Dernière mise à jour à 08h46 le 13/03
La tension diplomatique entre les Pays-Bas et la Turquie était à son comble samedi soir après l'arrêt, pendant quelques heures, du convoi de la ministre turque de la Famille et des Politiques sociales, Fatma Betül Sayan Kaya, près du consulat général de Turquie à Rotterdam.
"Je suis reconduite en Allemagne par la frontière de Nijmegen, au mépris des valeurs démocratiques et humanitaires", a affirmé la ministre Kaya dimanche sur son compte Twitter. "Je condamne cette décision au nom de tous mes concitoyens."
"Le monde entier devrait s'opposer à une attitude aussi fasciste au nom de la démocratie", a ajouté la ministre turque.
Mme Kaya est entrée dans le pays par la frontière entre l'Allemagne et les Pays-Bas en voiture et s'est rendue directement au consulat à Rotterdam. Peu avant son arrivée au consulat, sa voiture a été arrêtée par la police néerlandaise.
Vers 1h00, heure locale (02H00 GMT), la représentante turque a été placée dans une autre voiture et escortée à la frontière par la police néerlandaise. Une équipe d'intervention spéciale est arrivée au consulat avant minuit pour aider la police dans cette intervention.
La ministre avait voulu se rendre au consulat pour s'exprimer devant les ressortissants turcs, et leur demander leur soutien lors du prochain référendum constitutionnel en Turquie.
Le maire de Rotterdam, Ahmed Aboutaleb s'est exprimé lors d'une conférence de presse à 2h00 du matin (03H00 GMT), indiquant que la ministre était une "étrangère non bienvenue" et qu'elle devait donc quitter le pays.
Le maire dit avoir été "terriblement" trompé par le consul-général de Turquie, qui ne l'a pas informé de la venue de la ministre. "Ils ont même conduit plusieurs convois pour nous induire en erreur."
Samedi plus tôt, le gouvernement des Pays-Bas avait annulé l'autorisation de vol accordée au ministre turc des Affaires étrangères Mevlüt Cavusoglu, qui voulait également venir parler en faveur du référendum.
"En interdisant mon entrée au consulat de Turquie à Rotterdam, les Pays-Bas sont en train de violer le droit international, les conventions et les droits de l'Homme", a déclaré la ministre Kaya sur son compte Twitter. "Cette façon de traiter une femme ministre ne peut pas être acceptée", a ajouté Mme Kaya.
Brandissant des drapeaux de la Turquie, des centaines de Turcs installés aux Pays-Bas se sont réunis samedi soir près du consulat à Rotterdam pour manifester leur mécontentement.
Dans la soirée, le maire Aboutaleb a émis un décret d'urgence concernant les rues autour du consulat avant de l'étendre au centre-ville de Rotterdam, empêchant la population, sauf les résidents de la zone, d'accéder au quartier.
Samedi vers 22h00 heure locale, la police militaire néerlandaise a commencé à évacuer les rues, sans provoquer d'incidents majeurs jusqu'à présent, bien que la radio nationale néerlandaise NOS rapporte une montée des tensions.
Après le départ de la ministre, certains manifestants se sont opposés à la police militaire, mais la situation a été rapidement contrôlée, a assuré le maire de la ville.
Selon le Premier ministre turc Binali Yildrim, cet "énorme scandale diplomatique" a été causé par l'incapacité des alliés européens à faire face à la situation.
En Turquie, des centaines de personnes brandissant des drapeaux turcs se sont rassemblées face à l'ambassade et au consulat à Ankara et Istanbul pour protester.
Le ministre turc des Affaires étrangères a demandé à l'ambassadeur néerlandais à Ankara, actuellement en congés, de ne pas revenir "pendant un moment".
Le gouvernement turc a prévu de faire campagne pour le référendum aux Pays-Bas, comme dans d'autres pays européens, pour appeler les citoyens néerlandais ayant également la nationalité turque à voter pour une position plus forte du président turc Recep Tayyip Erdogan le 16 avril prochain.
Soulignant que "l'ordre public était en jeu", le gouvernement néerlandais a interdit la campagne lancée par les responsables turcs et a cherché à l'empêcher.
Toutefois, dans un communiqué officiel publié après la conférence de presse du maire Aboutaleb, les autorités néerlandaises ont dit "vouloir encore discuter avec la Turquie".