Depuis l'adhésion de la Chine à l'OMC il y a un peu plus de dix ans, son économie a dépassé celles des puissances occidentales, et elle est même partie pour rattraper les Etats-Unis, ce qui ne laisse pas d'inquiéter l'Occident, qui pense que la Chine ne s'est pas intégrée comme il l'aurait souhaité dans sa voie stratégique, mais qu'elle l'a fait en quelque sorte en « franc-tireur », pour devenir « le plus grand gagnant de la mondialisation ».
Si l'on regarde de plus près les raisons de l'émergence de la Chine, au-delà de sa taille gigantesque, l'Occident incrimine surtout le soi-disant modèle « de capitalisme d'Etat » de la Chine, dans lequel les réformes politiques sont à la traîne, un grand nombre de subventions publiques sont accordées aux entreprises publiques, qui bénéficient ainsi d'un avantage concurrentiel injuste.
Mais les temps ont changé. Autrefois, les pays occidentaux étaient désireux de voir la Chine entrer dans le système international et à entrer dans le moule ; objectivement, ils ont aidé la Chine à s'intégrer dans la mondialisation, mais maintenant, ils relèvent le seuil de la nouvelle vague de mondialisation, pour tenter d'en écarter la Chine, pour empêcher que la Chine ne finisse, dans son parcours actuel, par rattraper l'Europe.
Par exemple, au cours des dernières années, l'Occident a mis en œuvre une « politique post-accord » à l'encontre de la Chine, dans l'espoir que l'accord de partenariat trans-Pacifique, l'Accord de Partenariat transatlantique pour le commerce et l'investissement et d'autres accords de libre-échange de haut niveau, déclenchant une nouvelle vague de mondialisation, où les coûts environnementaux et sociaux effaceraient l'avantage concurrentiel international de la Chine, la contraindraient à procéder à des réformes.
Lors du dialogue stratégique et économique Chine-États-Unis qui vient de s'achever, les Etats-Unis se sont montrés particulièrement inquiets de voir l'augmentation de l'avantage comparatif de la Chine et parallèlement la diminution de celui des Etats-Unis par rapport la Chine, et affiché une forte méfiance à l'égard de l'économie de marché socialiste à caractéristiques chinoises. Quant à l'UE, malgré son slogan « des relations équitables », les apparences réelles ne sont pas aussi avantageuses, puisqu'elle lance constamment des enquêtes anti-dumping ou anti-subventions contre le « Made in China », et qu'elle a même menacé d'appliquer des droits punitifs élevés croissants contre les produits photovoltaïques chinois.
Des faits ci-dessus, on peut tirer deux conclusions : la Chine a été reconnue par la communauté internationale comme une puissance émergence ; et aujourd'hui l'heure est arrivée de remodeler l'avantage comparatif international de la Chine.
La Chine, d'une part fait face à la pression de la restructuration de son économie nationale, et d'autre part, elle fait face à un Occident qui manque de confiance. L'avantage comparatif de la Chine est devenu une cible. Face à la reformulation d'une nouvelle vague de règles mondiales par les pays occidentaux pour améliorer les normes du commerce et des investissements internationaux, l'avantage comparatif de la Chine dans la concurrence internationale va-t-il pouvoir perdurer, comment le reconstruire? Ce qui se trouve en face de nous est un enjeu stratégique majeur.
Alors que faire ? S'isoler dans sa forteresse ? Monter en voiture ? Traverser la rivière en étant la cible des pays développés ? C'est clairement impensable. Il nous faut refondre l'avantage comparatif de la Chine, passer par une restructuration de notre économie et une modernisation de nos capacités, être présents au plus haut niveau des industries stratégiques émergentes, renforcer les règles internationales, les droits d'élaboration de normes et les capacités nationales de réponse.
Actuellement, même si l'Europe et les Etats-Unis redoublent également d'efforts pour mettre en œuvre les changements internes, ils sont impatients de rebâtir leurs nations. Parce qu'ils savent que la concurrence future sera un rapport de force. La réforme des bonus est liée au futur avantage comparatif international. En plus des réductions de droits, l'Accord de partenariat transatlantique pour le commerce et l'investissement doit aussi discuter de la réduction des barrières non tarifaires (BNT), de l'harmonisation du modèle capitaliste européen et américain et de la ré-industrialisation etc, afin de remodeler l'avantage comparatif de l'Europe et des Etats-Unis. Une fois que les États-Unis et l'Europe auront réussi à s'entendre sur des normes techniques, qui deviendront les nouvelles normes internationales, cela affectera l'ensemble des règles de décision globales et aura un impact significatif au niveau mondial. Ces nouvelles règles et l'accord de partenariat trans-pacifique permettront d'améliorer grandement la participation de la Chine aux coûts de la mondialisation. La Chine devra faire face alors une nouvelle fois à un Occident remodelé et y répondre, que ce soit par le biais du futur accord de libre-échange Chine-Japon-Corée du Sud ou des accords d'investissement Chine-Europe ou Chine-Etats-Unis, et ce sera un test de la sagesse stratégique de la Chine.
La prochaine vague de mondialisation concernera la lutte pour l'établissement de critères, la lutte pour l'établissement de règles, et ce sera le point central de la Chine et des pays occidentaux développés en matière de concurrence. L'avantage comparatif de la Chine s'est d'abord appuyé sur sa masse, ensuite sur ses institutions, il doit maintenant s'appuyer sur elle-même.
Wang Yiwei
Le Quotidien du Peuple, Edition Outre-mer (22 juillet 2013, 01 édition)