaire de justice (...) Ça commence à devenir lassant pour les Français", a-t-elle ajouté.
"Il reviendra aux deux juges d'instruction de décider du sort judiciaire de l'ancien chef de l'Etat. La garde à vue peut durer 48 heures au maximum. A l'issue de celle-ci, M. Sarkozy pourrait être relâché ou conduit devant les magistrates", prévient Le Monde.
"Trois possibilités s'offriront alors à elles : interroger M. Sarkozy comme témoin simple, ce qui signifierait qu'aucune charge ne pèse sur lui ; lui accorder le statut hybride de témoin assisté ; le mettre en examen, si elles estiment avoir réuni contre lui des 'indices graves et concordants' d'avoir commis une infraction", conclut le journal.