Dernière mise à jour à 08h54 le 05/04
Depuis plus de 2.500 ans, la Fête des morts, ou Qingming, est une occasion pour les Chinois de rendre hommage aux défunts et de pratiquer le culte de leurs ancêtres. Aujourd'hui, malgré certains changements, la tradition est bien conservée.
LA COMMEMORATION
Shi Yukun a fait 15 heures de vol de Birmingham à Kaifeng, dans la province chinoise du Henan (centre), via Francfort et Beijing.
"Pour moi, Qingming représente le deuxième congé le plus important, juste après la fête du Printemps", a-t-il indiqué.
M. Shi s'est rappelé que quand il était jeune, toute la famille planifiait un voyage plusieurs jours avant cette fête. Tous les membres préparaient des sacrifices et se rendaient ensemble au cimetière.
"Les enfants se mettaient à genoux devant la tombe tandis que les adultes effectuaient des rituels", a-t-il raconté. "Les enfants avaient également leurs tâches, telles que plier les papiers d'offrande. Celui qui était le plus rapide devait être récompensé lors du pique-nique.
M. Shi est allé au Royaume-Uni il y a plusieurs années.
"C'est seulement après être parti de mon pays natal que j'ai ressenti l'attachement émotionnel des Chinois à leurs terres ancestrales. La fête de Qingming est porteuse d'un tel sentiment", a-t-il expliqué.
Dans la province chinoise du Qinghai (ouest), un retraité du secteur de la construction ferroviaire, Zhang Shenglin, a apporté comme d'habitude de l'alcool sur les tombes de ses anciens collègues. Chaque année, pour Qingming, il boit de l'alcool et parle avec eux.
"Sept de mes collègues de travail sont morts dans la construction du chemin de fer Qinghai-Tibet, dont quatre dans mes bras", a-t-il confié.
M. Zhang, âgé de 62 ans, était un ouvrier en 1974, lorsqu'ils ont commencé à creuser un tunnel dans une montagne de 3.800 mètres de haut.
"Nous avons passé trois ans à réaliser les travaux du tunnel, mais certains d'entre nous sont morts dans des inondations pendant la construction, ou ont été tués par des chutes de roches", a-t-il indiqué. "Ils me manquent beaucoup".
DES OPPORTUNITES D'EMPLOI
MM. Shi et Zhang font partie des centaines de milliers de Chinois qui rendent hommage aux morts lors de la fête de Qingming, qui tombe le 4 avril cette année.
Un cimetière à Changsha, capitale de la province chinoise du Hunan (centre), est rempli de monde, où Yang Xue et une dizaine de bénévoles offrent leur aide aux visiteurs, dirigent la circulation et fournissent des conseils.
"Nous allons travailler ici pendant dix jours", a-t-elle indiqué.
Mlle Yang est une étudiante de première année de l'Institut funéraire de l'Ecole du travail social de Changsha.
"Je me sens professionnellement proche de la fête", a-t-elle ajouté.
L'institut, créé en 1995, est le premier du genre en Chine. Les matières pour les étudiants varient de l'oraison funèbre à la méthode d'embaumement. Il y a plusieurs années, les étudiants étaient réticents à parler de leurs études, mais la situation change actuellement.
"Avec le développement de la société, l'humanisme est de plus en plus important pour la clientèle, et les anciens travailleurs funéraires sont déjà dépassés", a expliqué Su Lihui, un enseignant de l'institut. "Par conséquent, on a besoin de nos diplômés".
Il a indiqué à l'Agence de presse Xinhua (Chine Nouvelle) qu'en 2016, plus de 900 emplois ont été proposés à plus de 200 diplômés. Chaque étudiant avait quatre options en moyenne.
Xiao Yang (nom d'emprunt) est venue à l'institut funéraire depuis une école commerciale.
"J'avais des inquiétudes auparavant", a-t-elle expliqué. "Mais plus j'apprends, plus je pense que prendre soin de ceux qui ont accompli leurs parcours de vie est une profession respectable".
PRENDRE SOIN DES VIVANTS
Le changement de l'esprit de la population a eu un effet positif.
Dans le village de Taosheng à Nanchang, capitale de la province chinoise du Jiangxi (est), Xiong Houzi et 300 autres villageois sont montés à bord d'un bus pour aller au cimetière, apportant des fleurs.
La scène était très différente par rapport à il y a plusieurs années, quand les villageois brûlaient des offrandes, en général faites de papier.
"Nous portions nos pires vêtements, par crainte que le feu et la fumée tachent ou endommagent nos habits", a évoqué M. Xiong.
Mais cette fois-ci, tous étaient bien vêtus. Après l'hommage, ils sont partis faire une randonnée.
"Brûler des téléviseurs et des voitures en papier ne fait rien de bon pour les défunts", a indiqué Li Xiangyuan, chef du comité du Parti communiste chinois pour le quartier résidentiel de Quanzi, de la ville de Linyi, dans la province chinoise du Shandong (est).
"Si vous êtes un bon descendant, prenez soin de vos parents quand ils sont vivants", a-t-il noté.
Pour encourager les habitants à remplir leur devoir filial, il a affiché une liste sur un panneau, honorant les bonnes actions des villageois.
"Les changements sont évidents", a constaté un homme âgé anonyme.
"Prenons l'argent par exemple. Auparavant, celui qui donnait à ses parents 200 yuans (29 dollars) par an était considéré comme bon enfant. Aujourd'hui, nous pouvons recevoir 1.000 à 2.000 yuans", a-t-il indiqué. "Bien prendre soin de nous est meilleur que n'importe quoi d'autre".