Le gouvernement malien a décidé mercredi de faire de la migration une opportunité de développement du pays, en mettant en œuvre un projet intitulé "Politique nationale de Migration (PONAM)".
Cette résolution a été prise après le drame des émigrés de la mer Méditerranée, survenu en avril dernier, qui a fait 800 morts par noyade dont plus de 200 Maliens selon des sources officielles et près de 300 d'après certaines sources.
Ce drame a fait ressortir que le contexte actuel des migrations exige des réponses plus adaptées et a mené le gouvernement malien à accélérer la mise en œuvre de la PONAM, adoptée depuis septembre 2014.
L'exécution de la PONAM va nécessiter la mobilisation de près de 120 milliards F CFA, selon un communiqué publié par le ministère des Maliens de l'Extérieur. Il s'agit de faire de la migration "une chance pour le développement en luttant sérieusement contre les mouvements clandestins qui prennent la forme d'une traite des personnes", précise Dr. Abdrahamane Sylla, ministre des Maliens de l'Extérieur.
Cette politique est axée sur deux volets essentiels comme la gestion des migrations conformément aux normes internationales et la mise en relation de la migration et du développement.
Selon le département de tutelle, cette politique se justifie par les multiples enjeux de la migration, la volonté politique de mieux gérer les flux migratoires, la sécurisation des Maliens de la diaspora et sa mobilisation pour le développement du pays.
L'ambition politique porte sur un ensemble de mécanismes pour favoriser l'investissement de la diaspora et organiser la migration légale, améliorer la gestion des frontières, lutter efficacement contre la migration irrégulière et promouvoir la protection internationale des Maliens à travers le monde.
"Une gestion équilibrée de la migration passe par une nécessité impérieuse de stimuler une approche commune entre les partenaires des pays de départ, de transit et d'accueil et avoir comme priorité la mise en œuvre des mesures concrètes ainsi que la mobilisation des ressources humaines, financières et matérielles afin de relever les défis que chacun affronte à son niveau", souligne Dr. Abdrahamane Sylla, cité par la radio nationale malienne.
"Nous sommes convaincus qu'en gérant mieux la migration, elle représente une source d'investissement culturelle et sociale par des échanges humains et économiques", ajoute le ministre.
Pour le gouvernement malien, la politique traduit aussi la volonté des autorités maliennes d'engager une lutte sans merci contre les réseaux mafieux par une stricte application de la loi relative à la lutte contre la traite des personnes et les pratiques assimilées.
La Politique nationale de migration prévoit la création de 5.000 emplois directs en plus des infrastructures de production et de transformation dans les localités de départ, des projets de réinsertion socio-économique à l'endroit des Maliens de retour volontaire ou forcé.
Mais, les cadres et élus de Kayes, la région de l'ouest d'où sont originaires la plupart des victimes maliennes des récents naufrages en Méditerranée, doutent de l'efficacité de cette stratégie.
Pour Mme Bouaré Fily Sissoko, ancienne ministre malienne de l'Economie et des Finances, il faut une politique de développement équilibré avec une judicieuse exploitation des richesses au profit du développement local et régional.
Intervenant au cours d'une conférence de presse, elle a regretté le fait que sa région (Kayes) soit pauvre au point que ses ressortissants soient "obligés d'aller mourir en mer" alors qu'elle est la première région contributrice de ressources fiscales et douanières au budget d'Etat.