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Notre-Dame ravagée par les flammes : plus jamais ça !

le Quotidien du Peuple en ligne | 19.04.2019 10h47

Une fois encore, Paris s'est retrouvée au cœur de l'actualité mondiale, et les yeux des gens du monde entier se sont à nouveau tournés vers elle après la tragédie qui vient de la frapper dans ce qui lui est de plus cher, la cathédrale Notre-Dame. Ce 15 avril, à l'heure où les Parisiens rentraient chez eux de leur travail ou étaient déjà revenus et s'apprêtaient à passer une soirée a priori comme les autres, on apprenait stupéfaits qu'un incendie s'était déclaré à Notre-Dame. Dans ce monde dominé par les médias et le direct, chacun a pu suivre comme s'il y était le déroulement du drame, et je n'ai pas fait exception. Très vite, ces images épouvantables ont fait le tour du monde, et c'est avec horreur que chacun s'est vite rendu compte que c'était grave, très grave. Tous ceux qui ont assisté à cette nouvelle catastrophe, soit directement à proximité, soit devant leur ordinateur ou leur télévision, se sont alors pris à espérer que les dommages seraient limités. Jusqu'à ce que la flèche, le point culminant du monument, s'écroule. Et là, tout le monde a compris : l'existence même de ce monument vieux de plus de huit siècles était en jeu, et les cœurs se sont serrés.

Ils se sont serrés d'autant plus fort que l'endroit qui a été touché n'est pas n'importe lequel. En partie grâce à Victor Hugo, il est célèbre dans le monde entier, et plus de 13 millions de visiteurs y pénètrent émerveillés chaque année, d'où la vague d'émotion qui a submergé le monde entier. Mais pour les Parisiens, et les images l'ont bien montré, c'est encore plus dur : pour eux, Notre-Dame est le véritable symbole de leur ville, ils y sont tous viscéralement attachés, et leur douleur est d'autant plus grande. Ils aiment leur cathédrale beaucoup plus que d'autres trésors comme la Tour Eiffel, le Louvre ou le Sacré-Cœur. Ce que beaucoup de gens qui ne sont pas originaires de la ville ne savent pas, c'est que si beaucoup de Parisiens ne sont jamais allés dans ces endroits avant d'y être emmenés le plus souvent par leur école -et souvent ils n'y retournent guère après- quasiment tous sont allés à Notre-Dame très tôt et y sont retournés souvent. Sans doute en partie du fait de sa situation au cœur de la ville et du fait qu'on y entre presque comme et quand on veut, mais aussi parce qu'on a l'impression qu'elle a toujours été là, que sa présence est en quelque sorte naturelle, et qu'elle protège la ville depuis des siècles comme une mère. Petit, comme tant de Parisiens, mon grand-père m'y emmenait régulièrement, et plus tard, je voyais sa blanche silhouette aussi massive que rassurante chaque fois que je sortais de mon bureau.

C'est dire si, à la fois en tant que Parisien, Français, et amoureux de l'art et de l'histoire, j'ai été quadruplement touché. Et dès l'instant où j'ai appris la nouvelle, je n'ai pas quitté l'écran jusqu'à une heure tardive, incrédule et les larmes au bord des yeux, priant inconsciemment pour que les valeureux pompiers sortent vainqueurs de ce terrible affrontement contre le brasier tandis qu'un patrimoine unique et presque millénaire disparaissait dans les flammes qui le dévoraient. Longtemps, on a craint pour la survie même du bâtiment jusqu'à ce que, tard dans la soirée, on apprenne enfin que l'héroïsme des soldats du feu avait non seulement permis de sauver une bonne partie du trésor de Notre-Dame, et notamment les deux pièces inestimables et irremplaçables que sont la Sainte Couronne d'épines du Christ et la chemise du Roi Saint-Louis, mais aussi la structure de l'édifice. Et avant même cette heureuse nouvelle, après les messages de compassion inévitables, des dons -on parle, après à peine 24 heures, de la somme astronomique de 750 millions d'euros- ont commencé à affluer de France et du monde entier, signe combien réconfortant de l'importance qu'a Notre-Dame dans l'esprit des gens du monde entier.

La vénérable cathédrale, bien que durement touchée, semble donc sauvée. Pour paraphraser les paroles du général De Gaulle en 1944 après la libération de la capitale, on pouvait enfin dire Notre-Dame outragée, Notre-Dame brisée, Notre-Dame martyrisée, mais Notre-Dame sauvée ! Après le cauchemar, et avant même une reconstruction nécessaire, deux questions s'imposent maintenant à nous : pourquoi ? Et surtout que faire pour que cela n'arrive plus jamais ? Pourquoi, l'enquête, on l'espère, nous le dira, et c'est essentiel car c'est en partie quand on saura pourquoi qu'on pourra -peut-être, car rien n'est jamais certain sur cette terre- éviter que cette tragédie se renouvelle, ici ou ailleurs. Et le pourquoi conditionnera la réponse à la deuxième question. Car, ailleurs que Notre-Dame, les bâtiments uniques et irremplaçables, témoignages de l'histoire et du génie humain, sont légion et doivent être préservés à tout prix. Un attachement personnel m'a ainsi tout de suite fait aussi penser -entre autres mais surtout- à la Cité Interdite de Beijing, la plus grande structure en bois du monde. Nul n'ignore avec quel soin et quelle vigilance les autorités chinoises la surveillent en permanence pour éviter qu'arrive un drame. Est-ce à dire que cet ensemble unique est à l'abri ? Sans doute pas hélas, mais au moins beaucoup, sinon tout, est fait pour éviter une tragédie similaire à celle de Notre-Dame ou du Musée national de Rio.

A Paris comme à Rio, si la catastrophe a eu lieu, c'est forcément parce qu'il y a eu une défaillance quelque part : Notre-Dame a traversé plus de huit siècles d'histoire tourmentée presque intacte -ni les diverses révolutions qu'a connu la France, ni même la Commune qui fut fatale à nombre de bâtiments parisiens, ni même deux guerres mondiales n'avaient réussi à lui causer de dommages vraiment sérieux, mais il n'a fallu que quelques minutes, quelques instants peut-être, d'inattention ou de négligence pour que ce monument du patrimoine mondial soit à deux doigts -cela s'est joué à quelques minutes apparemment- de disparaître à jamais alors même que nous disposons de techniques ultramodernes jamais vues auparavant. Les explications du style « pas de chance », « c'était imprévisible » ou « c'est le destin » non seulement ne sauraient convaincre qui que ce soit, mais sont aussi inacceptables. Toutes les leçons doivent être tirées de ce qui vient de se passer pour que cela n'arrive plus jamais. Parce que personne n'imagine Paris sans Notre-Dame ou Beijing sans la Cité Interdite, et parce que ce que nos ancêtres, en France comme en Chine ou ailleurs, nous ont légué, nous devons le transmettre aux générations futures. C'est un devoir qui nous incombe à tous, tant vis-à-vis des générations passées, présentes et futures, que de l'histoire.

Par Laurent Devaux

(Rédacteurs :Yishuang Liu, Gao Ke)
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