Après avoir pris en otage dimanche ses cinq responsables membres du gouvernement d'union nationale et de transition formé le 3 février, la coalition rebelle centrafricaine Séléka presse le président François Bozizé d'appliquer sans délai les accords de paix conclus le 11 janvier à Libreville au Gabon, sous peine de reprise des hostilités dans les prochains jours.
Les dirigeants militaires de l'alliance rebelle qui avait pris les armes en décembre pour renverser le pouvoir du président Bozizé n'ont pas épargné dans leur décision de détenir leur propre leader, Michel Am Nondokro Djotodia, vice-Premier ministre et ministre de la Défense nationale au sein du cabinet dirigé par l'opposant Nicolas Tiangaye.
"Il fait partie des cinq ministres de notre mouvement. On les a invités pour discuter sur ce qui se passe à Bangui et de la paix. La négociation s'est soldée par un échec et nous sommes obligés de les retenir avec nous", a expliqué à Xinhua le colonel Michel Narkoyo, porte-parole militaire de cette rébellion qui avait déjà fait parler d'elle avec de nouvelles attaques et la prise de nouvelles villes.
M. Djotodia et sa délégation ont été capturés dimanche à Sibut, une ville du centre de la République centrafricaine (RCA) située à quelque 187 km de Bangui, la capitale, a précisé le colonel Narkoyo, ancien gendarme de deuxième classe dans les Forces armées centrafricaines (FACA) promu au grade de colonel dans la rébellion.
Les téléphones des otages ont été coupés. Ainsi, les tentatives de Xinhua de joindre le ministre de la Communication Christophe Ghazam Betty se sont avérées vaines.
Aucune réaction n'a été enregistrée dans le camp présidentiel. Les multiples initiatives en direction du ministre de l'Equipement et porte-parole du gouvernement, Crépin Mboli Goumba, n'ont pas non plus été fructueuses.
Les dirigeants militaires rebelles accusent le président Bozizé de ne pas respecter les clauses des accords de paix de Libreville qui, selon eux, ont prévu la libération des prisonniers politiques, le retrait des forces étrangères (sud-africaines et ougandaises) non issues de la Communauté économique des Etats de l'Afrique centrale (CEEAC) puis la levée des barrières de sécurité à Bangui.
"Tout ce qu'on a donné comme revendications, rien n'est respecté. On leur a donné 72 heures. Si rien n'est fait, nous serons obligés de passer à la vitesse supérieure, c'est-à-dire que nous allons reprendre les armes", a menacé Michel Narkoyo.
Le ton est monté depuis la formation du gouvernement d'union nationale pour lequel ce combattant et d'autres responsables revendiquaient un plus grand nombre de postes, "au moins sept pour satisfaire tout le monde", avait-il réclamé.
Des désaccords sur la question ont alors créé une fracture entre les cinq ministres et la hiérarchie militaire de Séléka, une fracture amplifiée avec l'opération de cantonnement en vue de leur désarment également prévu par les accords de Libreville, rejetée par les troupes.
Pour l'heure, le seul geste manifesté par celles-ci a consisté au retrait il y a deux semaines de Damara, localité distante de 90 km de Bangui et où l'offensive rebelle vers la capitale avait été stoppée par les forces de paix de la CEEAC, pour Sibut, l'une des sept villes aujourd'hui sous contrôle de l'alliance.
De sources officielles à Pretoria, l'Afrique du Sud avait déployé 400 soldats en RCA pour aider à préserver la paix et la stabilité de ce pays d'Afrique centrale, avait-on justifié. Après la signature des accords de Libreville parrainés par les chefs d'Etat de la CEEAC, Séléka avait lancé un ultimatum de 72 heures pour leur retrait, y compris celui des troupes ougandaises présentes dans l'Est pour traquer le chef rebelle Joseph Kony de l'Armée de résistance du seigneur (LRA).
Le ministre de la Communication Ghazam Betty avait, dans un entretien récent à Xinhua, souligné que la présence sud-africaine découlait des accords de coopération entre Bangui et Pretoria et que le retrait exigé ne devait pas constituer une condition pour l'application des accords de paix.