Le président américain Barack Obama a annoncé mercredi une décision historique qui marque le changement le plus radical dans les relations américano-cubaines depuis cinq décennies en présentant son projet de normaliser les relations avec Cuba, une manoeuvre très controversée aux Etats-Unis.
"Nous allons mettre fin à une approche dépassée qui a échoué pendant des décennies à servir nos intérêts et nous allons commencer à normaliser les relations entre nos deux pays", a déclaré M. Obama dans un discours télévisé.
Les Etats-Unis ont rompu leurs relations avec Cuba en 1961, peu de temps après que le dirigeant cubain Fidel Castro a lancé une révolution qui a renversé un gouvernement proche des Etats-Unis. L'hostilité entre les deux pays depuis le gel de leurs relations a été exacerbée à plusieurs reprises.
La décision du président américain a suscité une vive émotion aux Etats-Unis : la manoeuvre a été bien accueillie par de nombreux politiciens, mais un grand nombre de républicains et une poignée de démocrates l'ont fustigé.
Le sénateur de Floride Marco Rubio, un fils d'immigrés cubains qui présidera à partir de janvier la sous-commission des Affaires étrangères du Sénat pour l'hémisphère ouest, a déclaré qu'il allait "faire tous les efforts nécessaires pour contrecarrer cette tentative dangereuse et désespérée".
Il a qualifié la décision de "naïve" et a dit que le président a choisi de ne pas tenir compte de la réalité dans un discours diffusé mercredi par les médias américains.
Ted Cruz, un sénateur républicain dont le père est originaire de Cuba, a déclaré sur Fox News que le projet de normalisation des relations avec Cuba était une "erreur tragique".
Le sénateur démocrate Robert Menendez, un fils d'immigrants cubains et président la commission des Affaires étrangères du Sénat, a également critiqué l'administration Obama, qualifiant la décision de "malavisée" et fustigeant M. Obama à propos de l'échange de trois espions cubains contre un agent du renseignement américain.
Certains analystes estiment que le moment est venu de normaliser les relations, tandis que d'autres soutiennent l'idée que le gouvernement cubain doit apporter certains changements.
"M. Obama normalise les relations avec Cuba parce que les sanctions américaines ont été un échec complet. Le président espère qu'il pourra produire de meilleurs résultats grâce à la négociation", a indiqué à Xinhua Darrell West du Brookings Institution, avant d'ajouter que M. Obama a décidé de se concentrer davantage sur sa politique étrangère pendant les deux dernières années de son mandat.
Mais certains analystes estiment que la normalisation des relations entre les Etats-Unis et Cuba va rencontrer un certain nombre d'obstacles.
Mike Gonzalez, qui est membre de la Heritage Foundation, a déclaré aux journalistes dans une conférence téléphonique que le Congrès contrôlé par les républicains allait réagir pour empêcher le président de mettre en œuvre ces changements radicaux, avant d'ajouter que le Congrès a plusieurs outils à sa disposition pour y parvenir.
"[Le Congrès] peut mettre un frein à la nomination de l'ambassadeur [qui sera désigné pour Cuba], il peut (...) empêcher que des fonds soient attribués à une ambassade," a-t-il dit.
Dans le même appel, une autre chercheuse de la Heritage Foundation, Ana Rosa Quintana, a indiqué que la victoire écrasante des républicains aux élections de mi-mandat a démontré que les Américains ne sont pas satisfaits de la politique étrangère de Barack Obama.
Elle a soutenu que la loi Helms-Burton, qui a durci l'embargo commercial contre Cuba et a augmenté les restrictions sur les Américains qui veulent s'y rendre, a peu de chances d'être abrogée par le Congrès qui va bientôt être contrôlé par les républicains.
Par conséquent, M. Obama va utiliser le pouvoir exécutif pour assouplir quelques restrictions sur les banques, le commerce et les voyages à Cuba.
Le secrétaire au Trésor américain Jacob Lew a déclaré mercredi dans un communiqué que l'amélioration des contacts avec les Etats-Unis est "essentielle pour faire progresser la liberté politique et économique pour le peuple cubain."
"Les mesures que nous prenons faciliteront les voyages, le commerce, les communications et le développement des entreprises privées entre les Etats-Unis et Cuba et favoriseront des changements positifs pour les citoyens de Cuba", a souligné M. Lew.