Dernière mise à jour à 15h24 le 27/07
Alors que, ces dernières années, la compétition pour attirer les talents s'est intensifiée entre les grandes villes de Chine, beaucoup ont dévoilé des ensembles de mesures pour attirer les jeunes ambitieux. Cependant, le hukou, le fameux titre d'enregistrement permanent des ménages, l'un des principaux incitatifs offerts par de nombreuses villes, semble aujourd'hui perdre de son attrait.
Pendant six décennies, l'obtention de ce document de résidence permanente a été essentielle pour les personnes souhaitant s'installer dans les grandes villes.
Les ressortissants chinois sont enregistrés auprès du système de hukou de leur lieu de naissance, et il peut être extrêmement difficile de le modifier et de s'enregistrer dans un autre endroit.
Des diplômés examinent les descriptions de poste lors d'un salon de l'emploi en avril à Beijing. (Zhang Cheng / Xinhua)
Cependant, les gens restent toujours prêts à faire ce changement parce que le hukou accorde l'accès aux prestations sociales, réduit le coût des services de santé locaux et facilite l'accès aux écoles locales pour les enfants du titulaire.
Fondamentalement, et pour dire les choses plus simplement, obtenir le « bon » hukou rend la vie beaucoup plus pratique.
Pour la vingtaine de grandes villes qui ont publié des politiques visant à attirer de nouveaux talents, en particulier des diplômés, l'idée d'offrir le hukou avec peu ou pas d'exigences en matière d'emploi ou de propriété immobilière semblait une évidence.
Mais des preuves suggèrent que le hukou n'est désormais plus une priorité pour la jeune génération lorsqu'il s'agit de choisir un endroit pour s'installer ou débuter une carrière.
Le salaire et le développement de carrière plus importants que le hukou
Une enquête menée l'année dernière par le China Youth Daily a ainsi révélé que les trois principaux facteurs pour les diplômés universitaires étaient le salaire (64%), le développement de carrière potentiel (59%) et la taille de la ville (43%). Le hukou ne s'est classé que quatrième dans la liste des préoccupations.
Pour Zhu Qing, directeur du Centre d'orientation professionnelle des étudiants à l'Université de commerce et d'économie internationaux de Beijing, le hukou a clairement commencé à perdre de son attrait auprès des nouveaux diplômés.
Une enquête récente menée par le centre a d'ailleurs montré que seulement 18% des répondants considéraient le hukou comme la considération la plus importante lors de la recherche d'un emploi.
Une demandeuse d'emploi déballe ses affaires dans un logement temporaire fourni par le gouvernement de Chengdu, capitale de la province du Sichuan. (Li Like / Xinhua)
Les diplômés ne resteront pas dans une ville juste pour un hukou parce que le développement de carrière et les opportunités d'emploi sont les deux principaux facteurs déterminants, a dit M. Zhu. Il estime qu'environ 80% des diplômés de son université trouvent un emploi à Beijing, Shanghai, Guangzhou ou Shenzhen (ces deux dernières étant toutes deux dans la province du Guangdong), mais jusqu'à 65% restent à Beijing.
L'enquête a également indiqué que 67% des étudiants accordent une attention particulière aux incitations en faveur des talents et que 52% seraient prêts à travailler dans leur ville d'origine si des opportunités appropriées se présentaient.
« Les incitations suscitent leur attention parce que travailler dans leur ville natale est beaucoup mieux que dans une ville inconnue », a souligné M. Zhu, ajoutant qu'il est important que les gouvernements locaux sachent ce dont les diplômés ont réellement besoin lorsqu'ils choisissent une ville où travailler.
Une plate-forme pour les jeunes diplômés
D'après Sun Hui, chercheur à l'Académie chinoise des sciences du personnel, l'introduction de talents passe par de nombreuses étapes, et les villes doivent d'abord offrir aux personnes talentueuses des plans d'investissement et des projets pour fournir une plate-forme d'emploi aux jeunes diplômés.
À titre d'exemple, il cite Wuhan, la capitale de la province du Hubei, qui compte le plus grand nombre d'étudiants universitaires et le plus grand nombre de diplômés de toute la Chine. La ville a fait appel à ses anciens élèves les plus qualifiés pour y revenir et démarrer leur propre société ou investir dans des entreprises locales, ce qui offrira davantage d'opportunités d'emploi.
Un nouveau diplômé fait une demande d'appartement à prix réduit dans le cadre d'un programme d'encouragement à Wuhan, capitale de la province du Hubei. (Shi Wei / Xinhua)
En avril de l'année dernière, Wuhan a lancé son Bureau d'introduction des talents et embauché des entrepreneurs diplômés des universités de la ville comme conseillers, et notamment Lei Jun, PDG de Xiaomi. En outre, le bureau a trouvé un rôle à un grand nombre d'experts chinois ainsi qu'à pas moins de six lauréats du prix Nobel étrangers, notamment le biologiste cellulaire Randy Schekman et le chimiste Karl Barry Sharpless, tous deux ressortissants américains.
Entre juin 2017 et le mois dernier, environ 500 000 nouveaux diplômés et diplômés récents sont arrivés pour travailler à Wuhan, soit le double par rapport à la même période de l'année précédente. Et environ 200 000 d'entre eux se sont inscrits pour obtenir un hukou, soit six fois plus que pour la même période de 2016.
« Nous avons soigneusement analysé le type de talents dont nous avons besoin sur la base des industries compétitives de Wuhan », a déclaré Sun Zhijun, directeur adjoint du bureau, faisant référence à des secteurs tels que l'électronique, la chimie et les équipements médicaux.
Les appartements à prix réduit sont parmi les mesures incitatives que la ville offre aux diplômés qui reviennent. Ceux qui achètent un bien immobilier construit par le gouvernement ont droit à une réduction de 20% par rapport au prix du marché, mais M. Sun a toutefois reconnu qu'un système de loterie a finalement été introduit parce que la demande a largement dépassé l'offre.
Wang Meifang, une étudiante spécialisée en traduction de l'anglais et du chinois à l'Université de Wuhan, et qui sera diplômée l'année prochaine, a pour sa part déclaré qu'un nombre croissant de diplômés de son établissement ont choisi de rester à Wuhan ces deux dernières années. « Les villes offrent plus d'options aux jeunes, ce qui est une bonne chose, mais pour moi, trouver un emploi que j'aime, c'est ma principale considération », a-t-elle souligné.