Dernière mise à jour à 09h52 le 06/09
Peu après que l'Italie, l'Allemagne et la France se soient opposés sur la façon dont l'Union européenne devait gérer la question brûlante des migrants, les trois pays ont finalement joint leurs voix pour réclamer une réforme majeure du droit d'asile dans le bloc européen. Dans la foulée, Paris et Berlin ont proposé "un mécanisme d'accueil permanent et obligatoire en Europe". Mais reste encore à convaincre les "petits" Etats membres.
Cette annonce conjointe, dévoilée par le ministre italien des Affaires étrangères Paolo Gentiloni, a été vue par certains analystes comme une indication que l'Italie -le pays le plus impacté ces dernières années par la crise- entendait jouer un plus grand rôle dans la définition de cette nouvelle politique.
Dans une lettre signée par M. Gentiloni et ses homologues allemand Frank-Walter Steinmeier et français Laurent Fabius, les trois dirigeants ont mis le doigt sur ce qu'ils appellent les "insuffisances" du système européen d'accueil des migrants et des réfugiés.
Les trois ministres estiment que les 28 Etats membres de l'UE devaient assumer ce fardeau via une "répartition équitable" des migrants sur leur territoire.
Le système actuel remonte aux accords de Dublin de juin 1990. Il oblige les demandeurs d'asile à déposer leur dossier dans le premier pays européen par lequel ils sont arrivés et où ils ont été enregistrés. Or, le droit d'asile peut varier selon les pays.
Une situation pénalise les pays du Sud tels que l'Italie ou la Grèce, respectivement proches du Maghreb et de la Turquie, et dont les côtes sont un point d'entrée aisé pour les migrants et réfugiés. Il se trouve aussi qu'ils sont les deux pays les plus endettés dans l'UE par rapport à leur PIB.
Si l'Union européenne décide de suivre en bloc cette initiative tripartite, elle pourrait provoquer des changements majeurs : ces trois pays, avec le Royaume-Uni, sont les quatre plus grandes économies du continent et les quatre plus peuplés.
De plus, la France et l'Allemagne ont saisi jeudi le président du Conseil européen Donald Tusk et le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker pour "proposer un mécanisme d'accueil permanent et obligatoire en Europe", a indiqué François Hollande, après un entretien avec la chancelière allemande Angela Merkel.
Mais l'adoption d'une politique unifiée va se montrer très compliquée. Réunis vendredi à Prague, la Hongrie, la Slovaquie, la Pologne et la République tchèque ont redit leur opposition à tout système de quotas.
Quoi qu'il en soit, le fait que l'Allemagne et la France se joignent à une Italie qui réclamait depuis des mois une action concrète montre que Rome a su imprimer sa marque, estime Emmanuele Bianchi, politologue à la retraite et observateur des affaires européennes.
"Jusqu'à récemment, l'Italie accueillait l'essentiel du flux de migrants et avait identifié le problème bien avant les autres", note M. Bianchi dans un entretien à Xinhua. "L'Allemagne reste le pays dominant au sein de l'Union européenne, mais ceci montre que, selon les sujets, d'autres pays peuvent jouer un rôle de pointe". Et pour lui, "concernant la crise des migrants, l'Italie est un acteur majeur".