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La folie pékinoise du diabolo

La Chine au présent | 11.01.2018 14h29

Au hasard de vos pérégrinations dans les rues de Beijing, vous découvrirez des surprises révélant des histoires extraordinaires vieilles de plusieurs siècles. Voyage dans l'une des traditions les plus méconnues de la Chine.

L'entrée du musée

Il est là sur les cartes à la vue de tous : le musée bien particulier du cephalostachyum de Beijing ; ou comme d'autres cartes l'étiquettent, un musée du « bambou creux ».

Perplexe ? J'avoue que je l'étais. Selon Wikipédia, le cephalostachyum est « une variété de bambou d'Asie et de Madagascar de la famille des herbacées. Les plantes sont de tailles petites à moyennes comparées à la plupart des autres bambous. Ils résident dans les montagnes et les forêts des basses terres. »

Toujours curieux. Je fais donc mon chemin jusqu'à la station Guang'anmennei sur la ligne 7 du métro de Beijing. Environ 200 m plus loin, voilà quelque chose qui ressemble à un chantier. Et sur un mur, derrière des piles de dalles de pavage, une peinture murale qui représente des personnes jouant avec des diabolos.

Images et pièces de collection racontant l'histoire du diabolo à travers les siècles

Un peu plus en avant, se trouve une maison à cour carrée traditionnelle avec écrit « 北京空竹博物馆 » au-dessus de l'entrée. D'après le traducteur de mon smartphone, je suis arrivé au Musée du diabolo de Beijing.

Le mystère est résolu ! Un diabolo, ou yoyo chinois comme ils sont parfois appelés, est traditionnellement fabriqué à partir de bambou et de bois. Il s'agit d'un rouleau creux, pareil à un haltère qu'on fait tourner et qui est lancé sur une ficelle reliée à deux baguettes, une tenue dans chaque main. Un rouleau creux fait de bambou ? Le musée du bambou creux ? Enfin tout s'éclaire !

À l'entrée de la cour, on voit une peinture murale qui explique tout…Voici donc sans l'ombre d'un doute le lieu dédié aux diabolos.

Les instructions « comment tenir un diabolo » sont reproduites sur des dessins de l'exposition.

Un objet qui réveille le printemps

L'histoire du jeu de diabolo remonte à près de 1 000 ans quand il était pratiqué comme un passe-temps par la noblesse chinoise. Durant la dynastie des Ming (1368-1644), il s'est petit à petit transmis aux gens simples, mais il a fallu attendre la dynastie des Qing (1644-1911) pour que jouer et vendre des diabolos aux foires du temple pendant le fête du Printemps devienne une tradition établie. Le diabolo est devenu un instrument populaire de jonglerie aussi bien dans les rues que lors des représentations acrobatiques. En fait, le diabolo tournoyant a été inscrit sur la liste du patrimoine immatériel de la Chine. Cela est beaucoup plus dur qu'il n'y paraît, même si on s'exerce sans arrêt avec ténacité, plusieurs diabolos à la fois peuvent tournoyer sur une même corde. Une partie du charme des diabolos, connus aussi comme les baguettes du diable, est le nombre de choses incroyables que vous pouvez faire avec.

À vrai dire, le nom technique pour désigner un diabolo est kongzhu, bien qu'il ait aussi de nombreux surnoms régionaux tels que la « calebasse du vent » à Tianjin ou cheling signifiant « tirer la cloche » dans le sud de la Chine.

Les baguettes utilisées pour contrôler les diabolos sont faites de différents matériaux.

Il en existe de toutes les tailles, de la longueur d'un ongle de doigt de la main à la largeur d'un pneu de voiture, et de toutes les formes comme celle d'un dragon, d'un ballon ou de fleurs. Toute personne étant déjà allée à un spectacle de cirque moderne en Chine aura déjà vu une débauche de dextérité des acrobates qui se pavanent avec ces outils infernaux. En Chine, le diabolo a officiellement été ajouté à la liste des performances acrobatiques dès 1950. Quand les diabolos sont en train de tourner, ils produisent un sifflement unique ou un vrombissement, dont on dit qu'il symbolise le réveil du printemps.

