Dernière mise à jour à 14h12 le 22/08
La Russie pourrait être contrainte de rompre ses relations diplomatiques avec l'Ukraine en l'absence d'autres options, a averti vendredi le Premier ministre russe Dmitri Medvedev dans un contexte d'escalade des tensions entre Moscou et Kiev.
"Je ne souhaite pas que cela se produise, mais s'il n'y a aucune autre option pour résoudre la situation, le président pourrait prendre une telle décision", a déclaré M. Medvedev, cité par l'agence de presse Interfax.
Les tensions entre Moscou et Kiev ne cessent de monter depuis que le président russe Vladimir Poutine a accusé l'Ukraine mercredi de planifier des attentats terroristes en Crimée et promis de prendre des mesures supplémentaires pour garantir la sécurité des infrastructures et des citoyens de la péninsule.
La Russie a arrêté un groupe de saboteurs, dont deux auraient admis avoir planifié des attentats à la bombe en Crimée sur ordre des services de renseignement militaires ukrainiens, a rapporté vendredi l'agence de presse Interfax, citant une séquence vidéo obtenue par le Bureau fédéral de la sécurité russe.
Selon une source anonyme des services spéciaux russes citée par Interfax, une personne aurait été arrêtée et plusieurs autres placées en détention, et leurs premiers témoignages auraient confirmé l'implication de Kiev dans ce complot terroriste.
L'Ukraine n'a pas encore répondu à cette séquence vidéo. On ignore la date exacte des arrestations.
Mercredi, le Bureau fédéral de la sécurité avait déclaré que le pays avait déjoué une série d'attaques terroristes orchestrées par les services ukrainiens de renseignement militaires en Crimée, et que deux militaires russes avaient été tués dans ces opérations.
Le président russe Vladimir Poutine a déclaré mercredi que "ceux qui ont pris le pouvoir à Kiev [...] ont adopté des tactiques terroristes au lieu de chercher des solutions pacifiques", qualifiant les actes de l'Ukraine de "criminels".
L'Ukraine a toutefois démenti ces accusations.
"Les accusations russes envers l'Ukraine sur le terrorisme en Crimée occupée sont aussi absurdes et cyniques que les déclarations du gouvernement russe sur l'absence de troupes russes au Donbass", a déclaré le président ukrainien Petro Porochenko.
La Crimée, qui faisait autrefois partie de l'Ukraine, a été intégrée à la Russie en 2014 à la suite d'un référendum qui a été reconnu par Moscou, mais rejeté par l'Ukraine et l'Occident.
Le secrétaire du Conseil ukrainien de la sécurité nationale et de la défense Oleksandr Tourtchinov a déclaré que ces accusations étaient "hystériques et fausses", et le ministère ukrainien de la Défense a considéré les allégations de Moscou comme une tentative de justifier son redéploiement et ses opérations dans la région.
Le représentant permanent de l'Ukraine auprès des Nations Unies Volodimir Yelchenko a déclaré mercredi lors d'une conférence de presse au siège de l'ONU que l'Ukraine demanderait au Conseil de sécurité de l'ONU de tenir une réunion d'urgence si les tensions continuent de croître en raison des accusations russes.
ESCALADE DES TENSIONS
Les deux parties ont renforcé leur préparation militaire à leur frontière, et les Etats-Unis les ont appelées à s'abstenir de faire monter les tensions.
M. Porochenko a déclaré jeudi avoir ordonné aux services nationaux de défense et de police de placer en état d'alerte élevée leurs unités déployées près de la Crimée et dans l'Est de l'Ukraine.
Plus tard jeudi, le porte-parole du Service national ukrainien des frontières Oleg Slobodian a annoncé que les gardes-frontières de l'Ukraine avaient déjà commencé à renforcer la préparation au combat de leurs unités déployées près de la Crimée et dans les régions de Lougansk et de Donetsk.
Du côté russe, un régiment de missiles anti-aériens basé en Crimée a reçu un nouveau système de missiles de défense aérienne S-400 Triumf, le système de missiles sol-air le plus avancé de Russie, a déclaré vendredi le ministère russe de la Défense.
Le vice-président américain Joe Biden a téléphoné vendredi à M. Porochenko et lui a demandé d'éviter de raviver les tensions avec la Russie, a indiqué la Maison Blanche dans un communiqué.
M. Biden a en outre précisé que les Etats-Unis avaient appelé la Russie à faire de même, selon le communiqué.
Parallèlement, le commandant de l'armée américaine en Europe Ben Hodges a demandé à la Russie d'autoriser des observateurs, y compris des journalistes occidentaux, à assister à son prochain exercice militaire.
Rouslan Bortnik, chef de l'Institut ukrainien d'analyse et de gestion politiques, a déclaré que l'escalade des tensions en Crimée allait à l'encontre des intérêts de la Russie et de l'Ukraine, mais favorisait les radicaux et les partisans d'une guerre ouverte, que les deux parties rejettent.
Il n'a pas exclu la possibilité de l'existence de forces étrangères provoquant les troubles en Crimée.
Le président du Comité des affaires étrangères de la Douma d'Etat Alexeï Pouchkov a quant à lui estimé que l'Occident devrait faire pression sur Kiev pour éviter l'effondrement des accords de Minsk visant un règlement pacifique de la crise en Ukraine. Il a en outre souligné que l'avertissement de M. Poutine s'adressait non seulement à l'Ukraine, mais aussi à l'Occident et aux Etats-Unis.
Des analystes ont toutefois estimé qu'il était peu probable que la situation actuelle dégénère en un conflit militaire à grande échelle.