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Cours de soutien scolaire : la France est-elle en train de suivre l'exemple de la Chine ?

le Quotidien du Peuple en ligne | 05.09.2019 15h07

Un peu partout dans le monde, c'est la fin des vacances et la rentrée scolaire, en particulier bien sûr en Chine et en France. En France, cela fait déjà des semaines que les supermarchés ont étoffé -le mot est faible- leur rayon de fournitures scolaires et mobilisé leur personnel pour assurer un service toujours plus personnalisé, puisqu'ils proposent quasiment tous désormais de tout vous préparer : vous leur donnez votre liste, vous revenez au plus 48 heures plus tard, et tout est prêt, vous évitant de courir les rayons pour faire des emplettes que, avouons-le, personne n'aime faire.

A la télévision et dans les autres médias aussi, la rentrée occupe une place de choix : ces derniers jours, pas un journal sans son petit sujet sur ce qui est, pour la plus grande partie des familles françaises, l'événement. Et tout y passe, du reportage sur -bien évidemment- les fournitures scolaires, à ceux sur les ouvertures ou fermetures de classes dans certaines zones rurales, aux inquiétudes et espoirs des professeurs chevronnés ou tout nouveaux, les rêves d'avenir des élèves, et même, oui même, sur le petit tour chez le coiffeur pour être le plus à son avantage le Jour J... mais les journaux évoquent aussi, et ça c'est relativement nouveau, les cours de soutien scolaire pendant les vacances.

J'imagine que vous m'avez vu venir... il y a de la comparaison dans l'air. Nul n'ignore l'importance des cours de soutien en Extrême-orient, et en particulier en Chine, où quasiment aucun écolier ou étudiant n'y échappe. En Corée du Sud aussi, ce qu'on appelle les « hagwon », les cours du soir, sont quasiment la règle, un passage pour ainsi dire pratiquement obligé vers le succès au Suneung, l'équivalent du Gaokao chinois ou du Baccalauréat français, indispensable si l'on veut avoir une chance d'accéder aux meilleures universités du pays. A Singapour, plus de 90% des élèves du primaire suivent des cours de soutien ou particuliers. Dans ce petit pays d'un peu plus de 5,5 millions d'habitants, c'est entre 700 millions et un milliard de dollars qui sont dépensés chaque année par les parents. Au Japon, les « Juku », les sociétés de soutien scolaire ou de préparation aux examens d'entrée à l'université, ont un chiffre d'affaires de près de 9,5 milliards de dollars. Et en Chine, c'est peu ou prou la même chose. La compétition est rude, la pression sur les élèves dont la famille exige l'excellence est maximale, avec parfois des effets secondaires terrifiants, comme une fatigue chronique, l'isolement, l'anxiété, le sacrifice des activités physiques, des problèmes qui amènent parfois -c'est surtout vrai en Corée du Sud ou au Japon- à des suicides.

En Chine, fort heureusement, nous n'en sommes pas arrivés à pareille extrémité, et en France encore moins. N'empêche qu'en Chine, tout le monde le sait, tout tend, dès la scolarisation, vers l'obtention du fameux Gaokao, le sésame sans lequel tout espoir d'entrer dans une bonne université est vain. Plus la note sera élevée, plus l'établissement auquel l'étudiant pourra prétendre sera prestigieux. Certains feront remarquer non sans raisons, que nombre de personnes qui ont réussi en Chine et ont amassé une fortune conséquente n'ont même pas ce diplôme, rien n'y fait, les parents chinois tiennent envers et contre tout à ce précieux document, et ils font tout pour que leur progéniture l'obtienne. Et pour cela, les cours de soutien semblent indispensables. On en voit partout en Chine, et les publicités pour les différentes entreprises sont omniprésentes. Et ça marche ; je n'ai jamais connu personnellement de jeune Chinois qui n'en ait jamais suivi. Bien sûr, cela ne veut pas dire que tous les élèves chinois passent par-là, mais ils sont tout de même très nombreux à le faire.

Et en France alors ? Eh bien en France aussi, obtenir son Baccalauréat est important, c'est une porte d'entrée à l'université -quoiqu'il soit aussi possible d'intégrer une université sans ce diplôme, mais c'est une autre histoire. Tout le monde convient ou presque qu'il ne sert plus à grand-chose, puisque ce sont presque 80% des élèves qui l'obtiennent aujourd'hui et qu'il a donc perdu depuis belle lurette son caractère sélectif et même une bonne partie de son prestige, n'empêche : il faut l'avoir, c'est comme ça, et avec la meilleure mention possible. Et pour ça, que faut-il faire ? Travailler toujours et encore bien sûr, mais cela ne suffit pas tout le temps. Et c'est là que les cours de soutien scolaire interviennent, en France aussi.

Pendant très longtemps, les cours de soutien scolaire ou les stages de remise à niveau ont été plutôt marginaux, à la limite improvisés, mais aujourd'hui, et depuis quelques années, ils prennent une ampleur jamais vue, même si on est encore bien loin de ce qu'on constate en Extrême-orient. Leur marché est actuellement évalué à plus de 3 milliards d'euros. On est tout de même très loin des chiffres du Japon, de la Corée du Sud, de Singapour ou de la Chine, même proportionnellement, mais avec un collégien sur 5 et un lycéen sur trois, et avec 40 heures par an et par élève par an, les petits Français sont ceux qui suivent le plus ce genre de cours de toute l'Europe. Il y a toutefois une différence majeure avec la Chine et les autres pays d'Asie de l'est : 40 heures sur un an, c'est à peine 4 heures par mois, un chiffre qui ferait sans doute rêver les écoliers chinois... de fait, ces heures sont souvent concentrées à la rentrée, pour bien démarrer l'année sans doute, et au printemps, pour mieux se préparer aux examens. Il existe aussi en France une autre forme de soutien scolaire qu'on ne rencontre pas en Chine, les classes préparatoires, qui interviennent -et c'est là toute la différence- après le Baccalauréat et se déroulent sur un, deux ou trois ans. En France, ce genre de classe existe depuis le 18e siècle et leur but est de préparer les concours d'entrée des meilleures grandes écoles de France, c'est dire si elles sont prisées, et plus encore avec la chute de prestige constante du Baccalauréat. On pourrait gloser sans fin sur ce sujet et se demander ce qu'il faut faire pour qu'il retrouve son lustre d'antan, ou même celui de son cousin chinois d'aujourd'hui, mais ça, c'est un autre sujet...

Quoi qu'il en soit, ce 2 septembre, c'est la rentrée en Chine, en France et ailleurs. Nous aurons sans doute tous une pensée émue pour ces millions d'élèves et d'étudiants qui vont reprendre le chemin des écoles, collèges et lycées en nous souvenant que nous aussi, nous sommes passés par là un jour...

(Rédacteurs :Yishuang Liu, Xiao Xiao)
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