Dernière mise à jour à 08h27 le 09/10
La visite, qualifiée d'historique, du président français François Hollande et de la chancelière allemande Angela Merkel au Parlement européen (PE), mercredi après-midi à Strasbourg, a permis aux deux dirigeants de reprendre la main et de réaffirmer le leadership du couple franco-allemand remis en question par les crises à répétition que traverse l'Union européenne (UE).
"Depuis que vos prédécesseurs, François Mitterand et Helmut Kohl, sont intervenus devant le Parlement, vous êtes les premiers chefs d'Etat et de gouvernement à prendre la parole ensemble devant les représentants des peuples européens pour aborder les défis sans précédent de l'Europe", a déclaré le président du PE, l'Allemand Martin Schulz, en accueillant dans l'hémicycle strasbourgeois, le président Hollande et de la chancelière Merkel.
Ce déplacement conjoint au PE des leaders des "poids-lourds" de l'UE - selon l'expression consacrée - était très attendu à plus d'un titre. Pour des raisons historiques d'abord. "La visite de François Hollande et d'Angela Merkel est le symbole de la réconciliation franco-allemande et de l'unité européenne", a tenu à rappeler Martin Schulz.
Mais cette visite répondait aussi et surtout à une urgence politique pour une UE en proie à une crise profonde, "existentielle" même, n'hésitent pas à confier des eurodéputés inquiets de la poussée de tenants d'un souverainisme qui menace la cohésion et l'avenir de l'UE.
Face aux multiples crises - économique, financière, monétaire, migratoire - l'UE est accusée de tous les maux et vilipendée par une partie de l'échiquier politique, à l'extrême droite principalement, dopée par son score dans les sondages et par la progression de ses idées dans une opinion publique européenne éprouvée par la crise économique et déboussolée quant à la question des réfugiés.
"Merci, Madame Merkel, de nous avoir fait l'honneur de nous rendre visite avec votre vice-Chancelier de la province France", a raillé la Française Marine Le Pen, présidente du Front National, qui, à chaque session parlementaire, use de son temps de parole pour attaquer avec virulence ce qu'elle considère comme les errements d'une Union européenne qui "est en train de s'effondrer".
"Quand Kohl et Mitterrand étaient venus au Parlement, il s'agissait d'un partenariat entre égaux. Ce n'est plus le cas. La France est maintenant diminuée, bloquée par la monnaie unique. Il est ironique qu'un projet conçu pour contenir la puissance allemande ait abouti à une Europe dominée par l'Allemagne", a de son côté lâché le Britannique indépendantiste Nigel Farage.
Ce qu'il est convenu d'appeler le "moteur franco-allemand", au cœur de la construction européenne, a montré des signes d'essoufflement notables dans la gestion des dernières crises auxquelles est confrontée l'UE.
Un moteur franco-allemand qui, selon le parti des Conservateurs et Réformistes européens, crée "la confusion entre leadership et domination", a affirmé le Polonais Antoni Legutko avant de lancer: "Vous ne pensez pas qu'une part du problème réside dans le fait qu'un ou deux pays décident pour l'ensemble des autres!"
Dans un tel contexte, le président Hollande et la chancelière Merkel ne pouvaient qu'afficher devant le Parlement l'union et la solidarité tout en plaidant pour une Europe forte capable de surmonter les crises.
"Lorsque la coopération franco-allemande ne fonctionne pas, c'est toute l'Europe qui souffre", avait d'ailleurs concédé en les accueillant Martin Schulz. Avant d'ajouter: "Si en temps de crise elle parvient à un bon compromis, cette coopération franco-allemande est bénéfique pour tous les partenaires et l'ensemble de l'UE".
Contre la "tentation du repli national" qui condamne à "l'impuissance", il faut une "Europe offensive" afin de "réaffirmer les principes simples et clairs de solidarité, de responsabilité et de fermeté", a résumé François Hollande.
Des propos qui résonnent avec ceux d'Angela Merkel qui a déclaré: "Nous ne devons pas céder à la tentation de rétrograder, d'agir à l'échelle nationale. C'est le moment où nous avons besoin de plus d'Europe! L'Allemagne et la France y sont prêtes".
"Nous aurons besoin d'une Europe beaucoup plus forte que ce qu'elle est aujourd'hui", a conclu dans un plaidoyer le président français. Quant à ceux qui ne veulent pas du renforcement de l'Europe, ils n'ont qu'à en sortir, a-t-il lâché, à la fin du débat, à l'adresse des eurodéputés d'extrême droite, sous les applaudissements d'une large partie de l'hémicycle.