Ces derniers mois, « Dama » - un nouveau mot apparu sur le site de vidéos du Wall Street Journal a fait le buzz dans le monde financier. Ce néologisme provient du pinyin du mot chinois 大妈 (dà mā, grandes tantes), qui, selon le journal, ont fait augmenter le prix de l'or par leur ruée vers le métal précieux. En fait, il ne s'agit pas d'un cas isolé. Les mots « Chinglish » ont peu à peu pénétré tous les domaines de la vie des Anglophones.
Du pinyin transformé en mots anglais
Les nouveaux mots provenant des autres langues, comme Dama, ne sont pas un phénomène neuf en linguistique et ont un nom commun – « emprunt ».
Depuis l'époque moderne, beaucoup de mot empruntés à l'anglais sont entrés dans le lexique de la langue chinoise, comme 拷贝 (kǎo bèi, copy), 酷 (kù, cool), 可乐 (kě lè, coca cola), etc. Comme ces mots adoptent la singularité idéographique du chinois tout en gardant leur prononciation originaire, ils ont été bien reçus par les Chinois.
Paralèllement, la langue de Shakespeare a également emprunté des mots au chinois. Il y a dix ans, les étrangers ont fait la connaissance du mot chinois guanxi (关系, ɡuān xì). Cependant, bien différent de son équivalent littéral de « relationship » (relation), guanxi revêt d'un plus profond sens en mettant en lumière un réseau de relations compliqué et singulier dans la société chinoise. Le mot est même entré dans Rules and Network, un texte officiel des collèges d'études commerciales en Grande Bretagne et aux Etats-Unis.
Les exemples similaires sont innombrables : le magazine britannique The Economist adopte le mot chinois guanggun (光棍, ɡuānɡ ɡùn) pour décrire les célibataires chinois ; l'hebdomadaire américain The New Yorker utilise fenqing (愤青, fèn qīnɡ) pour regrouper les jeunes Chinois radicaux ; la version anglaise du site de la Télévision centrale de Chine a appelé les Chinois qui consomment à l'étranger les chinsumer (Chinese + consumer)...
Pour les étrangers, le Chinglish est souvent drôle
Un autre phénomène linguistique est le Chinglish. Une expression symbolique est Long time no see, une traduction anglaise mot-à-mot du chinois 好久不见 (hǎo jiǔ bù jiàn), qui est déjà entrée dans la catégorie Chinglish des dictionnaires anglais.
« A cause du manque de connaissance des règles grammaticales de la structure des phrases et des sens culturels cachés derrières les mots de la langue anglaise, les Chinois tendent à la parler en suivant les méthodes d'expression de leur langue maternelle », a analysé Xu Changhuo, professeur de l'Université de Nankin.
Néanmoins, certains étrangers apprécient beaucoup le Chinglish. He Zhuanju, un étudiant venant de Singapour qui a fait ses études à l'institut des sciences médicales de l'Université du Zhejiang est bilingue chinois-anglais. Quand il a entendu dire l'expression People mountain people sea (traduction mot-à-mot du chinois 人山人海, rén shān rén hǎi) pour la première fois, il en a tout de suite saisi le sens. « Parfois quand je bavarde avec mes amis anglophones, je l'utilise, c'est de l'humour, » a dit le jeune homme.
William, un étudiant canadien de l'Université de Toronto, ne connaît aucun mot chinois, mais il a appris bien des mots des expressions du Chinglish auprès des ses camarades chinois. « Ils me disent souvent de Good good study Day day up (la traduction mot-à-mot de l'expression chinoise好好学习 天天向上hǎo hǎo xué xí tiān tiān xiànɡ shànɡ, qui est souvent utilisée pour encourager les élèves chinois à travailler dur pour faire des progrès). J'aime beaucoup cette phrase courte et facile à retenir et je l'ai postée sur mon statut. »
La société américaine Global Language Monitor a beaucoup apprécié le Chinglish, le qualifiant de « mélange enrichissant ».
La langue aide à créer le soft-power du pays.
La plupart des néologismes dans la langue anglaise proviennent de langues comme le latin, l'allemand et le français, alors qu'aujourd'hui elle emprunte de plus en plus de mot au chinois.
Les langues ne sont jamais isolées l'une de l'autre. « Si le Chinglish devient populaire, d'une part, c'est à cause de l' « intraduisibilité » des mots décrivant les phénomènes culturels et sociaux dans la langue anglaise ; d'autre part, cela montre que les échanges culturels entre la Chine et l'étranger s'accélèrent et que la Chine s'intègre dans le courant de la globalisation. Par conséquent, il nous faut l'accepter avec faveur et observer tranquillement sa transformation, puisque la langue est toujours en mutation», a ajouté professeur Xu.