Le musée de l'insolite

Ce musée de 200 m² a été ouvert en mai 2009 et est le premier musée à thème dédié au patrimoine culturel immatériel à prendre place à l'intérieur d'une communauté de Beijing.

Les diabolos sont vendus au public depuis longtemps.

Le Musée du diabolo abrite plus de 400 diabolos et est divisé en trois salles présentant le développement du diabolo dans son histoire, ses techniques et ses façons de le faire tourner. Quelques expositions remarquables possèdent des diabolos de plus d'un siècle, le plus grand diabolo du monde, des mini diabolos que le dernier empereur de Chine Puyi a fait tournoyer, et des sculptures de diabolos en argile qui ont tournoyé en des temps reculés. Il y a aussi beaucoup de photographies anciennes les montrant à la vente dans les rues du temps jadis ; et au cas où vous auriez peur de ne pas savoir ce que vous pouvez faire avec ces « jouets », il y a aussi des dessins qui vous aideront à vous en sortir.

Dans ce musée, vous trouverez des caisses entières de diabolos, certains assez jolis et d'autres beaucoup moins. Comme il n'y a pas de notices en anglais, il vaut la peine de prendre votre téléphone portable avec l'application déjà téléchargée de traduction instantanée via la caméra.

Les diabolos sont présentés dans les numéros de cirque en Chine dès 1950.

Les diabolos traditionnels sont faits à la main, et le processus complexe passe par 17 étapes, notamment la coupe du bambou, la fabrication du corps, le polissement du bois et l'ajout d'un axe ; mais les instruments employés sont des outils basiques du travail du bois, tels qu'un petit tour à bois et un établi.

Une collection de baguettes utilisées pour contrôler les diabolos est aussi exposée. À l'origine, la bobine et les baguettes du diabolo chinois étaient fabriquées avec du bambou, mais aujourd'hui ils sont faits de matériaux divers comme le plastique, le bois et le caoutchouc.

Mon ensemble préféré de diabolos ressemble à un échiquier chinois, avec des diabolos individuels en forme de pièces d'échec qui peuvent se déplacer.

Un art populaire vivant

Selon les experts, il existerait à ce jour près de 1 000 façons de jouer avec l'un de ces engins. Vous pouvez non seulement exécuter des tours compliqués avec eux, mais dans les cirques ils sont également associés à des danses élégantes, pendant qu'en même temps les artistes tapent du pied dans un petit volant, font du vélo, du skate ou réalisent d'autres activités.

Étant une forme d'art, il n'est pas surprenant que les costumes des artistes soient aussi importants que la performance elle-même, et nous trouverons exposés, sans étonnement, les costumes qui ont servis lors des représentations.

Il existe toujours des centaines d'associations de diabolo à travers la Chine. Uniquement à Beijing, on raconte qu'au moins 10 000 personnes jouent avec l'engin et que 30 écoles de la capitale ont intégré le jeu de diabolo comme l'un de leurs cours. L'un des numéros les plus marquants nous ramène au 1er novembre 2007 quand le plus grand nombre de coups de pied donnés au volant a été effectué en faisant tourner un diabolo pendant une minute. Liu Yunji avait réalisé 69 coups de pied, établissant un nouveau record mondial au Guinness.

Je crois bien que je serais vraiment chanceux de réussir ne serait-ce qu'un seul coup de pied de volant en faisant quelque chose d'autre avec l'un de ces engins infernaux.

Pour aller au Musée du diabolo, empruntez la ligne 7 jusqu'à la station Guang'anmennei et prendre la sortie B. Baoguosi se trouve en face avec le parc Guangning sur la gauche. Marchez tout droit 50 m et tournez à gauche dans le hutong Xiaoxing. Environ 200 m plus loin, vous passez à côté des toilettes publiques et le musée se trouve juste après à votre droite.

(Par BRIAN SALTER, un annonceur et journaliste qui a travaillé en Chine durant les cinq dernières années.)

(Rédacteurs :Guangqi CUI, Wei SHAN)
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