Plaidant pour un « réel changement » en Syrie, le Représentant spécial conjoint des Nations Unies et de la Ligue des États arabes pour ce pays, Lakhdar Brahimi, a déclaré jeudi qu'un gouvernement de transition syrien doté des pleins pouvoirs exécutifs devait être créé jusqu'à ce que des élections puissent être tenues.
Lors d'une conférence de presse donnée à Damas, M. Brahimi a également évoqué le concept d'une force internationale de maintien de la paix déployée en Syrie, pour y surveiller le respect de l'accord qu'il appelle de ses voeux afin de mettre fin aux violences responsables d'au moins 20.000 morts depuis mars 2011.
« Le changement requis ne peut pas être cosmétique », a assuré M. Brahimi à l'issue d'un déplacement de cinq jours dans le pays, au cours duquel il s'est notamment entretenu avec le président syrien, Bachar Al-Assad.Jugeant pire que jamais la situation actuelle, le représentant spécial a affirmé que « les Syriens et le peuple syrien ont besoin, veulent et attendent avec impatience un réel changement. Et la signification de cela est claire pour tous. »
« La solution, c'est de rapprocher les points de vue des Syriens », a-t-il expliqué. « S'ils s'avèrent incapables d'y arriver par eux-mêmes, alors la communauté internationale, les pays voisins et toutes les parties concernées doivent leur prêter assistance à cette fin », a poursuivi M. Brahimi.
L'émissaire se rendra samedi à Moscou pour des pourparlers avec les autorités russes. De nouvelles entrevues avec des responsables gouvernementaux des États-Unis et de la Fédération de Russie sont prévues, dans la foulée de celles qui ont déjà eu lieu en décembre.
« Ces deux pays ont une influence et une responsabilité au niveau mondial, ce qui leur permet d'aider à trouver les solutions dont nous avons besoin en Syrie », a ajouté le représentant spécial conjoint.
Selon lui, les chiffres ne permettent plus de rendre compte du drame qui se joue à l'heure actuelle dans le pays. « La vérité, c'est que lorsque quelqu'un mentionne des chiffres, ils semblent froids », a-t-il dit. « Quand on dit qu'il y a quatre millions de déplacés internes, qu'est-ce que ça veut dire exactement ? », a lancé M. Brahimi.Il a toutefois prévenu que le nombre de réfugiés dans les pays voisins dépasserait le million d'ici le milieu de l'année prochaine, alors qu'ils sont actuellement 500.000. « Le peuple syrien souffre de manière incommensurable », a-t-il insisté.
Selon lui, ce qu'il faut privilégier, c'est un gouvernement de transition doté des pleins pouvoirs exécutifs. « Les 'pleins pouvoirs exécutifs' est un énoncé bien compris et simple : cela signifie que tous les pouvoirs gouvernementaux devraient être assumés par ce gouvernement. Celui-ci entrerait en fonctions pendant la période de transition, qui prendrait fin avec les élections. Ces élections seront présidentielles s'il est convenu que la république reste présidentielle, comme c'est actuellement le cas ; ou bien elles seront législatives, si le système actuel devait être remplacé par un régime parlementaire.
« Je pense – en fait, je suis sûr - que la Conférence de Genève organisée en juin dernier comporte des éléments suffisants pour un plan de sortie de crise. Bien entendu, cela fait six mois que la conférence a eu lieu et, sans aucun doute, des modifications doivent être apportées au communiqué qui en est issue. »
Pour M. Brahimi, la violence doit cesser et pour cela, une observation rigoureuse du cessez-le-feu par une mission de maintien de la paix s'impose.
« Cette idée a été mal interprétée », a-t-il rappelé, « certains ayant dit que Brahimi proposait de faire venir des forces étrangères en Syrie. Non, ce ne sont pas des forces étrangères, elles viendraient seulement avec l'accord des parties sur le principe d'une force de maintien de la paix ».
Cette visite était la troisième dans le pays du représentant spécial conjoint depuis qu'il a pris ses fonctions en août dernier. À cette occasion, il a pu présenter ses propositions non seulement à M. Assad, mais aussi aux groupes d'opposition se trouvant à l'intérieur et à l'extérieur du pays.
« Les pourparlers se poursuivent », a-t-il précisé, ajoutant que les Syriens devaient maintenant résoudre leurs divergences, mais avec « une aide extérieure considérable ».