Dernière mise à jour à 16h49 le 30/03
L'ancien Premier ministre français Manuel Valls a déclaré mercredi sur RMC qu'il voterait pour Emmanuel Macron aux dépens de Benoît Hamon lors de l'élection présidentielle 2017. Une décision qui fait polémique au sein de son propre parti, puisque l'ancien Premier ministre s'était engagé à soutenir M. Hamon, nommé candidat du Parti socialiste (PS) à l'issue de la primaire de la gauche. M. Valls veut-il ainsi faire payer au candidat socialiste le prix de son insubordination en tant que député frondeur ou est-il simplement mauvais perdant ?
"Je voterai pour Emmanuel Macron parce que je pense qu'il ne faut prendre aucun risque pour la République. Je prends mes responsabilités. Ce n'est pas une question de cœur mais de raison", a affirmé M. Valls, candidat malheureux à la primaire socialiste.
Cette décision ouvre une nouvelle page dans la longue bataille "idéologique" qui l'oppose au candidat socialiste Benoît Hamon, qui est devenue évidente lors de la primaire socialiste.
En 2014 Benoît Hamon, alors ministre de l'Education nationale, quitte avec Arnaud Montebourg le gouvernement de M. Valls qu'ils accusent de mettre en oeuvre "des politiques sociales libérales".
"Je ne participerai pas au nouveau gouvernement de Manuel Valls. Il était incohérent que je reste au gouvernement, alors que j'ai exprimé un désaccord avec un point important de la politique économique et sociale du gouvernement", avait justifié Benoît Hamon dans l'Observateur du 25 août 2014.
M. Hamon, incarnant l'aile gauche du Parti socialiste, va ensuite poursuivre le combat à l'Assemblée nationale contre le gouvernement Valls. Il s'oppose à la majorité des projets de loi du gouvernement, notamment à la controversée loi El Khomri (loi Travail).
La primaire de la gauche va contribuer à creuser l'écart entre les deux camps : celui dit "réformateur", incarné par le candidat Manuel Valls, et celui jugé "très à gauche" du candidat Benoît Hamon. Lors des débats télévisés de ce scrutin, l'ancien Premier ministre rappelle souvent à son concurrent son insubordination vis-à-vis de son propre parti.
"S'il y a quelqu'un qui n'a pas respecté les règles de la majorité de 2014 à 2016, c'est bien Benoît Hamon", a rappelé M. Valls lors du dernier débat de la primaire socialiste.
"Respecter les règles, c'est commencer par respecter les programmes sur lesquels on est élu", a répondu M. Hamon faisant allusion aux promesses non tenues du président François Hollande pour justifier sa "rébellion".
Autant de divergences qui n'ont pas facilité le rapprochement entre les deux camps à l'issue de la primaire socialiste. Au lendemain de la victoire de M. Hamon, plusieurs parlementaires proches de Manuel Valls se disent attirés par la candidature d'Emmanuel Macron. Certains d'entre eux, comme les députés Marc Goua ou Alain Calmette, franchissent le pas en confirmant qu'ils voteront pour le candidat du mouvement En marche !
"Aujourd'hui, il y a un clivage avec ceux qui pendant les cinq dernières années ont saboté ce mandat. Moi je n'étais pas toujours d'accord avec le gouvernement, mais par discipline j'ai voté toutes les lois. C'est un peu bizarre que les mêmes disent aujourd'hui qu'il faut se plier à la majorité", a déclaré au Courrier Picard le député Goua.
M. Calmette également s'adresse aux "frondeurs" d'hier, aujourd'hui vainqueurs de la primaire. "Pour moi qui ai vécu de près la stratégie de la destruction systématique des frondeurs, soutenir le plus emblématique d'entre eux est au-dessus de mes forces", a-t-il indiqué depuis janvier au journal le Monde.
Le camp du candidat socialiste Benoît Hamon qualifie la décision de Manuel Valls de "trahison", puisqu'en signant la charte des candidats de la primaire il s'était engagé à soutenir le vainqueur.
"Chacun sait désormais ce que vaut un engagement signé sur l'honneur d'un homme comme Manuel Valls : rien. Ce que vaut un homme sans honneur", a tweeté Arnaud Montebourg.
"C'est un acte de trahison d'autant qu'il est prémédité. (...) si Valls veut combattre le FN qu'il le fasse avec une politique, des mots, des explications, mais certainement pas en plantant des coups de couteau dans le dos à son candidat", a déclaré sur France Inter le député Patrick Mennucci
Dans un communiqué publié mercredi, le Premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis s'est dit "triste de ne pas avoir réussi à convaincre Manuel Valls de ne pas soutenir Emmanuel Macron. Je combats cette position. Notre candidat, après la primaire et la convention unanime des socialistes, est Benoît Hamon", a-t-il rappelé.
Avant l'ancien Premier ministre, la secrétaire d'Etat chargée de la Biodiversité, Barbara Pompili, celui chargé des Sports, Thierry Braillard, et le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, avaient également annoncé leur soutien à Emmanuel Macron.