Dernière mise à jour à 09h07 le 02/04
Bien qu'il soit encore difficile au vu des incertitudes actuelles de prévoir avec précision l'impact du Brexit sur le marché du travail britannique, les secteurs qui emploient beaucoup de travailleurs venus d'autres pays de l'Union européenne (UE) seront sans aucun doute confrontés à de grands défis, a déclaré dans une récente interview accordée à Xinhua Pawel Adrjan, économiste britannique auprès du site de recrutement Indeed Hiring Lab.
UNE ÉCONOMIE FAIBLE MAIS UN MARCHÉ DE L'EMPLOI FORT
"Ce qui est surprenant, c'est qu'alors même que l'économie et les investissements ralentissent au Royaume-Uni, le marché du travail ne cesse de croître", a déclaré M. Adrjan.
Des chiffres récents fournis par le Bureau des statistiques nationales (ONS) ont montré que le nombre de personnes ayant un emploi au Royaume-Uni avait atteint le chiffre record de 32,7 millions entre novembre et janvier.
Une des causes probables de cette augmentation semble être l'incertitude créée par le Brexit, a indiqué M. Adrjan. "En raison des incertitudes, les entreprises hésitent à investir dans des projets à long terme, et le seul moyen pour elles de répondre à la demande est donc de continuer à embaucher, ce qui génère un nombre croissant d'emplois", a-t-il déclaré.
Les flux migratoires, notamment en provenance des pays de l'UE, ont également ralenti, ce qui a également contribué à ces chiffres de l'emploi, a-t-il affirmé.
LES TRAVAILLEURS DE L'UE NE SONT PAS REMPLAÇABLES
"Nous ne savons pas quelle forme prendra le Brexit, ni quand il se produira. Il est donc difficile de dire quel sera l'impact réel du Brexit sur le marché du travail", a déclaré M. Adrjan.
Cependant, de nombreux secteurs de l'économie britannique dépendent fortement des travailleurs étrangers, comme ceux de la construction, de l'hôtellerie et de l'agriculture. D'autres secteurs embauchent du personnel étranger hautement qualifié, comme l'éducation et la finance.
"Le Brexit posera problème pour ces secteurs, et la future politique migratoire du pays aura donc une importance capitale", a affirmé M. Adrjan.
"Certains secteurs, comme l'enseignement, l'hôtellerie et la restauration, emploient de nombreux travailleurs européens à des salaires relativement bas. Si ces travailleurs doivent à l'avenir faire une demande de visa, cela signifiera soit que les salaires devront augmenter pour se conformer aux exigences en matière de délivrance de visas, soit que les entreprises pourront embaucher moins de travailleurs à ces postes", a-t-il expliqué.
La future politique britannique en matière de visas sera cependant moins importante pour les secteurs exigeant un haut niveau de qualification, comme les finances et les technologies de l'information, où les salaires plus élevés pourront facilement couvrir le coût des demandes de visa.
Bien que certains affirment que les travailleurs de l'UE seront remplacés par des ressortissants venus d'autres pays, M. Adrjan a souligné que tous les travailleurs étrangers n'étaient pas interchangeables.
Les données récemment collectées par Indeed Hiring Lab ont en effet révélé que les emplois les plus populaires parmi les citoyens de l'UE n'étaient pas les mêmes que ceux des demandeurs d'emploi non européens.
D'autres font valoir qu'après le Brexit, les employeurs qui ne parviendraient plus à trouver de travailleurs originaires de l'UE devraient embaucher des Britanniques, dans la mesure où beaucoup de gens sont encore en recherche d'emploi au Royaume-Uni malgré le taux d'emploi record. Ces chômeurs pourraient cependant avoir besoin d'emplois du temps plus flexibles ou de davantage de formation, ce qui coûtera au final plus cher aux employeurs, a indiqué M. Adrjan.
PRIORITÉ À LA FORMATION
"Au cours des trois dernières années, l'intérêt global des demandeurs d'emploi étrangers pour le Royaume-Uni a diminué", a souligné M. Adrjan. Depuis le référendum sur le Brexit, la livre sterling s'est en effet dépréciée, ce qui a rendu les emplois au Royaume-Uni moins attractifs pour les demandeurs d'emploi étrangers.
De fait, certains secteurs comme la garde d'enfants ou les technologies de l'information et de la communication font déjà face à une pénurie de main-d'œuvre qualifiée.
"Il faudrait se concentrer sur la formation professionnelle ou sur la réforme du système éducatif. Malheureusement, certains chantiers à long terme, comme la réforme de la formation professionnelle (...), ont été remis à plus tard en raison du Brexit", a indiqué M. Adrjan.
Par ailleurs, depuis quelques temps, les salaires britanniques ne connaissent pas vraiment d'augmentation significative. "Les salaires augmentent, mais le pouvoir d'achat reste inférieur à ce qu'il était avant la crise financière", a déclaré M. Adrjan, soulignant que ce facteur pourrait également contribuer à rendre le marché de l'emploi britannique moins attractif.