Dernière mise à jour à 09h20 le 06/08
Malgré la pression financière supplémentaire qu'implique l'éducation d'un second enfant, Dai Shujuan et son mari ont souhaité avoir un autre bébé afin que leur première-née ait une sœur avec qui partager les vicissitudes de la vie.
Dai, femme au foyer âgée de 32 ans originaire de Changchun, dans la province du Jilin, a eu sa première fille en 2011 et sa seconde en 2015.
La famille dépense désormais 40% de ses revenus mensuels pour leurs enfants.
« Peu importe que nos enfants aient une vie qui soit ou non riche en biens matériels, le plus important est qu'ils ne se sentent pas seuls », explique Dai.
En octobre 2015, quand la politique universelle du second enfant a été adoptée, une étude en ligne conduite par le cabinet d'étude marketing CVSC-TNS Research montrait que 32% des 35 000 et quelques personnes sondées déclaraient qu'ils avaient eu un deuxième enfant car ils étaient inquiets du fait que leur premier-né se sente seul.
Dai, elle, a une sœur qui a quatre ans de moins qu'elle.
« J'ai toujours ma sœur à l'esprit. Nous partageons de nombreuses choses, comme les peines, mais aussi certaines amitiés. Quand je me suis mariée, elle a eu le sentiment qu'un trésor lui avait été enlevé, et vice versa. La société moderne est très exigeante, et les cœurs des gens ne sont plus ce qu'ils étaient autrefois, c'est pour ça qu'une sœur de sang est une personne de confiance sur laquelle on peut compter tout le long de sa vie, notamment après la mort de ses parents », confie-t-elle.
Le mari de Dai, qui est enfant unique, était encore plus favorable à l'idée d'avoir un second enfant que son épouse.
« Quand son père était malade, il n'avait ni frère ni sœur avec qui partager son fardeau. Aussi, quand son vieux père est décédé, mon mari n'avait personne avec qui partager sa peine. M'en parler à moi n'est pas la même chose que d'en parler à un frère ou une sœur », explique Dai.
« Je ne voulais pas que ma fille grandisse et se sente seule après notre mort. »
Selon une étude conduite par Wang Guangzhou, démographe à l'Académie chinoise des sciences sociales, on comptait en 2010 près de 140 millions d'enfants uniques âgés de 30 ans ou moins en Chine, un chiffre qui devrait atteindre les 200 millions d'individus d'ici 2020,
En janvier 2016, le gouvernement central a mis fin à sa politique de planning familial dans l'espoir de générer un rebond démographique. Aujourd'hui, tous les couples ont le droit d'avoir deux enfants. L'année dernière, le nombre de second enfant né en Chine a atteint 8,83 millions, une hausse de 1,62 millions par rapport à 2016, comme le rapporte un article publié sur le site officiel du Bureau national des statistiques.
D'une part, les parents décident d'avoir un second enfant principalement à cause de leurs inquiétudes quant au sentiment de solitude que pourrait ressentir leur premier enfant, comme tend à le montrer l'étude du CTR, d'autre part, il arrive que l'enfant exprime lui-même le souhait d'avoir un frère ou une sœur.
En novembre, Xu Huiying, une mère âgée de 29 ans, a décidé d'avoir un deuxième enfant, car son fils se plaignait de l'ennui qu'il ressentait au quotidien.
Cette professeure de collège a alors compris que ce dont son fils de 5 ans avait le plus besoin était d'avoir de la compagnie, ce qui l'a poussé à avoir un deuxième enfant.
« Avant ça, mon fils me disait tout le temps : “Maman, je m'ennuie tellement quand je reste à la maison tout seul.” Il jouait avec le fils de notre voisin parfois, mais quand il rentrait à la maison, il se sentait seul. Comme le dit la publicité pour les jouets : “La technologie ne remplacera jamais la compagnie.” Un frère ou une sœur est le meilleur compagnon d'un enfant », souligne-t-elle.
Wang Jiumin, administratrice universitaire à Beijing, ne s'attendait pas à avoir un second enfant, mais après être tombée enceinte en 2015, son fils a lancé un compte à rebours en attendant la naissance de son nouveau compagnon de jeu.
« Quand son petit frère était dans le berceau, il lui chantait des chansons qu'il avait apprises à la maternelle. Aujourd'hui, son frère a 2 ans, il peut le tenir dans ses bras et ils regardent ensemble des dessins animés. »
Bien qu'il arrive qu'ils se disputent des jouets de temps en temps, ils protègent l'un l'autre et s'entraident si jamais ils leur arrivent un souci à l'école.
Selon Wang, maintenant qu'ils sont plus âgés, il plus facile de s'occuper des deux garçons plutôt que d'un seul.
« Ils jouent bien ensemble et ils sont inséparables. Récemment, je me suis endormie en regardant la Coupe du monde et les garçons ont joué tout seul jusqu'à ce que leur père rentre », raconte-t-elle.
Cependant, certains enfants n'accueillent pas aussi bien leur cadet, les considérant comme un rival, et cela prend souvent du temps aux parents de stabiliser la situation.
Wang Di habite à Beijing. Elle est la mère d'une fille de 5 ans et d'un garçon de 2 ans. Souvent, elle doit s'interposer et jouer les médiateurs entre ses deux enfants.
« Ma fille est devenue plus susceptible après la naissance de notre fils. Il nous fallait prendre en compte ses émotions constamment car son frère demandait beaucoup d'amour de notre part. Elle n'apportait pas de yaourt à son frère quand elle allait s'en chercher un, tandis que lui était toujours prêt à partager le sien car il avait su dès sa naissance qu'il avait une grande sœur », confie-t-elle.
« Aujourd'hui, mis à part quelques disputes occasionnelles, ils arrivent à s'amuser ensemble la plupart du temps. Deux enfants apportent deux fois plus d'ennuis, mais aussi deux fois plus de joie. »