Il y a quelques jours, des émeutes ont secoué Bangui, la capitale de la République Centrafricaine, faisant 400 morts. Sous l'autorité des Nations Unies, la France a récemment envoyé des troupes dans ce pays, pour aider la force de maintien de la paix en Afrique déjà présente là-bas à rétablir la sécurité et l'ordre, et ayant pour mission de désarmer les militants des diverses factions.
Avant-hier soir, le président français François Hollande, après avoir assisté à une cérémonie d'hommage à l'ancien président sud-africain Nelson Mandela, est aussi passé par la Centrafrique, faisant un court séjour dans la capitale, Bangui. D'une part pour se recueillir devant les deux soldats français morts au combat, et d'autre part pour encourager les forces françaises, leur demandant de mener à bien leur « dangereuse », mais « essentielle mission ».
Sachant qu'une telle intervention militaire était « dangereuse », pourquoi la France y participe-t-elle ? Pour cela, il faut remonter à 1994, et les massacres au Rwanda. Ce génocide planifié a causé la mort de 800 000 personnes. Plus tard, quelques puissances occidentales, dont la France, se sont vues critiquées dans le monde entier en raison de leur lenteur à arrêter le carnage. Depuis lors, la France a adopté une attitude plus positive dans ce qu'elle appelle « l'interventionnisme humanitaire ». Lors des interventions militaires en Côte d'Ivoire, au Mali, en Centrafrique, l'armée française a toujours été présente.
Deuxièmement, l'envoi par la France de troupes en Centrafrique n'est pas non plus exempt de considérations économiques. La République Centrafricaine est une ancienne colonie française. Jusqu'à aujourd'hui, beaucoup de ressortissants français y sont encore présents. C'est un pays peu peuplé et riche en ressources. Parmi ses ressources connues pouvant être développées figurent l'uranium, les diamants, l'or, le bois. Contrôler la Centrafrique revient à tenir fermement cette « corne d'abondance » de ressources.
En outre, la France craint également que la détérioration de la situation en Centrafrique mette en danger la sécurité et la stabilité de pays et régions voisins. France a des intérêts vitaux dans des pays frontaliers de la Centrafrique comme le Tchad, le Cameroun, le Congo (Brazzaville), la RDC du Congo. Ces pays ont de riches ressources pétrolières et minérales. La partie sud du Tchad, qui jouxte la Centrafrique, est riche en réserves de pétrole. Si l'impact des troubles se répand jusqu'à cette région, cela nuira aux intérêts des compagnies pétrolières des pays occidentaux, dont la France. En outre, la France craint également que les troubles en République Centrafricaine ne donnent aux extrémistes islamiques actifs en Afrique du Nord et de l'Ouest une occasion de se manifester. De son point de vue, la meilleure politique consiste en une action précoce et une prévention stricte. C'est pour ces diverses considérations que la France a adopté une attitude positive et commencé à préparer dès septembre de cette année l'envoi de troupes en Centrafrique. Après l'obtention de l'autorisation du Conseil de Sécurité des Nations-Unies, elle a immédiatement envoyé des hommes en Centrafrique pour y mettre fin aux « massacres ».
Cependant, la plupart des hommes politiques français estiment que cette opération, baptisée « Sangaris » ne sera certainement pas une tâche facile. Les anciens militants de la milice « Séléka » ne seraient pas moins de 20 000. Certains d'entre eux ont été intégrés dans l'armée du régime de transition. Mais d'autres sont livrés à eux-mêmes. Même après l'arrivée des troupes françaises, beaucoup d'anciens membres de la Séléka ont affiché leur refus de déposer les armes. Lors de l'action des forces armées françaises pour leur retirer leurs armes ont eu lieu de multiples échanges de tirs. Les deux soldats français qui viennent d'être tués l'ont été dans des tirs croisés lors d'une opération de ce genre. En plus de l'ancienne milice Séléka, il y a également une milice de soutien à l'ancien président François Bozizé. La désarmer prendra aussi du temps. En outre, les opérations actuelles françaises sont principalement concentrées à Bangui. Les vastes régions situées en dehors de la capitale ne sont pour l'heure pas concernées, ce qui fait que résoudre le problème en une courte période de 4 à 6 mois ne sera pas facile.
En outre, il existe depuis longtemps une opposition entre chrétiens et musulmans en Centrafrique. L'ancienne milice armée Séléka est principalement composée de musulmans. Des actions de représailles des chrétiens contre les musulmans ont eu lieu à Bangui. Comment s'efforcer de résoudre les conflits entre les deux côtés dans le cadre de la mission de maintien de la paix et prévenir les conflits religieux et tribaux est une tâche sérieuse et difficile. Cela prendra aussi du temps. Si jamais les forces françaises partent et que des représailles religieuse se produisent immédiatement, alors on ne pourra pas dire que l'envoi de troupes sera une réussite.
En outre, il est urgent de résoudre les problèmes humanitaires. Les émeutes ont abouti à la fuite de nombreuses personnes cherchant un refuge. Rien que sur l'aéroport M'poko de Bangui se sont rassemblés 10 000 réfugiés. Selon l'ONU, il y a actuellement plus de 4 millions de personnes qui ont un besoin urgent d'aide humanitaire en Centrafrique.
Je suis allé en République Centrafricaine en 2007. Bien qu'alors ce pays était pauvre, que ses infrastructures étaient insuffisantes, il semblait être très calme. En face Notre-Dame de Bangui, je voyais des enfants jouer autour de la pelouse, et à côté des camelots colportaient leurs marchandises. Espérons que cette atmosphère paisible reviendra à Bangui. Espérons qu'après les émeutes, la sécurité et l'ordre seront rétablis en Centrafrique, espérons que les personnes appartenant à des tribus différentes, à des religions différentes pourront vivre en harmonie et rechercher un développement commun, et mettre leur pays sur la voie de la paix et de la construction.