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Le fléau du terrorisme n'est pas un épiphénomène sans racines

le Quotidien du Peuple en ligne | 19.11.2015 16h13

Après les attentats terroristes de Paris, Bernard Cazeneuve, le ministre français de l'Intérieur, a appelé à la dissolution des « mosquées qui diffusent l'idéologie de la haine ». Plus tôt cette année, les autorités françaises avaient dit que « les imams étrangers qui prêchent la haine seront expulsés, leurs mosquées seront fermées ». Cette attitude vient d'être réitérée, et elle est considérée par de nombreuses personnes comme nouvelle déclaration de fermeté de la France de lutter contre les attaques terroristes.

Aujourd'hui, plus la France affiche une attitude dure, plus elle obtient l'approbation des gens, tout comme après le 11 septembre, quand la décision des États-Unis de lancer la guerre en Afghanistan fut rapidement adoptée presque à l'unanimité par le Congrès, puis le renversement de Saddam Hussein, qui reçut également un soutien allant au-delà des parties. Mais les faits montrent que, dans l'excitation suivant les attaques terroristes, les sociétés occidentales ont trop aisément surestimé les effets des opérations de représailles, sous-estimant la complexité des sources du terrorisme à éliminer.

La fermeture par la France des mosquées prêchant la haine peut facilement conduire à des interprétations contraires au sein de la communauté musulmane. On peut dire que le gouvernement français se montre « très audacieux », et que les risques qu'il prend face à l'opinion publique sont beaucoup plus réduits que si la Chine et la Russie faisaient la même chose. Si les autres pays en proie à des préjugés occidentaux faisaient de même, alors ils devraient non seulement tenir compte de la réaction des autres musulmans, mais, d'abord, faire face aux critiques et spéculations des opinions occidentales.

S'agissant des raids aériens français menés avec l'aide des États-Unis et d'autres pays alliés, ils devraient être en mesure d'avoir certains effets, mais tant que l'Occident n'enverra pas de troupes au sol en masse, ou qu'il ne se sera pas complètement converti à un soutien au régime Assad, permettant à ce dernier de lancer une attaque de grande envergure sur l'Etat islamique, le problème sera difficile à éradiquer.

Quand bien même l'Etat islamique serait globalement défait, qu'est-ce que cela changerait ? Au Moyen-Orient, il n'y a plus de Moubarak, de Saddam, de Kadhafi, mais au-delà de la détestation que des gens ont pu leur porter, ils ont joué un rôle unique d'hommes politiques forts, les structures politiques et les structures sociales régionales originales sont tombées en morceaux, et, comme Kadhafi l'avait déclaré en ligne dans ses derniers jours, le « mur » bloquant la propagation du terrorisme et des réfugiés vers l'Europe a été détruit. L'Etat islamique est juste un exemple de la façon dont l'extrémisme peut rapidement proliférer au Moyen-Orient sur cette faille, et cette situation peut se reproduire à tout moment.

Surtout, les bombes de l'Occident peuvent certes détruire les camps et dépôts de munitions des organisations extrémistes au Moyen-Orient, mais ces bombes ne peuvent rien faire avec ces choses que l'Occident considère comme indésirables, comme le voile intégral ou autres tenues, elles ne peuvent pas empêcher l'envoi d'enfants et de jeunes dans des écoles religieuses extrémistes, et elles ne peuvent pas davantage encore lutter contre le « conservatisme global » qu'ils ruminent au fond de leurs cœurs. Jusqu'à aujourd'hui, dans une partie considérable du monde arabe, Ben Laden est toujours considéré comme un personnage positif qui a osé prôner publiquement la lutte contre l'Occident, et cela doit inciter à une réflexion profonde sur les limites de la guerre contre le terrorisme.

Le terrorisme, dont le Moyen-Orient est la source, est l'incarnation d'une incroyable haine. Le soutien américain à Israël, l'écart grandissant en termes de développement économique et social entre le monde islamique et l'Occident fournit les raisons basiques à cette haine, la situation géopolitique tendue au Moyen-Orient créée toutes sortes d'opportunités pour que l'insatisfaction générale se transforme en une haine extrême conduisant au meurtre de civils.

L'Occident n'a effectivement pas de solution, il ne forme pas une force cohérente en termes d'organisation et de mobilité. Les échecs de la guerre en Afghanistan et de la guerre en Irak et l'échec de la « transformation du Moyen-Orient » ont découragé les Etats-Unis. Le « Printemps arabe » avait donné à l'Occident des raisons d'espérer que le monde arabe allait vers une auto-transformation, mais les pays qui ont connu la « révolution », à part la Tunisie, ont connu soit une « restauration » soit le chaos, devenant source de terribles désordres, et permettant l'émergence d'une organisation comme l'Etat islamique. Tant de mal a à nouveau plongé l'Occident dans le désarroi.

Quand il n'y a aucune solution adéquate, se lamenter peut facilement devenir une façon d'admettre sa propre responsabilité. A ce moment-là, discuter de la poursuite d'effets à long terme est non seulement inutile, mais également inopportun.

Nous savons tous l'importance qu'il y a à éliminer les causes profondes du terrorisme, mais chacun sait que c'est plus facile à dire qu'à faire. Certaines personnes ont appelé à une « réforme de l'islam » et à l'abolition des « doctrines individualistes dépassées » mais ce genre de choses risque fort de ne pas être accepté par la majorité des musulmans, et encourager ce point de vue ne fera probablement que conduire à un choc de civilisations plus grave encore.

Le monde islamique ne possède pas de personnes et de forces ayant suffisamment d'autorité pour diriger une réforme, et elles ne peuvent pas davantage être fournies par le monde extérieur. Une grande partie du monde islamique sans doute besoin de pays modèle allant vers une modernisation profonde, et leur émergence fera naitre une certaine force intérieure, apportant une nouvelle vision et une nouvelle pensée.

Cependant, il n'y a aucun plan de ce genre dans le monde occidental, et il ne semble guère réaliste dans les conditions politiques internationales actuelles. Dans ces conditions, une grande partie de la rhétorique féroce de l'Occident n'est guère plus qu'un mouvement d'humeur, et les grands problèmes demeurent. Toute autre action plus concrète ne serait que du bricolage, toute idée que les gens considèrent comme importante doit être mise en œuvre si elle est conforme ; quant aux autres problèmes, ils devront être abordés en temps voulu.

(Rédacteurs :Yin GAO, Guangqi CUI)
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