De 5,1% en 2012, la croissance du produit intérieur brut (PIB) de l'Afrique subsaharienne confirme sa consolidation observée depuis les cinq dernières années en se situant à une légère hausse à 5,4% en 2013, révèle une évaluation du Fonds monétaire international (FMI) qui projette d'ailleurs pour 2014 une nouvelle progression positive à 5,7%.
Ralentie par les effets de la crise financière et économique mondiale de 2008-2009, la situation économique globale de cette région accélère progressivement son redressement, de sorte que les perspectives à court terme sont jugées favorables, d'après le premier rapport annuel du FMI pour 2013 sur les Perspectives économiques régionales pour l'Afrique subsaharienne présenté samedi à Yaoundé.
Cette évolution contraste avec le rythme au niveau mondial où il apparaît que dans les pays avancés l'économie américaine reprend de l'élan par une croissance de 2% en 2013 et plus en 2014 malgré un ajustement budgétaire considérable de l'ordre de 1,8% du PIB, alors que la zone euro continue quant à elle de se distinguer par un retour très lent ou modéré à une croissance positive, de l'avis d'Antoinette Sayeh, directrice du département Afrique du FMI.
« La croissance des économies émergentes et des pays en développement devrait être rapide, sans pour autant atteindre sa vitesse de pointe », a-t-elle souligné dans son exposé intitulé « Créer une dynamique dans un monde à plusieurs vitesses », lors d'une conférence publique dans la capitale camerounaise en présence du ministre des Finances Alamine Ousmane Mey et d'autres personnalités gouvernementales, des membres du corps diplomatique, des acteurs économiques et financiers, etc.
Aux yeux de Mme Sayeh, l'Afrique subsaharienne confirme son classement comme l'une des régions les plus dynamiques du monde en matière d'accélération de la croissance économique. Des disparités entre les régions ou groupes de pays montrent cependant que pour certains pays à faible revenu une croissance soutenue est annoncée, ce qui n'est pas le cas dans quelques pays à revenu intermédiaire.
Présenté comme un « groupe mélangé », ce dernier groupe apparaît à la peine avec une croissance affaiblie en Afrique du Sud. Après 2,5% en 2012, la première puissance économique africaine qui fait aujourd'hui partie des économies émergentes désignées sous le vocable de BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) s'inscrit à une croissance de 3% en 2013, à en croire le FMI.
« En 2012, les déficits se sont aggravés dans les pays exportateurs de pétrole au rang desquels l'Angola, le Tchad et la République du Congo, et les pays à revenu intermédiaire, tandis qu'ils se sont améliorés dans les pays à faible revenu et les Etats fragiles (en situation de crise ou sortant d'un conflit, NDLR) », décrit la directrice du département Afrique de l'institution financière mondiale.
Pour les pays exportateurs de pétrole, une sonnette l'alarme est tirée en ce sens que « les soldes budgétaires devraient continuer de se creuser sous l'effet d'une politique budgétaire expansionniste en cours », faisant aussi penser à une baisse de l'excédent extérieur.
A cause en grande partie de la baisse des prix des produits de base, la tendance relative à la diminution des exportations et une légère dégradation des termes de l'échange des pays à revenu intermédiaire devrait se poursuivre, selon le rapport sur les perspectives économiques. C'est le groupe des pays tels que l'Afrique du Sud, le Botswana, le Cap-Vert, le Ghana, le Sénégal, Maurice ou encore la Namibie.
Selon Antoinette Sayeh, « la dette publique de certains de ces pays a considérablement augmenté ». Par exemple, le Ghana enregistre un déficit budgétaire ayant doublé à plus de 10% du PIB.
En revanche, la croissance soutenue des pays à faible revenu est justifiée par des investissements et des exportations élevés, notamment en raison de la nouvelle capacité d'extraire des minéraux. Ainsi, la Sierra Leone par exemple se réjouit d'avoir capté des investissements directs étrangers (IDE) estimés à 21% de son PIB en 2013, grâce en partie au financement de son projet de minerai de fer.
« Dans de nombreux pays, observe l'ex-ministre des Finances sierra-léonaise, la capacité de mobilisation des ressources visant à résorber de lourds déficits est limitée en raison de la petite taille des marchés de crédits locaux. Même si le niveau d'endettement est faible ». D'ailleurs, note-t-elle en outre, « le niveau d'endettement ne limite pas la capacité des pays à réagir à des chocs défavorables ».
Le rapport établit une liste de 15 pays post-PPTE (initiative de la Banque mondiale d'allègement de la dette en faveur des pays pauvres et très endettés) de la région où le ratio dette/PIB a augmenté de 5 points. Selon l'analyse de Mme Sayeh, le risque de surendettement de ces pays est cependant faible ou modéré pour l'instant. C'est le cas du Cameroun.
« Le niveau des réserves internationales de la région a augmenté par rapport aux importations (anticipées) en 2012, et le coefficient moyen de couverture a atteint presque 5 mois d'importations. Cela dit, l'évolution globale masque une légère diminution du coefficient de couverture dans les pays à faible revenu et les Etats fragiles, où le niveau de couverture moyen tourne aujourd'hui autour de 3 mois d'importations », mentionne le rapport.
« Dans la grande majorité des pays de la région, poursuit le document, les coefficients de couverture sont d'au moins 2 mois d'importations, l'exception la plus remarquable étant l'Ethiopie, où la dégradation de la balance commerciale en 2012 s'est traduite par une diminution du coefficient de couverture, qui s'est établi à 1,7 mois d'importations. »
Avec en tête la Chine, les pays émergents sont aujourd'hui une opportunité pour la consolidation de la croissance africaine, reconnaît le FMI qui salue une évolution du commerce bilatéral des biens sino-africain de 30 milliards de dollars en 2005 à 200 milliards de dollars en 2012 et d'un stock cumulé d'IDE chinois dans les pays d'Afrique subsaharienne de 460 millions de dollars en 2003 à 15 milliards de dollars en 2012.
Pour Mme Sayeh qui rappelle les 20 milliards de dollars de ligne de crédit pour le financement des infrastructures et l'agriculture mise à disposition en 2012, « comme au départ, la Chine continue de se centrer sur les pays riches en ressources naturelles, mais on observe une évolution graduelle vers les pays présentant de vastes marchés, comme l'Ethiopie ou le Kenya ».