Dernière mise à jour à 09h06 le 19/01
Le ministre grec des Finances, Euclide Tsakalotos, a affirmé son soutien aux propositions du chef de l'Etat français dans une tribune publiée ce jeudi par le quotidien français Le Monde, en insistant toutefois sur l'importance de renforcer l'adhésion citoyenne à l'Union européenne pour endiguer le populisme.
"Il est incontestable que depuis son élection, le président Macron a redynamisé le débat sur la réforme de l'Europe, et en particulier de la zone euro. Il est cependant trop tôt pour savoir ce qu'il en sortira concrètement, notamment parce que la fenêtre d'opportunité entre la mise en place du nouveau gouvernement allemand et la tenue des élections parlementaires européennes à l'été 2019 sera relativement courte", indique-t-il.
Selon lui, la mise en place de l'"union bancaire" devrait améliorer "considérablement" la stabilité financière de l'Europe et "sa capacité à faire face à de futures crises financières, surtout si l'on transforme le Mécanisme européen de stabilité (MES) en un Fonds monétaire européen (FME) doté de réelles capacités de soutien".
"Créer une forme de stabilisateur automatique pour les économies européennes, soit par des prêts garantissant l'investissement public d'un Etat membre subissant un choc asymétrique comme le proposent les Français, soit par un soutien aux systèmes nationaux d'assurance-chômage comme le souhaitent les Italiens, contribuera à la stabilité de l'économie réelle", estime le ministre grec
Il précise toutefois qu'il existe "un consensus pour que ce mécanisme stabilisateur, à la différence de ce qui se passe dans la plupart des unions monétaires comme les Etats-Unis, ne s'accompagne d'aucun dispositif de transfert budgétaire. En d'autres termes, l'aide apportée prendra la forme d'un prêt plutôt que d'une solidarité des Etats membres envers une de leurs économies traversant une passe difficile".
Evoquant l'une des propositions d'Emmanuel Macron visant à la création d'un poste de ministre européen des finances, Euclide Tsakalotos affirme que cela "pourrait aussi être une avancée importante".
"Reste à savoir, avant d'en apprécier la portée, si ledit ministre disposera d'un budget propre à la zone euro et d'un certain nombre de pouvoirs discrétionnaires", ajoute-t-il.
Si "instaurer une croissance européenne durable figure en bonne place dans l'agenda d'Emmanuel Macron", tous ces changements sur le plan économique ne doivent pas occulter l'importance de renforcer la dimension sociale et démocratique de l'Union européenne, selon Euclide Tsakalotos.
"Tout comme les autres changements actuellement discutés, il est essentiel que ces réformes soient conçues dans un cadre garantissant une plus grande redevabilité publique et un meilleur contrôle démocratique", explique-t-il.
"La démocratie se nourrit des différences politiques, idéologiques et sociales. Historiquement, le centre-droit et le centre-gauche se sont toujours querellés sur l'importance du rôle redistributeur nécessaire du système fiscal et sur la nécessité et l'ampleur de l'investissement public et des biens collectifs. Il est à craindre que les coalitions arc-en-ciel, surtout si elles cessent d'être une nécessité passagère liée à une conjoncture politique particulière pour devenir une réalité permanente, ne finissent par priver d'oxygène ces débats politiques si indispensables à une démocratie dynamique", prévient M. Tsakalotos.
"On peut enregistrer de la croissance en créant des emplois de mauvaise qualité ou des situations professionnelles qui ne laissent espérer aucune vraie carrière à moyen et long terme. Ce sont ces problèmes qui alimentent en Europe le populisme de droite et les forces nationalistes centrifuges", explique le ministre grec des Finances, qui souligne que les Etats membres devraient à l'avenir rendre compte de leurs progrès non seulement en matière d'ajustement macroéconomique et de réformes structurelles, mais aussi dans le domaine social.
Il met enfin en garde contre la montée du populisme, indiquant que si le déficit démocratique et social de l'Europe n'est pas suffisamment pris en compte par les dirigeants européens, "aucun agenda de croissance ne sera en mesure d'endiguer la vague de populisme".
"Les citoyens européens veulent des institutions qui soient socialement justes, dans leurs procédures et dans leurs décisions. Nous devons nous montrer créatifs en matière de politiques sociales et faire en sorte que les réformes de l'architecture économique et financière de l'Europe soient suffisamment ambitieuses pour aider à la convergence des économies des Etats membres", conclut-il.