Dernière mise à jour à 09h01 le 14/03
Stephen Roach. Photo par Bian Hong |
Selon Stephen Roach, senior fellow à l'Université de Yale et ancien économiste en chef chez Morgan Stanley, qui s’est exprimé vendredi pour le Quotidien du Peuple, l'économie mondiale est actuellement dans une situation difficile, la faible demande étant le principal problème.
Huit ans après l'éclatement de la crise financière, la croissance mondiale reste très faible, en particulier dans le monde développé. La demande globale dans les grandes économies développées ne croit qu’à un rythme anémique, les politiques de relance agressives ayant largement échoué. Si l'assouplissement monétaire a stimulé les marchés financiers, il n'a pas pour autant apporté une impulsion significative à la demande ou à l'économie réelle. Pour décrire les performances des principales économies, Stephen Roach a souligné que les Etats-Unis ont besoin d'épargner davantage et de dépenser moins. Actuellement, le taux d'épargne des particuliers aux Etats-Unis est ainsi d'environ 5%, au-dessous du taux d'épargne moyen de 9% enregistré au cours des 30 dernières années du XXe siècle.
Au cours des huit dernières années, le taux de croissance annuel moyen des Etats-Unis a été d’1,5%, tandis lors des 12 années précédentes, on a vu une croissance moyenne de 3,6%. Compte tenu des préoccupations des consommateurs américains sur les dettes personnelles, les Etats-Unis devraient se concentrer davantage sur les bilans des ménages.
Quant à l’économie japonaise, Stephen Roach croit qu’elle est actuellement retombée dans la récession. La politique connue sous le nom d’« Abenomics » ne fonctionne apparemment pas bien en ce moment, ou du moins pas aussi bien que ce qui avait été d'abord annoncé. Ce programme est censé contenir des réformes monétaires, fiscales et structurelles. Mais il s’est avéré que les efforts sur le front monétaire n'ont pas été accompagnés de réformes structurelles. Le taux de croissance moyen du Japon au cours des trois dernières années a été de 0,7%, pas significativement différent du taux de croissance moyen de 0,8% enregistré au cours des 21 années précédentes.
De l'avis de M. Roach, l'économie européenne n’a quant à elle pour l’essentiel connu aucune croissance au cours des huit dernières années, les effets de la crise de la dette en Italie, au Portugal, en Espagne, en Grèce et en Irlande s’étant prolongés. Les pays européens sont également aux prises avec des problèmes bancaires et les conséquences d’une coordination incomplète de leurs politiques budgétaires. Et bien que l'euro ait été affaibli, il n'a toujours pas stimulé la croissance.
Stephen Roach a également souligné que la Chine doit épargner moins et dépenser plus. Il croit que le ralentissement de son économie reflète deux ensembles de forces. Le premier est la faiblesse de l'économie mondiale, ce qui a un impact majeur sur les exportations chinoises. La deuxième est l’accent mis par la Chine sur la réforme structurelle, qui a pour ambition de passer d’une économie axée sur la fabrication à une économie axée sur les services et des exportations et investissements à la consommation. Bien que, selon Stephen Roach, un tel changement structurel conduira inévitablement à une croissance plus lente, il reste « très optimiste » au sujet de l’économie chinoise.
Dans l'évaluation qu’il fait des politiques des principales économies, Stephen Roach estime que l'UE et le Japon sont ceux qui ont le moins réussi. La Chine a certainement fait des progrès dans la réorientation de son modèle de croissance vers la consommation. Les Etats-Unis n'ont pas fait autant de progrès qu’ils auraient dû en faire, et ils ont trop compté sur la relance monétaire. Si le ralentissement en cours de la croissance de la productivité n’est pas traité, « les performances économiques continueront à être faibles ». Il estime que Washington devrait se concentrer davantage sur sa politique budgétaire à long terme.
Enfin, selon Stephen Roach, au cours des dix dernières années, la contribution de la Chine à la croissance mondiale a été plus de deux fois importante que celle de toutes les économies développées réunies. Il pense que même si le ralentissement de la Chine signifie un impact réduit sur la croissance mondiale, même avec un taux de croissance de 6% de son économie, la Chine sera encore en mesure d’apporter une contribution plus importante que les économies développées.
(Par Zhang Niansheng)
Stephen Roach (à droite) interviewé par le journaliste du Quotidien du Peuple. Photo par Bian Hong