Dernière mise à jour à 09h43 le 06/08
Les Etats-Unis viennent de soutenir un plan de deuxième phase du traçage de l'origine de la COVID-19. Cette démarche vient à nouveau susciter des débats sur l'origine de la pandémie, qu'ils imputent à une fuite de laboratoire en Chine (à Wuhan). Pourtant une enquête conjointe OMS-Chine a grandement écarté cette hypothèse. Devant cet état de fait, on pourrait s'intéresser aux réelles motivations des Etats-Unis qui cherchent toujours à imputer l'origine du virus à une œuvre humaine, dans ce cas particulier chinoise. Mais l'urgence ne demeure-t-elle plutôt pas dans le combat, la promotion des gestes barrières et la solidarité internationale pour venir à bout de cette pandémie ?
Nous ne pouvons douter de la bonne foi de la Chine car elle a permis une visite sur son territoire d'experts internationaux de l'OMS dans le cadre de la recherche visant à identifier l'origine du virus. Mais les enjeux géopolitiques et géostratégiques semblent bien se mêler de cette question pandémique, notamment entre les deux premières puissances mondiales que sont les Etats-Unis et la Chine. Stratégie de discrédit ou d'isolement de la Chine de la part des Etats-Unis ? Tout semble aller dans ce sens, d'autant plus que la Chine reste la seule puissance qui s'en est sortie le mieux de cette pandémie et se projette inéluctablement vers le sommet du monde. Cela semble être de bonne guerre pour les Etats-Unis. Mais, dans cette bataille de positionnement qui ne dit pas son nom, une situation urgente telle la pandémie qui a secoué et continue de bouleverser la vie humaine et l'économie mondiale ne devrait point être prise comme un alibi pour se livrer à une guerre concurrentielle. L'éthique voudrait plutôt que l'on coordonne les efforts et dirige une solidarité mondiale agissante contre cette pandémie, chose que fait d'ailleurs la Chine avec ses appuis tous-azimuts en intrants médicaux, vaccins et matériels sanitaires divers partout dans le monde, plus particulièrement à l'endroit des pays en développement, de la force COVAX et de l'Union africaine…
D'autant plus que les experts internationaux de l'OMS, en collaboration avec la Chine, ont pu effectuer une visite à Wuhan, et ont largement exclu la thèse soutenue par les Etats-Unis. Ils ont en effet jugé « extrêmement improbable » que le virus provienne d'un laboratoire, privilégiant plutôt la piste d'une contamination naturelle par des animaux.
Mais l'administration Trump est elle allée jusqu'à considérer le coronavirus comme un « virus chinois », au moment même où le monde aurait pu et dû se rapprocher de la Chine pour lutter rapidement et dès le tout début contre la pandémie plutôt que de procéder au rapatriement de leurs ressortissants à partir de la Chine, à des critiques acerbes contre elle… pratiques qui ont à coup sûr contribué à la propagation du virus dans le reste du monde.
Et la Chine qui évoque une politisation du traçage du virus, pointe elle aussi du doigt le laboratoire américain de Fort Detrick comme pouvant être à l'origine de la COVID-19, dénonçant ainsi un manque de transparence de la part des Etats-Unis.
A l'évidence, ces positions antagonistes n'arrangent en rien la lutte contre la pandémie.
Les deux puissances ont hautement intérêt à œuvrer, à collaborer ensemble, bien évidemment sur cette question, mais aussi sur toutes les autres qui concernent l'avenir du monde. Il y a bien là une impérieuse nécessité de s'attaquer aux solutions plutôt qu'à l'origine du virus, sans parler de vouloir s'acharner à tout prix à trouver un bouc émissaire à cette pandémie ! L'avenir de nos populations, de l'économie mondiale mérite bien que l'on change son fusil d'épaule, et qu'on s'oriente plutôt vers les solutions de sortie de pandémie et de ce qui va suivre. Car l'après pandémie risque d'être elle aussi une équation particulièrement à résoudre!
Par Amadou DIOP, journaliste au quotidien national « Le Soleil » (Sénégal)