Dernière mise à jour à 08h29 le 05/02
Le ministère américain de la Défense a publié vendredi l'édition 2018 de son "Analyse de la posture nucléaire" (NPR) dans lequel il milite notamment en faveur d'armes nucléaires de faible puissance.
Premier document du genre depuis 2010, la NPR est censé donner la ligne directrice guidant la politique des Etats-Unis en matière de renforcement de la dissuasion nucléaire, qui est déjà la plus importante au monde.
"Les Etats-Unis sont aujourd'hui confrontés à un environnement au sein duquel la menace nucléaire est plus diverse et sophistiquée qu'elle ne l'a jamais été. Les programmes de développement et de déploiement des armes nucléaires et des systèmes de lanceurs des adversaires potentiels sont particulièrement dynamiques", s'inquiète le document.
La NPR 2018, qui s'inscrit globalement dans le droit fil de celui paru en 2010 sous l'administration Obama, réaffirme les engagements pris envers les traités de non-prolifération, mais souligne la nécessité de renforcer les capacités afin de rivaliser avec la Russie, et exprime son soutien en faveur des projets de modernisation nucléaire des Etats-Unis.
C'est ainsi qu'il privilégie une option de "puissance plus faible" pour les missiles balistiques et de croisière lancés depuis les sous-marins.
Les armes à puissance plus faible renforceraient la crédibilité de l'arsenal américain, affirme le document, disant que de telles armes nucléaires pourraient être utilisées en réponse à des "conditions extrêmes", y compris des attaques non-nucléaires.
Elisabeth Braw, chercheuse au Conseil de l'Atlantique, a noté que si la NPR "ne contient pas de changements radicaux par rapport à la politique nucléaire sous l'administration Obama, le débat public se concentre déjà sur les armes nucléaires de faible puissance".
"L'arsenal américain demeure le plus grand et le plus capable au monde, composé de milliers d'ogives installées sur les missiles balistiques intercontinentaux et lancés depuis les sous-marins, ainsi que de bombes nucléaires et de missiles de croisière portés par les bombardiers à longue portée", rappelle à Xinhua Tony Fleming de l'Association pour le contrôle des armes (ACA).
"Beaucoup de ces ogives sont capables de détruire des villes entières, mais les Etats-Unis déploient aussi des bombardiers en Europe qui sont capables de larguer des bombes de puissance explosive plus faible", a dit M. Fleming, avertissant que toute accumulation d'armes nucléaires de la part de Washington donnera lieu à "une course aux armements renouvelée et à un monde plus dangereux".
Selon la NPR, les Etats-Unis maintiendront leur triade nucléaire stratégique (terre, air, mer), déployée largement dans les années 1980 ou plus tôt, jusqu'à ce que les programmes de remplacement prévus soient déployés.
Les Etats-Unis disposent actuellement de 14 sous-marins de classe Ohio et envisagent de les remplacer par des bâtiments de classe Columbia. Ce remplacement, par un minimum de douze sous-marins, permettra de fournir les capacités de dissuasion requises pour des décennies, selon le rapport.
L'arsenal américain des missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) terrestres est composée de 400 missiles Minuteman III à ogive unique déployés dans des silos souterrains et dispersés à travers plusieurs Etats.
Les Etats-Unis ont également lancé un programme de dissuasion stratégique terrestre (GBSD) afin d'entamer en 2029 le remplacement de ses Minuteman III. Le GBSD modernisera aussi les 450 sites de lancement d'ICBM qui permettront d'abriter 400 ICBM.
La force américaine nucléaire non-stratégique consiste aujourd'hui en un nombre relativement petit de bombes à gravité B61 portées par des F-15E et des avions polyvalents de type DCA. Vieillissants, ces derniers devraient être remplacés par des F-35 à capacité nucléaire.
Au final, ce passage en revue de la posture nucléaire américaine va nécessiter un "investissement dans une dissuasion nucléaire crédible avec des capacités diverses", a résumé la porte-parole du Pentagone, Dana White, à la veille de la publication de la NPR. Celle-ci voit le jour près d'un an après avoir été commandée par le président américain Donald Trump.