Dernière mise à jour à 08h40 le 09/08
La communauté internationale a largement critiqué Washington après son retrait de l'accord nucléaire iranien et sa reprise des sanctions contre l'Iran.
Le président américain Donald Trump a annoncé mardi que quiconque faisait des affaires avec l'Iran ne serait pas autorisé à maintenir des relations commerciales avec les Etats-Unis.
Il a déclaré sur Twitter que "les sanctions contre l'Iran ont été officiellement lancées. Ce sont les sanctions les plus rigoureuses jamais imposées, et en novembre elles s'élèveront à un niveau historique".
En dépit de condamnations dans le monde entier, les Etats-Unis se sont retirés du Plan d'action global conjoint (JCPOA) le 8 mai dernier et ont indiqué qu'ils allaient réimposer de lourdes sanctions contre l'Iran, devant prendre successivement effet au terme d'une période transitoire de 90 jours et d'une autre de 180 jours.
La première série de sanctions, entrant en vigueur ce mardi à 12h01 (4h01 GMT), interdit notamment à l'Iran l'achat de billets de banques en dollars, le commerce de l'or et autres métaux précieux, et l'achat de graphite, d'aluminium, d'acier, de charbon et de logiciels dans les processus industriels.
La deuxième série de sanctions, qui entrera en vigueur le 5 novembre, visera des secteurs iraniens tels que les ports, l'énergie, le transport maritime et la construction navale, les transactions relatives au pétrole et les transactions des institutions financières étrangères avec la Banque centrale d'Iran.
En réponse à l'ordre de réimposer les sanctions, le président iranien Hassan Rohani a indiqué que les Iraniens feraient regretter aux Etats-Unis leurs actions.
"A travers l'unité et la solidarité, les Iraniens vont surmonter le retour des sanctions", a déclaré le président Rohani, ajoutant que "Trump apprendra que ce genre de pression n'a pas eu raison des Iraniens dans le passé et ne le fera jamais à l'avenir".
Le porte-parole des Nations Unies, Farhan Haq a déclaré que l'ONU continuait d'encourager tous les gouvernements à soutenir le JCPOA.
"Le secrétaire général a lui-même discuté à plusieurs reprises de l'importance du Plan d'action global conjoint comme étant l'un des accomplissements diplomatiques les plus importants de ces dernières années. Il estime qu'il mérite un soutien continu et que toutes les parties à cet accord doivent respecter ses termes", a-t-il expliqué.
Face aux préoccupations sur d'éventuels impacts humanitaires de ces sanctions, M. Haq a indiqué qu'il fallait attendre d'en voir les résultats pour pouvoir les évaluer. Mais "quelles que soient les mesures prises", il est important que "l'Iran et les autres parties mettent en application les termes du Plan d'action global conjoint".
Le secrétaire d'Etat britannique à la Défense, Gavin Williamson, a déclaré mardi que le JCPOA actuel était le "meilleur accord possible", et constituait une manière "réaliste" de répondre aux inquiétudes de l'Occident vis-à-vis de l'Iran, en dépit de la haine affichée par le président américain Donald Trump envers cet accord.
"Au sujet de l'accord passé avec l'Iran, nous encourageons vraiment les Etats-Unis et les autres nations à se réunir et à discuter du fait que nous disposons d'un outil qui peut fonctionner. Nous encourageons simplement les Etats-Unis à commencer à discuter avec leurs partenaires et avec l'Iran, afin de trouver une solution pour aller de l'avant", a-t-il déclaré.
Quelques heures avant que les Etats-Unis ne s'apprêtent à rétablir les sanctions contre l'Iran, l'Union européenne (UE), le Royaume-Uni, la France et l'Allemagne ont fait savoir dans un communiqué conjoint qu'ils maintiendraient leurs relations économiques avec Téhéran et "sont déterminés à protéger les opérateurs économiques européens engagés dans des activités commerciales légitimes avec l'Iran".
Ils ont également indiqué que "la loi de blocage mise à jour de l'Union européenne entre en vigueur le 7 août afin de protéger les entreprises européennes sous contrats commerciaux légitimes avec l'Iran de l'impact des sanctions extra-territoriales américaines".
Guenther Oettinger, membre de l'Union chrétienne démocrate (CDU) d'Allemagne et commissaire européen, a indiqué que les caisses d'épargne et de crédit allemandes pourraient devenir une solution potentielle pour que les entreprises continuent à faire des affaires avec ce pays du Moyen-Orient et contournent les sanctions américaines.
M. Oettinger a précisé que le secteur financier régional et décentralisé avait traditionnellement peu de liens avec les marchés financiers américains et était donc moins susceptible d'être touché par le nouveau régime de sanctions.
Le ministère russe des Affaires étrangères a condamné mardi la décision de Washington, affirmant que la Russie ferait tout ce qui est en son pouvoir pour préserver et mettre pleinement en œuvre l'accord nucléaire iranien, qui est menacé par les sanctions unilatérales américaines.
"Nous condamnons toutes les sanctions unilatérales contournant les décisions du Conseil de sécurité de l'ONU, notamment lorsqu'elles ont une application extraterritoriale et portent atteinte aux intérêts de pays tiers", a déclaré le ministère russe.
Puisque la Turquie pourrait également être placée dans une situation difficile à cause de la démarche américaine, le ministère turc des Affaires étrangères a fait savoir que les autorités turques cherchaient un moyen d'éviter les conséquences néfastes des sanctions américaines contre Ankara.
"Nous n'avons pas à souscrire aux sanctions imposées par un pays à l'encontre d'un autre. Nous ne considérons pas non plus que ces sanctions soient correctes", a indiqué le ministre turc des Affaires étrangères Mevlut Cavusoglu.
Le ministère syrien des Affaires étrangères a également condamné la démarche de Washington, ajoutant que la Syrie soutenait l'Iran face aux politiques américaines "agressives".
Le ministère a indiqué que les sanctions étaient "des mesures unilatérales et illégitimes qui confirment la tendance à l'hégémonie et l'arrogance des politiques de l'administration américaine après la perte de sa crédibilité suite au retrait de l'accord nucléaire iranien".
Le conseiller d'Etat chinois et ministre des Affaires étrangères Wang Yi avait déclaré vendredi à Singapour que la Chine était disposée à travailler avec toutes les parties concernées en vue de sauvegarder l'accord nucléaire iranien.
"La Chine considère toujours le Plan d'action global conjoint comme un accord multilatéral, vérifié et approuvé par le Conseil de sécurité des Nations Unies et reconnaissant les intérêts communs de toutes les parties et de la communauté internationale, qui doit être respecté et protégé afin de maintenir l'autorité des Nations Unies, l'efficacité des accords multilatéraux et la crédibilité des règles internationales", avait déclaré M. Wang lors d'une réunion avec le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif en marge de la réunion des ministres des Affaires étrangères de l'Association des nations d'Asie du Sud-Est (ASEAN) et de réunions connexes.
En 2015, l'Iran, l'Allemagne, L'Union européenne et les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU, à savoir la Chine, les Etats-Unis, la France, le Royaume-Uni et la Russie, avaient signé l'accord nucléaire à Vienne. En vertu de cet accord, l'Iran avait convenu de limiter ses activités nucléaires sensibles et d'accepter les inspections internationales en échange de la levée de sanctions économiques rigoureuses.