Dernière mise à jour à 16h32 le 19/05
Donald Trump (Photo d'archives: Xinhua/Yin Bogu) |
Après avoir réussi à écarter 16 rivaux dans une lutte relevée pour l'investiture républicaine à la Maison Blanche, Donald Trump fait face à un nouveau combat : prouver aux électeurs qu'il peut être un dirigeant crédible, estiment des analystes.
Bien que le Parti républicain ne se soit pas encore uni autour du flamboyant magnat new-yorkais de l'immobilier, dont les positions varient souvent, les divisions qui le traversent ne devraient pas obérer sa campagne, jugent-ils en prédisant que l'establishment républicain, ébranlé par sa rhétorique enflammée sur le commerce, l'immigration ou encore les musulmans lors des primaires, va se rallier derrière lui.
UN DIRIGEANT CREDIBLE?
"La vraie question concernant Donald Trump, c'est Donald Trump lui-même", résume Allan Lichtman, un historien de la politique américaine qui enseigne à l'Université américaine de Washington. Toute la question est de savoir si les électeurs sont prêts à lui confier les clés de l'arsenal nucléaire américain et des forces armées, dit-il dans un entretien à Xinhua.
L'ancienne vedette de téléréalité est la seule encore en lice dans la course car elle a su jouer de la colère des électeurs républicains contre leur propre parti, exploitant les peurs face aux influences étrangères et aux violences. Son discours sur le thème de "rendre l'Amérique grande à nouveau" a su en convaincre beaucoup, selon les politologues.
Paraissant comme un candidat authentique qui répond directement aux griefs exprimés par la base du parti, Trump, qui n'a jamais été élu, n'a pas de programme clair, note le Pr Lichtman.
"Trump mène une campagne personnelle, pas politique. Il n'est pas là pour détailler un programme (...) Il ne s'intéresse pas aux faits et se fiche de changer d'avis", poursuit-il en citant notamment ses changements de position sur l'interdiction de visas pour les musulmans et le salaire minimum.
"La vrai question pour Donald Trump n'est pas son programme, parce que vous savez qu'il n'en a pas", relève Allan Lichtman. "Est-ce qu'il sera un dirigeant digne de confiance? Ca, c'est la vraie question."
Sharyn O'Halloran, qui enseigne l'économie politique ainsi que les affaires publiques et internationales à l'Université de Columbia à New York, estime que la question de savoir si les électeurs modérés vont le juger crédible sera cruciale dans le cadre de son probable duel contre la démocrate Hillary Clinton.
Trump, qui s'adresse à la fraction anti-establishment de l'électorat en lui parlant le même langage, n'a à ce jour aucune chance de l'emporter, affirme-t-elle à Xinhua. Pour accroître ses chances, "il doit prouver aux électeurs modérés qu'il est un candidat présidentiel crédible".
Pour cela, "il va devoir changer ses positions politiques; il doit changer la façon dont il se présente; il doit séduire l'électorat féminin", résume Mme O'Halloran.
SOUTIEN REPUBLICAIN
Si Trump le fait, cela pourra alors l'aider à se réconcilier avec l'establishment de son parti. Ce dernier a encore du mal à accepter le fait que le fougueux milliardaire -qui s'est montré imprévisible et indiscipliné pendant la campagne- va devenir le porte-drapeau du GOP.
Sur les cinq anciens candidats officiels du parti encore en vie, quatre (Mitt Romney, George Bush père et fils, Bob Dole) n'ont soit pas déclaré leur soutien à Trump, soit annoncé qu'ils n'iront pas à la convention républicaine de juillet, une façon de souligner le profond fossé qui s'est créé au sein du parti.
Mais les élus républicains au Capitole, tout déconcertés qu'ils soient par le phénomène Trump, savent qu'ils ont tous un rôle à jouer dans le choix du porte-étendard, sans parler du fait qu'ils doivent accepter la volonté des électeurs du GOP.
Dans le cas contraire, ils risquent de voir un autre démocrate siéger quatre ans de plus à la Maison Blanche.
Allan Lichtman prédit d'ailleurs que la majorité d'entre eux se rallieront derrière Donald Trump, "non pas parce qu'ils l'aiment davantage, mais parce qu'ils aiment Hillary Clinton encore moins".
"Ils se rendent compte que le prochain président pourrait nommer au moins un, voire peut-être trois juges à la Cour suprême, définissant ainsi le droit américain pour les 30 prochaines années. Et ils ne veulent pas que ce soient les démocrates qui le fassent", dit-il.
"De façon cynique, et peut-être même sans aucune morale, les Républicains vont se rallier à Trump, alors même qu'ils disent qu'il risque de se monter dangereux une fois dans le Bureau ovale", conclut l'historien.