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L'onde de choc des attentats du 13 novembre secoue toujours la société française

Xinhua | 12.11.2016 11h29

Alors que débute un week-end solennel d'hommages aux 130 victimes des attaques meurtrières du 13 novembre, la France, en état d'urgence, apprend à vivre avec la menace terroriste. La Nation panse ses plaies mais l'onde de choc provoquée par les pires attentats de son histoire crée des tensions au sein de la population, notamment autour de la question de l'islam radicalisé, sur lesquelles surfent des mouvements populistes, dans un climat de crise économique, sociale et politique.

Il y a bien un avant et un après "13 novembre". C'est indéniable. Le visage de la France a changé depuis cette terrible nuit où 130 personnes ont été tuées et plusieurs centaines blessées par des attaques terroristes d'une ampleur inédite. Une année a passé mais la mémoire collective est encore à vif. La date est gravée dans le coeur des Français, certains la considérant même comme le "11 septembre" de l'Hexagone.

Ce tragique événement a atteint en profondeur la société, de la politique à la vie quotidienne. Plus d'un Français sur deux déclare craindre d'"être confronté à un risque" depuis les attentats qui ont endeuillé le pays en 2015 et 2016, selon une étude de la Croix-Rouge publiée jeudi. Ils n'étaient que 38% en 2010.

Entre les attaques contre le journal satirique "Charlie Hebdo" et de l'"Hyper casher" en janvier 2015, les attentats de Paris du 13 novembre 2015, l'attaque du 14 juillet 2016 à Nice et la mort du père Jacques Hamel, égorgé dans son église à Saint-Etienne-de-Rouvray, le 26 juillet dernier, ce ne sont pas moins de 238 personnes qui ont perdu la vie.

Le week-end d'hommage aux victimes de la tuerie du 13 novembre 2015 revendiquée par l'organisation Etat islamique (EI) débutera ce vendredi soir au Stade de France, à Saint-Denis, par une minute de silence avant le match France-Suède.

Aux abords de ce grand stade où s'affrontaient le 13 novembre dernier la France et l'Allemagne, un kamikaze s'était fait exploser, faisant la première victime de la série d'attaques. A Paris, quasi simultanément, trois hommes ouvraient le feu à la kalachnikov sur des dizaines de personnes attablées en terrasse dans les Xe et XIe arrondissements tandis que débutait un carnage dans la salle de spectacles du Bataclan où un commando tirait aveuglément sur la foule jusqu'à l'assaut des forces de police à l'aube.

Dimanche, les commémorations officielles commenceront également devant le Stade de France. Au fil de la matinée, le président français François Hollande, la maire de Paris Anne Hidalgo et le maire de Saint-Denis Didier Paillard, accompagnés par la secrétaire d'Etat chargée de l'Aide aux victimes Juliette Méadel, des victimes et familles de victimes, se rendront sur chacun des lieux touchés par les attentats.

Ils dévoileront des plaques en hommage "aux vies fauchées en ces lieux", avec les prénoms et noms des victimes dont les familles ont donné leur accord. Ils ne devraient pas prononcer de discours.

Les officiels se rendront devant les cafés et restaurants le Carillon, le Petit Cambodge, la Bonne Bière, le Comptoir Voltaire et la Belle équipe, en mémoire des personnes tuées sur ces terrasses des Xe et XIe arrondissements. Le parcours se conclura devant la salle de spectacles du Bataclan.

Le Bataclan rouvrira ses portes samedi avec un concert du chanteur Sting, juste avant cette journée d'hommage durant laquelle la salle restera fermée.

Si aucun grand évènement n'est programmé dans la capitale, un rassemblement public est prévu à la mi-journée devant la mairie du XIe arrondissement, à l'issue duquel devraient être symboliquement lâchés des ballons. L'association de victimes "13onze15 Fraternité Vérité" appelle par ailleurs les Français à participer en mettant une bougie à leurs fenêtres.

La lutte contre le terrorisme occupe le devant de la scène dans l'Hexagone. Plus de 4 000 perquisitions administratives ont eu lieu en un an depuis l'instauration de l'état d'urgence, dans la foulée des attentats du 13 novembre. Près de 500 interpellations ont été réalisées et 95 assignations à résidence sont toujours en vigueur.

Selon un bilan dressé lundi par le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, lors d'une réunion des préfets et procureurs consacrée à la lutte antiterroriste à Paris, ces perquisitions ont permis la saisie de près de 600 armes à feu, "dont 77 armes de guerre".

"Depuis le début de l'année 2016, près de 80 arrêtés d'expulsion ont été pris contre des ressortissants étrangers liés à la mouvance djihadiste, notamment des prêcheurs de haine", a déclaré le ministre. "A ce jour", a précisé Bernard Cazeneuve, dans le cadre de la loi du 13 novembre 2015, "près de 430 interdictions de sortie du territoire (IST) ont été prononcées à l'encontre de Français soupçonnés de vouloir rejoindre les groupes terroristes actifs au Moyen-Orient".

De multiples mesures ont été prises dans le cadre de l'état d'urgence qui a été prolongé en juillet dernier. La surveillance a été renforcée, en particulier devant les établissements scolaires où les consignes sont drastiques. Les parents ne peuvent plus y entrer. Les sorties scolaires ont par ailleurs été réduites.

Si les grands événements comme le marché de Noël de Strasbourg sont maintenus au prix d'un renforcement considérable de la sécurité, des festivités, festivals, salons, manifestations, ou évènements sportifs, ont été annulés ces derniers mois, par précaution ou pour des raisons de sécurité.

Dans les transports en commun, les voyageurs sont appelés à une plus grande vigilance. Dans le métro parisien par exemple, 7 colis suspects sont signalés tous les jours. C'est 60% de plus qu'avant les attentats.

On observe d'autre part une baisse notable de la fréquentation touristique, notamment à Paris. Disneyland Paris enregistre ainsi des pertes records qui ont été multipliées par 9. Le ministre français des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault, a déploré, fin octobre, "l'impact désastreux des attentats terroristes sur les chiffres du tourisme". Selon les données du gouvernement, les arrivées internationales ont chuté de 8,1% de janvier à fin octobre 2016.

De manière plus générale, les attentats ont généré un climat tendu, parfois malsain, au sein de la population française, déjà divisée sur des questions polémiques de société; à commencer par celle de l'intégration de l'islam dans la République sur laquelle vient se greffer la problématique de la crise migratoire.

Depuis les attaques de Charlie Hebdo, les musulmans de France sont visés par certains discours politiques qui les stigmatisent et contribuent à créer des amalgames entre islam et terrorisme, alimentant la suspicion et provoquant l'augmentation d'actes racistes et islamophobes.

"L'exaspération des Français face au terrorisme ne doit pas mener à un discours nationaliste poussé à l'extrême. Nous devons nous rappeler que tout n'est pas noir et réinculquer aux Français un discours patriotique empreint des valeurs de la République", préviennent les géopoliticiens Frédéric Encel et Yves Lacoste, dans leur livre fraîchement paru "Géopolitique de la Nation France".

Par Claudine Girod-Boos

(Rédacteurs :Guangqi CUI, Wei SHAN)
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