Dernière mise à jour à 08h21 le 06/11
Après ses ministres, le président français Macron est monté à son tour au créneau, lundi, dans la presse, pour tenter d'apaiser la colère grandissante des Français face à la hausse du prix des carburants contre laquelle s'organise notamment un blocage des routes de l'Hexagone prévu le 17 novembre prochain.
Les différentes interventions de l'Exécutif commencent à ressembler à une opération déminage.
Après le Premier ministre Edouard Philippe, qui a défendu samedi la politique de taxation des carburants, c'est le Président Macron en personne qui est monté au créneau, lundi, dans plusieurs journaux de la presse quotidienne régionale.
"J'assume parfaitement que la fiscalité due au diesel soit au niveau de celle de l'essence et je préfère la taxation du carburant à la taxation du travail", a déclaré notamment le chef de l'Etat.
"Les mêmes qui râlent sur la hausse du carburant réclament aussi qu'on lutte contre la pollution de l'air parce que leurs enfants souffrent de maladies", estime Emmanuel Macron, affirmant que "la hausse du prix à la pompe qu'on constate aujourd'hui est liée à 70 % à celle des cours du pétrole".
Mais le président, en chute libre dans les sondages, se dit en même temps "particulièrement sensible à la colère de ceux qui doivent se déplacer pour travailler" et évoque de possibles modalités d'accompagnement de la hausse du prix des carburants. "La région Hauts-de-France a proposé une aide au transport pour ceux qui ont plus de 30 km par jour de déplacement. J'ai demandé au gouvernement de voir comment nous pouvons accompagner cela", a-t-il indiqué.
Le ministre de l'Économie Bruno Le Maire a cependant rejeté lundi sans ambiguïté tout coup d'arrêt à la hausse de la fiscalité, qui doit encore augmenter au 1er janvier. "Non, elle ne sera pas suspendue. On ne suspend pas la transition écologique, la conversion du parc automobile français, qui est nécessaire", a-t-il déclaré.
En un an, le prix du diesel à la pompe a progressé d'environ 23% contre 15% pour celui de l'essence. Or, sur les 32 millions et demi de voitures roulant en France en 2017, plus de 6 sur 10 carburent au diesel. Une grande partie des automobilistes, notamment dans les zones rurales, n'ont par ailleurs pas de réels modes alternatifs à la voiture pour aller travailler ou recourir à des services publics de plus en plus distants.
Alors que s'accroît le scepticisme des Français face aux promesses d'une hausse de leur pouvoir d'achat, la grogne contre l'augmentation des prix des carburants prend de l'ampleur. Une pétition signée par plus de 700 000 personnes appelle notamment à un blocage des routes de l'Hexagone le 17 novembre prochain. Un mouvement qui, selon un sondage publié jeudi, serait soutenu par les trois quarts des Français.
D'après ce sondage, 76% des Français jugeraient par ailleurs que l'augmentation des taxes sur le carburant et le fioul domestique est une mauvaise chose et 80% d'entre eux estimeraient que les hausses des taxes sur les produits pétroliers auront un impact élevé sur leur pouvoir d'achat.
Lundi, plus d'une centaine de poids lourds ont mené des opérations escargot sur les principaux axes routiers de Champagne-Ardenne alors qu'Emmanuel Macron a entamé dans la région une "itinérance mémorielle" qui marque le centenaire de la fin de la Première Guerre mondiale.
La contestation contre la hausse du prix des carburants se répand d'autre part sur les réseaux sociaux où circulent de nombreuses fausses informations. Dimanche, la secrétaire d'État auprès du ministre de la Transition écologique Emmanuelle Wargon a tenté une contre-attaque avec une vidéo en réponse à celle d'une automobiliste en colère visionnée plusieurs millions de fois depuis fin octobre. "Il n'y a aucun complot du gouvernement contre la voiture", a-t-elle assuré.
La polémique autour de la hausse du prix des carburants s'invite également sur l'échiquier politique.
Le Rassemblement national, des élus Les Républicains (LR), le chef de file de Debout la France Nicolas Dupont-Aignan, ont apporté leur soutien aux mouvements de contestation.
Des parlementaires de tous bords politiques - y compris au sein de la majorité - demandent au gouvernement des mesures d'aides pour les ménages précaires.
Les enseignes de la grande distribution E.Leclerc et Carrefour ont par ailleurs annoncé lundi vendre le carburant à prix coûtant en novembre. "Dans un contexte d'augmentation drastique du prix des carburants et fidèle à son combat en faveur du pouvoir d'achat des Français, le Mouvement E.Leclerc a pris la décision de prolonger son offre de carburants à prix coûtant, initialement programmée du 2 au 4 novembre, jusqu'au 30 novembre 2018", a indiqué un communiqué du groupe.
"Celui qui tire la croissance, c'est le consommateur. Aujourd'hui cette grogne est légitime", a déclaré le président des Centres E.Leclerc Michel-Édouard Leclerc. "C'est important commercialement de satisfaire nos clients mais c'est important aussi de donner un signal aux pouvoirs publics. Il faut savoir choisir son camp", a-t-il dit.